Fragment Preuves de Jésus-Christ n° 16 / 24  – Papier original : RO 53-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Preuves de J.-C. n° 345 p. 161 v° / C2 : p. 192-193

Éditions de Port-Royal : Chap. XVI - Diverses preuves de Jésus-Christ : 1669 et janvier 1670 p. 131  / 1678 n° 6 p. 130-131

Éditions savantes : Faugère II, 321, XVII / Havet XIX.4 bis / Brunschvicg 639 / Tourneur p. 280-2 / Le Guern 295 / Lafuma 314 / Sellier 345

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Bibliographie

 

 

CHÉDOZEAU Bernard, L’univers biblique catholique au siècle de Louis XIV. La Bible de Port-Royal, II, Les Préfaces de l’Ancien Testament (1672-1693), Paris, Champion, 2013.

COHN Lionel, Une polémique judéo-chrétienne au Moyen Age et ses rapports avec l’analyse pascalienne de la religion juive, Reprint of Bar Ilan, volume in Humanities and social sciences, Jérusalem, 1969.

ERNST Pol, Approches pascaliennes, Gembloux, Duculot, 1970.

FLAVIUS JOSÈPHE, Histoire ancienne des Juifs, Livre X, ch.VIII-XII, éd. Lidis-Brepols, 1981, p. 316-330.

GROTIUS Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVI.

LODS Adolphe, Les prophètes d’Israël, Paris, Albin Michel, 1949.

POZNANSKI Lucien, La chute du temple de Jérusalem, Paris, Complexe, 1991.

 

 

Éclaircissements

 

Quand Nabuchodonosor emmena le peuple de peur qu’on ne crût que le sceptre fût ôté de Juda il leur fut dit auparavant qu’ils y seraient peu, et qu’ils y seraient,

 

Sur la prophétie de Jacob, qui promet que le sceptre ne quittera pas la tribu de Juda avant que le Messie n’arrive, voir le fragment Preuves de Jésus-Christ 19 (Laf. 317, Sel. 348) : J.-C. prédit quant au temps et à l’état du monde. Le duc ôté de la cuisse, et la 4e monarchie.

 

Le siège et la prise de Jérusalem d’après l’Histoire du Vieux et du Nouveau Testament.

 

Nabuchodonosor, roi de Babylone, succède à Nabopolassar en 623 avant Jésus-Christ. Il a conquis, pillé et ruiné Jérusalem. Le roi juif Joachim tenta de se rebeller, mais l’échec de sa révolte entraîna la captivité de l’élite de son peuple à Babylone. Son successeur Sédécias ne fit qu’empirer la situation, car sa résistance entraîna la déportation de tout le peuple et la destruction de Jérusalem. La déportation à Babylone ne prend fin qu’en 539 lorsque Cyrus permit aux Juifs de regagner la Palestine et de reconstruire Jérusalem et le Temple.

Voir le dossier thématique sur le Temple.

Suivant la Bible de Jérusalem, la chronologie des événements semble être la suivante :

598-597. Règne de Joakim.

Début 597. Siège de Jérusalem et prise de la ville (16 mars).

597-587. Règne de Sédécias.

589-588. Révolte de Sédécias.

Juin-juillet 588 ou 586. Prise de Jérusalem et capture de Sédécias.

Un mois plus tard, destruction du temple et de la ville par Nabuzardan.

582-581. Nouvelle déportation des Juifs.

L’édit de Cyrus autorisant le retour d’exil est de 538.

L’histoire de la prise de Jérusalem, de l’asservissement des Juifs et de la déportation à Babylone est rapportée dans le IVe Livre des Rois, XXV. Voir aussi dans Jérémie, I, les prophéties contre Juda et Jérusalem.

Le récit de la conquête par le roi de Babylone est aussi conté par Flavius Josèphe, Histoire ancienne des Juifs, Livre X, ch.VIII-XII ; voir l’éd. Lidis-Brepols, 1981, p. 316-330.

