Fragment Divertissement n° 4 / 7 – Papier original : RO 139, 210, 209, 217-2 et 133

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Divertissement n° 186 p. 53 à 57 v° / C2 : p. 76 à 81

Éditions de Port-Royal : Chap. XXVI - Misère de l’homme : 1669 et janv. 1670 p. 203-217 / 1678 n° 1 à 3 p. 198-211

Éditions savantes : Faugère II, 31, II / Havet IV.2 / Michaut 335 / Brunschvicg 139 / Tourneur p. 205-3 / Le Guern 126 / Lafuma 136 / Sellier 168

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Éclaircissements

 

 

 

Bibliographie

Analyse du texte de RO 139 : Quand je m’y suis mis quelquefois à considérer les diverses agitations des hommes,...

Analyse du texte de RO 210 (+++) : De là vient que le jeu et la conversation des femmes,...

Analyse du texte de RO 209 (A) : Et ainsi, quand on leur reproche que ce qu’ils recherchent avec tant d’ardeur ne saurait les satisfaire,...

Analyse du texte de RO 217-2 (B et D) et 133 (B et C) : Ainsi l’homme est si malheureux qu’il s’ennuierait même sans aucune cause d’ennui,...

 

 

 

Et ainsi, quand on leur reproche que ce qu’ils recherchent avec tant d’ardeur ne saurait les satisfaire, s’ils répondaient comme ils devraient le faire s’ils y pensaient bien, qu’ils ne recherchent en cela qu’une occupation violente et impétueuse qui les détourne de penser à soi et que c’est pour cela qu’ils se proposent un objet attirant qui les charme et les attire avec ardeur, ils laisseraient leurs adversaires sans repartie...

 

Pensées, éd. Havet, I, Delagrave, 1866, p. 56. Port-Royal supprime les derniers mots, de peur qu’on ne prenne au sérieux cette justification des gens qui passent toute la journée à la chasse.

 

La danse : il faut bien penser où l’on mettra ses pieds. (en marge)

Mesnard Jean, “Achèvement et inachèvement dans les Pensées de Pascal”, Studi francesi, 143, anno XLVIII, maggio-agosto 2004, p. 300-320. Voir p. 310. Aspect général. Inachèvement du texte.

Mesnard Jean, « L’exemple dans les Pensées de Pascal”, in Poétique de la pensée, Études sur l’âge classique et le siècle philosophique, En hommage à Jean Dagen, Paris, Champion, 2006, p. 569-585.

Voir p. 578. Penser où on mettra ses pieds est un moyen sûr de ne pas penser à soi.

 

Abraham Bosse, Le bal

 

Mais ils ne répondent pas cela, parce qu’ils ne se connaissent pas eux‑mêmes. Ils ne savent pas que ce n’est que la chasse et non pas la prise qu’ils recherchent.

 

Ce passage permet à Nicole de rattacher la théorie du divertissement à celle de l’amour propre par le biais de l’idée de l’ignorance de soi-même, qui leur est commune.

 

Le gentilhomme croit sincèrement que la chasse est un plaisir grand et un plaisir royal. Mais son piqueur n’est pas de ce sentiment‑là. (en marge)

 

Montaigne, Essais, I, XLII. Les enfants de chœur ne prennent pas goût à la musique, contrairement aux auditeurs, parce qu’ils en ont trop. « Les farces des bateleurs nous réjouissent, mais aux joueurs elles servent de corvée ». C’est un cas où Montaigne voit les effets et Pascal la raison.

Mongrédien Georges, La vie littéraire au XVIIe siècle, p. 52. Libelles contre le goût de Louis XIII pour la chasse ; il chasse par office et règne par divertissement.

