Fragment Divertissement n° 2 / 7 – Papier original : RO 121-2

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Divertissement n° 184 p. 53 / C2 : p. 75

Éditions de Port-Royal : Chap. XXVI - Misère de l’homme : 1669 et janv. 1670 p. 217 / 1678 n° 4 p. 211

Éditions savantes : Faugère II, 39, IV / Havet IV.5 / Brunschvicg 169 et 168 / Tourneur p. 205-1 / Le Guern 124 / Lafuma 134 et 133 / Sellier 166

 

 

 

 

 

Dans l’édition de Port-Royal

 

Chap. XXVI - Misère de l’homme : 1669 et janv. 1670 p. 217 / 1678 n° 4 p. 211

       

 

Différences constatées par rapport au manuscrit original

 

Ed. janvier 1670 1

Transcription du manuscrit

 

 Les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser : c’est tout ce qu’ils ont pu inventer pour se consoler de tant de maux. Mais c’est une consolation bien misérable, puisqu’elle va non pas à guérir le mal, mais à le cacher simplement pour un peu de temps, et qu’en le cachant elle fait qu’on ne pense pas à le guérir véritablement. Ainsi par un étrange renversement de la nature de l’homme, il se trouve que l’ennui qui est son mal le plus sensible est en quelque sorte son plus grand bien, parce qu’il peut contribuer plus que toute chose 2 à lui faire chercher sa véritable guérison ; et que le divertissement qu’il regarde comme son plus grand bien est en effet son plus grand mal, parce qu’il l’éloigne plus que toute chose 2 de chercher le remède à ses maux. Et l’un et l’autre est une preuve admirable de la misère, et de la corruption de l’homme, et en même temps de sa grandeur ; puisque l’homme ne s’ennuie de tout, et ne cherche cette multitude d’occupations, que parce qu’il a l’idée du bonheur qu’il a perdu ; lequel ne trouvant pas en soi, il le cherche inutilement dans les choses extérieures, sans se pouvoir jamais contenter, parce qu’il n’est ni dans nous, ni dans les créatures, mais en Dieu seul.

 

 

Les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser.

Nonobstant ces misères, il veut être heureux, et ne veut être qu’heureux, et ne peut ne vouloir pas l’être. Mais comment s’y prendra‑t‑il ? Il faudrait, pour bien faire, qu’il se rendît immortel. Mais ne le pouvant, il s’est avisé de s’empêcher d’y penser.

 

 

1 Conventions : rose = glose des éditeurs ; vert = correction des éditeurs ; marron = texte non retenu par les éditeurs.

2 P-R 1678 : toutes choses.

 

Commentaire

 

Le commentaire est dans la manière de Nicole. Il supprime le second paragraphe, qui demanderait pour être complètement expliqué que le texte entre dans des considérations d’ordre théologique. En revanche, le texte de Port-Royal témoigne du souci des éditeurs d’intégrer le thème du divertissement dans l’ensemble des « contrariétés » de la nature humaine et de leur résolution par le dogme du péché originel.

 

Une copie du texte retenu par le Comité a été conservée dans le Portefeuille Vallant page 56 v°.

 

 

Transcription :

                                se       de            des

les homes nayant peu  guerir  la mort,   les miseres lignorance ils se sont auises pour se rendre heureux de ny point penser

 

Il est difficile de savoir si les corrections sont dues à l’initiative du copiste (il semble que c’est la même encre et la même écriture), ou si la copie a servi d’instrument de travail à un membre du Comité. Ces corrections n’ont pas été retenues dans l’édition.