Nicolas Fontaine a donné un résumé des événements dans son Histoire du Vieux et du Nouveau Testament (1669), Figure CXXXVIII.

« Ce fut la quatrième année de son règne que Nabuchodonosor vint assiéger Jérusalem. Il prit ce malheureux roi [Joakim] et le chargea de chaînes pour l’emmener à Babylone [En marge : L’an du monde 3398. Avant Jésus-Christ 606]. Et c’est de là que l’on doit commencer à compter les 70 années de la captivité. Néanmoins il le relâcha depuis, se contentant de lui imposer un grand tribut. Mais s’étant révolté au bout de trois ans, il fut enfin puni par les Chaldéens, qui le tuèrent et le jetèrent sans sépulture. Son fils Joachim, autrement appelé Jechonias, lui succéda, qui fut aussi méchant. Nabuchodonosor le vint encore prendre, et l’emmena en Babylone avec sa mère, ses femmes, ses enfants, les grands de sa cour, et dix mille hommes de Jérusalem. Ce fut alors qu’il prit tous les trésors du Temple ; et les vases sacrés que Salomon avait fait faire. Il établit roi au lieu de Joachim Sédécias son oncle. Sédécias sans respecter Jérémie, comme remarque l’Écriture, qui lui parlait de la part de Dieu, et qui ne se lassait point de lui donner des avis très utiles, continua toujours de vivre dans ses impiétés ordinaires. Son peuple suivit son exemple, et d’abandonnant à la licence, il commit toutes les abominations des païens, sans vouloir écouter les avertissements que Dieu leur disait donner tous les jours par ses serviteurs. Ils se raillaient, dit l’Écriture, de ceux qui leur parlaient de la part de Dieu ; ils méprisaient tout ce qu’ils disaient, et ils se jouaient insolemment des prophètes. Cette conduite alluma contre eux la colère du Seigneur, et il résolut de s’en venger sans faire aucune miséricorde.

Lors donc que Sédécias était sur la fin de la dixième années de son règne [L’an du monde 3416. Avant J.-C. 588], Dieu suscita contre lui Nabuchodonosor, qui ne pensant qu’à venger ses injures particulières, vengea en effet celles de Dieu. Le siège de Jérusalem, qu’il tint si longtemps environnée de toutes ses troupes, le réduisit à une famine effroyable, et après deux ans de siège, on donna à la ville un grand assaut, et on y fit une brèche. Ce fut alors que tous les Juifs parurent dans une grande consternation. Tout ce qu’il y avait de gens de cœur s’enfuirent pendant les ténèbres de la nuit ; et Sédécias lui-même se sauva par une porte secrète. Mais Nabuchodonosor l’ayant fait poursuivre, on l’attrapa près de Jéricho. On le mena devant le roi de Babylone, qui par un ordre bien cruel exécuta l’arrêt que Dieu avait invisiblement prononcé contre ce prince. Car il fit tuer en sa présence ses deux enfants, et après un spectacle si funeste, il lui fit crever les yeux à lui-même, et le chargea de chaînes, et le mena en cet état à Babylone. Nabuchodonosor envoya ensuite Nabuzardan à Jérusalem, pour achever d’en emmener tout le peuple, d’en piller toutes les richesses qui pouvaient y être restées, de brûler le Temple, le palais du roi, et toutes les maisons, et d’abattre toutes les murailles, ne laissant que très peu de gens pauvres dans la pays, pour avoir soin de cultiver les champs et de travailler aux vignes. Ce fut là l’état funeste où fut réduite Jérusalem pour les péchés de son prince. Le prophète Jérémie le décrit d’une manière si vive sans ses Lamentations qu’il faut être bien dur pour n’en être pas touché [...]. »