 

Ils s’imaginent que s’ils avaient obtenu cette charge ils se reposeraient ensuite avec plaisir et ne sentent pas la nature insatiable de la cupidité. Ils croient chercher sincèrement le repos, et ne cherchent en effet que l’agitation. Ils ont un instinct secret qui les porte à chercher le divertissement et l’occupation au‑dehors, qui vient du ressentiment de leurs misères continuelles. Et ils ont un autre instinct secret qui reste de la grandeur de notre première nature, qui leur fait connaître que le bonheur n’est en effet que dans le repos et non pas dans le tumulte. Et de ces deux instincts contraires il se forme en eux un projet confus qui se cache à leur vue dans le fond de leur âme, qui les porte à tendre au repos par l’agitation et à se figurer toujours que la satisfaction qu’ils n’ont point leur arrivera si, en surmontant quelques difficultés qu’ils envisagent, ils peuvent s’ouvrir par là la porte au repos.

Ainsi s’écoule toute la vie, on cherche le repos en combattant quelques obstacles. Et si on les a surmontés, le repos devient insupportable par l’ennui qu’il engendre. Il en faut sortir et mendier le tumulte. Car ou l’on pense aux misères qu’on a ou à celles qui nous menacent. Et quand on se verrait même assez à l’abri de toutes parts, l’ennui, de son autorité privée, ne laisserait pas de sortir du fond du cœur, où il a des racines naturelles, et de remplir l’esprit de son venin.

 

Pascal insiste bien sur le fait que la recherche du bonheur au dehors de soi répond à un instinct, et non pas à une lubie arbitraire des hommes. Voir Philosophes 5 (Laf. 143, Sel. 176). Philosophes. Nous sommes pleins de choses qui nous jettent au-dehors. Notre instinct nous fait sentir qu’il faut chercher notre bonheur hors de nous. Nos passions nous poussent au-dehors, quand même les objets ne s’offriraient pas pour les exciter. Les objets du dehors nous tentent d’eux-mêmes et nous appellent quand même nous n’y pensons pas. Et ainsi les philosophes ont beau dire : rentrez-vous en vous-mêmes, vous y trouverez votre bien ; on ne les croit pas et ceux qui les croient sont les plus vides et les plus sots.

Mesnard Jean, “De la diversion au divertissement”, in La culture au XVIIe siècle, p. 71. L’une porte l’homme vers l’action, qui est en fait divertissement, l’autre vers le repos, qui met l’homme en face de lui-même.

Mesnard Jean, Les Pensées de Pascal, 2e éd., Paris, SEDES-CDU, 1993, p. 224 sq. Les deux termes opposés d’agitation et de repos dans la théorie du divertissement. L’homme s’agite parce qu’il ne supporte pas le repos. Mais il croit chercher ce repos qu’il fuit en réalité. Le divertissement associe une agitation réelle à une illusion de repos. Atteindre un objet qui doit procurer le repos, c’est infailliblement trouver l’ennui ; de là vient la nécessité de réitérer le processus, indéfiniment.

Descotes Dominique, L’argumentation chez Pascal, Paris, Presses Universitaires de France, 1993, p. 302-303. Rechercher le repos par l’agitation est une réalité physique familière : c’est le cas des toupies, qui s’agitent par le mouvement de rotation sur leur axe, mais qui demeurent en repos debout tant que ce mouvement dure. Lorsque le mouvement de rotation cesse, la toupie tombe. Pour qu’elle continue à tourner, il faut qu’elle reçoive périodiquement une impulsion qui relance la rotation.

Beugnot Bernard, “La méditation pascalienne sur le repos”, in Pascal. Thématique des Pensées, p. 37 sq. Réseau thématique : p. 60. Paix, tranquillité : p. 60. Assurance que donne la foi : p. 61. Rien ne donne le repos que la recherche sincère de la vérité : p. 62. L’inquiétude indispensable : p. 71. Il n’y a de repos que dans la recherche : p. 74.

Le repos comme succession de déséquilibres : voir Coulet, Le roman jusqu’à la Révolution, coll. U, p. 229, sur les Lettres portugaises.

McKenna Antony, Entre Descartes et Gassendi. La première édition des Pensées de Pascal, Paris et Oxford, Voltaire Foundation, 1993, p. 17 sq.

La Fayette Mme de, La princesse de Clèves, éd. J. Mesnard, Paris, Garnier-Flammarion, 1996, p. 252 définit l’état de la cour comme une agitation sans désordre.

 

Mais qu’on juge quel est ce bonheur qui consiste à être diverti de penser à soi. (texte barré)