Glossaire

 

Chair, Charnel.

Charnel : de chair, relatif à la chair. L’adjectif charnel désigne le caractère des hommes dont la religion est attachée aux rites formels et dont le cœur est attiré par les objets de la concupiscence. Le mot s’applique aux juifs et aux païens, mais aussi des chrétiens charnels, comme en témoigne Religion aimable 2 (Laf. 222, Sel. 255) et Perpétuité 8 (Laf. 286, Sel. 318).

Pensée n° 17R (Laf. 933, Sel. 761) : Concupiscence de la chair, concupiscence des yeux, orgueil, etc. Il y a trois ordres de choses. La chair, l’esprit, la volonté. Les charnels sont les riches, les rois. Ils ont pour objet le corps.

Dans les Écrits des curés de Paris, la morale des casuistes est qualifiée par Pascal de charnelle.

Voir aussi Loi figurative 12 (Laf. 256, Sel. 288), Loi figurative 24 (Laf. 269, Sel. 300), Loi figurative 25 (Laf. 270, Sel. 301), Perpétuité 9 (Laf. 287, Sel. 319), Perpétuité 11 (Laf. 289, Sel. 321), Preuves de Jésus-Christ 11 (Laf. 308, Sel. 339), Prophéties VIII (Laf. 502, Sel. 738) et Pensées diverses (Laf. 593, Sel. 493).

 

Chambre.

Terme juridique qui se dit de plusieurs juridictions où on rend la justice. En chaque parlement il y a une Grande Chambre, qu’on appelle aussi chambre des audiences (dont les conseillers s’appellent les jugeurs), une chambre des requêtes (dont les conseillers sont appelés rapporteurs), des chambres des enquêtes qui jugent les procès par écrit. La chambre de la Tournelle juge des procès criminels. Furetière donne une liste des chambres de toutes natures. Une chambre est souveraine dans son domaine de compétence, mais non dans ceux qui relèvent des autres chambres. Pascal prend le mot en un sens métaphorique, pour désigner les domaines séparés qui sont chacun soumis à des règles propres : la politique (le fort), l’esthétique (le beau), la science (les bons esprits) et la religion (le pieux).

Voir Misère 7 (Laf. 58, Sel. 92) et Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168).

 

Champs.

Campagne ; parfois équivalent de province. Voir Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168).

 

Chancelier.

Cabourdin Guy et Viard Georges, Lexique historique de la France d’ancien régime, p. 57. Des six grands officiers de la couronne, le chancelier est le seul dont le rôle a grandi au XVIe et au début du XVIIe siècles. Il représente, après le monarque, la royauté ; il ne prend pas le deuil du roi et ne va pas à ses obsèques. Il est « la voix du prince » (Le Bret) et ne dépend que de lui. Il le représente aux États généraux et aux lits de justice du parlement. En l’absence du souverain, il préside le Conseil du roi. Il appose le sceau de France dont il a la garde. Il est le chef de la justice, police et administration. Il baille les lettres de provision à tous les officiers. Il préside le parlement lorsqu’il s’y rend pour la vérification des édits et l’élection des officiers. Il est maître de la librairie, chef des universités, des collèges, des académies, des imprimeurs et des libraires.

Bluche François (dir.), Dictionnaire du grand siècle, article Chanceliers et gardes des sceaux, p. 297-298. Le chancelier est inamovible parce que sa charge est rattachée à la couronne et non à la personne du souverain. Il ne peut perdre sa place que par la mort, la démission volontaire ou la forfaiture. Pierre Séguier a eu ce poste de 1635 à 1672. Pascal lui a dédicacé sa machine arithmétique dans sa Lettre dédicatoire à Monseigneur le chancelier de 1645, OC II, éd. J. Mesnard, p. 331 sq.

Voir Raisons des effets 6 (Laf. 87, Sel. 121) et Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168).

 

Chaos.

Le mot chaos apparaît dans le fragment Fausseté 6 (Laf. 208, Sel. 240), et dans le fragment Preuves par discours I (Laf. 418, Sel. 680), mais pour désigner l’incertitude relative à l’existence de Dieu.

Voir aussi Contrariétés 14 (Laf. 131, Sel. 164).

 

Charge.

Office accordée ou achetée pour le service du royaume. Un magistrat, un officier, un ambassadeur ont chacun une charge.

Une charge à l’armée : la hiérarchie du commandement militaire n’est pas au XVIIe siècle organisée comme dans l’armée moderne. La vénalité des charges d’officiers est la règle : on achetait les grandes charges, comme celles de colonel général ou de maréchal des logis de la cavalerie. Il faut disposer d’une certaine fortune pour pouvoir acheter une charge d’officier : le prix d’une compagnie était de plusieurs milliers de livres. L’encadrement est en majorité nobiliaire ; la vénalité permet aussi à de riches bourgeois d’acheter les charges de capitaine ou de colonel. Il en résultait que l’on pouvait passer d’un grade à un autre sans passer par les intermédiaires. La charge était très coûteuse : il fallait parfois avancer la solde, et payer les primes d’engagement. Mais le système de la vénalité ne garantit pas la compétence : comme le dit la Palatine, « la plupart des officiers sont de jeunes niais, des fils des gens de robe de Paris, qui de leur vie n’ont vu un homme mort. Toutes ces charges ont été achetées. Quand ils doivent se battre, ils prennent peur et se sauvent ». Voir l’article Officiers du Dictionnaire du grand siècle de F. Bluche (dir.), Paris Fayard, 1990, p. 1107-1108.

Voir Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168), Divertissement 7 (Laf. 139, Sel. 171), Pensées diverses (Laf. 688, Sel. 567) et Preuves par discours II (Laf. 427, Sel. 681).

 

Charité.

La charité s’entend au sens de l’amour de Dieu. Voir Bouyer, Dictionnaire théologique, art. Amour, p. 44 sq. Sur l’amour-charité, voir p. 50 sq.

Il n’y a pas de milieu entre charité et concupiscence : voir De Lubac Henri, Augustinisme et théologie moderne, p. 100.

Voir Grandeur 14 (Laf. 118, Sel. 150), Soumission 10 (Laf. 176, Sel. 207), Fausseté 8 (Laf. 210, Sel. 243), Loi figurative 22 (Laf. 267, Sel. 298), Loi figurative 25 (Laf. 270, Sel. 301), etc.

 

Chasse.

Le fragment Vanité 26 (Laf. 39, Sel. 73) présente la chasse comme une marque de la vanité de l’homme, par la disproportion qui existe entre sa futilité et la grandeur de ceux qui s’y consacrent. La chasse plutôt que la prise : dans la chasse prise comme exemple du divertissement, c’est la poursuite qui absorbe l’esprit ; mais une fois le gibier capturé, on ne s’y intéresse plus. Voir en marge du grand fragment Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168).

Dans Contrariétés 8 (Laf. 125, Sel. 158) l’instinct de la chasse est rapporté à la coutume.

Le mot chasse, dans l’expression gagner une chasse (au jeu de paume), désigne le premier rebond d’une balle. Voir Pensées diverses (Laf. 522, Sel. 453). Les jeux de balle servent aussi d’exemple de la manière dont on se sert de jeux insignifiants pour divertir son esprit de préoccupations plus sérieuses, mais généralement affligeantes.

Voir aussi Raisons des effets 19 (Laf. 101, Sel. 134) et Pensées diverses (Laf. 628, Sel. 521).