Figure CXXXIX. « Tout le royaume de Juda ayant été détruit par les Babyloniens, les Juifs demeurèrent dans cette dure captivité durant les soixante et dix ans qui avaient été prédits par les prophètes. Dieu, qui ne punit les hommes qu’à regret, avait longtemps auparavant menacé son peuple de cette dure servitude, afin qu’il évitât d’y tomber. Jérémie en avait souvent parlé, et avait mieux aimé s’exposer aux persécutions des grands, qui le regardaient comme leur ennemi, que de ne pas donner aux Juifs des avis qui leur pouvaient être si utiles. Il les avertit longtemps auparavant de prendre garde, lorsqu’ils seraient captifs en Babylone, de ne pas imiter les mœurs de ces peuples, mais de demeurer fermes dans le culte du vrai Dieu qu’ils avaient appris de leurs pères ; et il les consola dans cette affliction, en leur promettant très certainement que Dieu les en délivrerait au temps qu’il avait marqué. »

La dureté de la condition des Juifs en exil est annoncée par Jérémie, XXV, 8-14.

« 8. C’est pourquoi voici ce que dit le Seigneur des armées : Parce que vous n’avez point écouté mes paroles,

9. Je prendrai tous les peuples de l’Aquilon, dit le Seigneur, je les envoierai avec Nabuchodonosor roi de Babylone mon serviteur, et je les ferai venir contre cette terre, contre ses habitants, et contre toutes les nations qui l’environnent ; je les ferai passer au fil de l’épée, je les rendrai l’étonnement et la fable des hommes, et les réduirai à d’éternelles solitudes.

10. Je ferai cesser parmi eux les cris de joie, et les chants de réjouissance, les cantiques de l’époux, et les chants de l’épouse, le bruit de la meule, et la lumière de la lampe.

11. Et toute cette terre deviendra un désert affreux, qui épouvantera ceux qui le verront ; et toutes ces nations seront assujetties au roi de Babylone pendant soixante-dix années.

12. Et lorsque les soixante-dix ans seront finis, je visiterai dans ma colère le roi de Babylone et son peuple, dit le Seigneur. Je jugerai leur iniquité, et la terre des Chaldéens, et je la réduirai en une éternelle solitude.

13. Je vérifierai mes paroles, je ferai fondre sur cette terre tous les maux que j’ai prédits contre elle, tout ce qui est écrit dans ce livre, et tout ce que Jérémie a prophétisé contre toutes les nations,

14. Parce que quoique ce fussent de grands peuples et de grands rois, ils ont été assujettis aux Chaldéens : et je les traiterai selon leurs mérites, et selon les œuvres de leurs mains. »

Lods Adolphe, Les prophètes d’Israël, p. 179 sq. La condition du peuple en exil n’est ni celle d’esclave, ni celle de serf : p. 181 sq. Le but des Assyriens n’est pas d’asservir le peuple, mais de le priver de son élite et de briser sa résistance : p. 183-184.

Grotius Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVI, p. 82, présente l’exil en termes qui sont assez proches de ceux qu’emploie ici Pascal : « Cum olim populus gravissimis sceleribus se contaminasset..., passus est exsilium, sed non diutius annis septuaginta, atque interea non omisit Deus per Prophetas illos alloqui et solari spe reditus, indicato etiam ejus tempore. At nunc, ex quo semel ejecti patria sunt, manent extorres, contenti ; nullus ad eos venit Propheta ; nulla futuri reditus significatio ».

Noter que cet épisode de l’histoire des Juifs est précisément l’un de ces cas où les princes de ce monde réalisent sans s’en rendre compte les volontés de Dieu, comme le dit le fragment Preuves de Jésus-Christ 19 (Laf. 317, Sel. 348) : Qu’il est beau de voir par les yeux de la foi, Darius et Cyrus, Alexandre, les Romains, Pompée et Hérode, agir sans le savoir pour la gloire de l’Évangile.

 

et qu’ils seraient rétablis.

 

Preuves de Jésus-Christ 8 (Laf. 305, Sel. 336). Preuves de J.-C. Ce n’est pas avoir été captif que de l’avoir été avec assurance d’être délivré dans 70 ans, mais maintenant ils le sont sans aucun espoir.

La promesse du retour d’exil est contenue dans Jérémie, XXIX, 10-14.

« Car voici ce que dit le Seigneur : Lorsque soixante et dix ans se seront passés à Babylone, je vous visiterai, et je vérifierai les paroles favorables que je vous ai données, en vous faisant revenir en cette terre.

Car je sais les pensées que j’ai sur vous, dit le Seigneur, qui sont des pensées de paix, et non d’affliction, pour vous donner la patience dans vos maux, et pour les finir au temps que j’ai marqué.

Vous m’invoquerez, et vous retournerez ; vous me prierez, et je vous exaucerai. Vous me chercherez, et vous me trouverez lorsque vous me chercherez de tout votre cœur.

C’est alors que vous me trouverez, dit le Seigneur ; et je vous rassemblerai du milieu de tous les peuples et de tous les lieux où je vous avais chassés, dit le Seigneur, et je vous ferai revenir de ce même lieu où je vous avais fait transporter. »

L’exil de Babylone n’est pas la vraie captivité. Preuves de Jésus-Christ 8 indique que ce n’est pas être captif que de l’être avec la promesse d’en sortir au bout de 70 ans.

De veritate religionis christianae, V, XVI, p. 82. « Cum olim populus gravissimis sceleribus se contaminasset..., passus est exsilium, sed non diutius annis septuaginta, atque interea non omisit Deus per Prophetas illos alloqui et solari spe reditus, indicato etiam ejus tempore. At nunc, ex quo semel ejecti patria sunt, manent extorres, contenti ; nullus ad eos venit Propheta ; nulla futuri reditus significatio ». Références fournies par Grotius :

Jérémie, XXX-XXXIII.

Ezéchiel, XXXVI-XXXVII, pour le spe reditus.

Jérémie, XXV, 5 et XXIX, 10, pour indicato ejus tempore.

Bossuet, Discours sur l’histoire universelle, Pléiade, p. 812. Prédiction de Jérémie sur les 70 ans d’exil.

Lods Adolphe, Les prophètes d’Israël, p. 190 sq. Cyrus autorise le retour en Palestine : application de ses principes politiques généraux. Déroulement du retour : p. 194.

 

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Ils furent toujours consolés par les prophètes ;

 

Les prophètes en question sont Jérémie dans Jérusalem et Ézéchiel dans Babylone, « au milieu des captifs qu’on y avait transférés, comme l’indique la Préface de la traduction des livres de ces deux prophètes dans la Bible de Port-Royal ; voir Chédozeau Bernard, L’univers biblique catholique au siècle de Louis XIV. La Bible de Port-Royal, II, Les Préfaces de l’Ancien Testament (1672-1693), p. 617 : « Jérémie demeura toujours par l’ordre de Dieu dans Jérusalem pendant qu’elle fut assiégée par Nabuchodonosor sous le règne de Sédécias ; et depuis la destruction de cette ville il resta encore parmi ceux d’entre les Juifs qui ne furent point menés en captivité à Babylone, afin que ces peuples toujours rebelles aux volontés du Seigneur eussent sans cesse devant leurs yeux un témoin fidèle de la vérité, qui leur reprochât l’impiété de leur conduite et qui leur représentât l’équité des jugements de celui dont leurs crimes avaient attiré sur eux leurs vengeances. Ézéchiel au contraire fut encore choisi par Dieu pour accompagner les captifs à Babylone, pour les soutenir par ses divines instructions dans l’extrémité où ils se trouvaient réduits, et pour consoler leur foi par la vue des maux sans comparaison plus grands que l’obéissance qu’ils avaient rendue à Dieu leur avait fait éviter et que sa justice réservait aux autres Juifs demeurées en Judée. » Les deux prophètes sont d’accord dans leurs oracles.

Prophéties 21 (Laf. 342, Sel. 374). Prophéties. Le sceptre ne fut point interrompu par la captivité de Babylone à cause que leur retour était prompt et prédit.

Grotius Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVI. « Cum olim populus gravissimis sceleribus se contaminasset..., passus est exsilium, sed non diutius annis septuaginta, atque interea non omisit Deus per Prophetas illos alloqui et solari spe reditus, indicato etiam ejus tempore. At nunc, ex quo semel ejecti patria sunt, manent extorres, contenti ; nullus ad eos venit Propheta ; nulla futuri reditus significatio ».

 

leurs rois continuèrent.

 

Ernst Pol, Approches pascaliennes, p. 463. Réponse à l’objection : ne peut-on dire que le sceptre était déjà sorti de Juda, lors de la captivité à Babylone ? Réponses données dans Prophéties 21 (Laf. 342, Sel. 374) : l’exil des Juifs à Babylone n’était pas une véritable captivité : Prophéties. Le sceptre ne fut point interrompu par la captivité de Babylone à cause que leur retour était prompt et prédit. Le problème de savoir si la dynastie a été interrompue durant l’exil à Babylone est donc résolu par Pascal par la négative.

On trouve l’objection à laquelle répond Pascal dans Adereth, Perouchey Agadoth, p. 97 sq. Cinq cents ans avant la destruction du second Temple, Israël avait été exilé en Babylonie. La tribu de Juda était chassée de Terre sainte. Donc à cette époque le sceptre avait été ôté de Juda, et le Messie ne s’est pas manifesté à cette date. R. Martin nie que, pendant l’exil, les exilarques appartenaient à la tribu de Juda. Adereth répond que ce n’est pas à ce moment que les exilarques ont commandé le peuple. Voir p. 98 : peut-être un chef issu de Juda demeurait-il en Terre sainte ? Adereth prétend que ce n’est pas le cas : on n’avait permis qu’aux classes les plus pauvres de demeurer sur place.

 

Mais la seconde destruction est sans promesse de rétablissement, sans prophètes, sans roi, sans consolation, sans espérance parce que le sceptre est ôté pour jamais.

 

La différence entre le premier et le second exil est que la déportation à Babylone a été limitée à 70 années, alors que la diaspora dure depuis que les Romains ont détruit le Temple, sans qu’aucune perspective de retour ne se dessine.

Goyet Thérèse, L’humanisme de Bossuet, II, p. 305. Référence au Discours sur l’histoire universelle, II, XXI, 337, Pléiade, p. 870 sq. L’exil de Babylone n’était que l’ombre du châtiment dont Titus a été le ministre. Les Chaldéens n’ont jamais infligé aux Juifs des peines aussi dures que les Romains. Sous les Chaldéens, l’exil n’a duré que 70 ans ; mais il y a 1 600 ans que dure le nouvel esclavage des Juifs. Voir Discours sur l’histoire universelle, II, XII, Pléiade, p. 882 sq. Sur la critique de la manière dont les Juifs expliquent les prophéties.

Sur la seconde destruction du temple de Jérusalem par les armées de Titus en 70, voir Poznanski Lucien, La chute du temple de Jérusalem, Paris, Complexe, 1991.

Pascal paraît suivre ici, quasi littéralement pour la dernière phrase, Grotius Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVI. « Cum olim populus gravissimis sceleribus se contaminasset..., passus est exsilium, sed non diutius annis septuaginta, atque interea non omisit Deus per Prophetas illos alloqui et solari spe reditus, indicato etiam ejus tempore. At nunc, ex quo semel ejecti patria sunt, manent extorres, contenti ; nullus ad eos venit Propheta ; nulla futuri reditus significatio ».

Le dernier paragraphe du fragment Preuves de Jésus-Christ 16 fait allusion à la prophétie d’Osée, III, 4-5, qui annonce que les Juifs n’auront plus de prophètes, ni de roi : « C’est l’état où les enfants d’Israël seront pendant un long temps, sans roi, sans prince, sans sacrifice, sans autel, sans éphod, et sans théraphins ; 5. Et après cela les enfants d’Israël reviendront, et ils chercheront le Seigneur leur Dieu, et David, leur roi ; et dans les derniers jours ils recevront avec une frayeur respectueuse le Seigneur, et les grâces qu’il doit leur faire. » (tr. Sacy). Commentaire : « Les nouveaux interprètes croient que le mot de théraphins signifie des idoles en cet endroit aussi bien que dans tous les autres. Et ce sens semble avoir plus de rapport avec ce qui précède, où le prophète dit à la femme que Dieu lui avait ordonné d’épouser pour être la figure de la Synagogue, qu’il ne vivrait point avec elle pendant un longtemps, et qu’elle aussi ne s’abandonnerait point à un autre. Car c’est l’état où sont aujourd’hui les Juifs, et où ils demeureront jusques à la fin du monde, étant en effet sans autel et sans sacrifice, depuis la destruction de Jérusalem, qui est le seul lieu où ils pourraient sacrifier selon la loi, et en même temps sans théraphins, c’est-à-dire sans idoles, puisqu’ils ne conservent toujours une grande aversion de l’idolâtrie ».

Cette prophétie est accomplie à présent. Voir Preuves de Jésus-Christ 8 (Laf. 305, Sel. 336). Preuves de J.-C.

Ce n’est pas avoir été captif que de l’avoir été avec assurance d’être délivré, dans 70 ans, mais maintenant ils le sont sans aucun espoir.

Dieu leur a promis qu’encore qu’il les dispersât aux bouts du monde, néanmoins s’ils étaient fidèles à sa loi il les rassemblerait. Ils y sont très fidèles et demeurent opprimés.

Loi figurative 14 (Laf. 258, Sel. 289). Osée a prédit qu’il serait sans roi, sans prince, sans sacrifice etc., sans idoles, ce qui est accompli aujourd’hui, ne pouvant faire sacrifice légitime hors de Jérusalem.

Loi figurative 21 (Laf. 266, Sel. 297). On pourrait peut-être penser que quand les prophètes ont prédit que le sceptre ne sortirait point de Juda jusqu’au roi éternel ils auraient parlé pour flatter le peuple et que leur prophétie se serait trouvée fausse à Hérode. Mais pour montrer que ce n’est pas leur sens, et qu’ils savaient bien au contraire que ce royaume temporel devait cesser, ils disent qu’ils seront sans roi et sans prince. Et longtemps durant. Osée.

Prophéties VI (Laf. 489, Sel. 735). Captivité des juifs sans retour.

Jer. 11. 11. Je ferai venir sur Juda des maux desquels ils ne pourront être délivrés.

Figures.

Le Seigneur a eu une vigne dont il a attendu des raisins et elle n’a produit que du verjus. Je la dissiperai donc et je la détruirai. La terre n’en produira que des épines et je défendrai au ciel d’y...

Is 5. 8. La vigne du Seigneur est la maison d’Israël. Et les hommes de Juda en sont le germe délectable. J’ai attendu qu’ils fissent des actions de justice, et ils ne produisent qu’iniquité.

Dieu a promis aux Juifs qu’encore qu’il les dispersât aux bouts du monde, néanmoins s’ils étaient fidèles à sa loi il les rassemblerait. Les Juifs pourtant ne désespèrent pas. Quoique pour les rabbins, l’ère de la prophétie soit révolue, ils conservent leur foi en la rédemption d’Israël, mais personne ne pouvait savoir quand cette rédemption se produirait.

Sur l’idée de l’exil chez les Juifs, voir Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, art. Galout, p. 425-428. La notion d’exil désigne l’état du peuple vivant en dehors de son pays. L’Égypte a été pour eux une première « maison d’esclavage ». La servitude en Égypte est devenue sans la pensée rabbinique le modèle même de l’exil. Mais l’exil n’est pas une réalité irréversible, puisque Deutéronome XXX, 3-5 promet au peuple le retour dans son pays.

Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, article Galout, p. 425 sq. Le mot galout désigne en hébreu de la Bible l’exil, la captivité ; un synonyme est golah. Dans la Bible le mot galout n’est jamais un terme abstrait se référant à l’errance ou à l’esclavage, l’association avec ces concepts ne s’est faite qu’après la destruction du second temple, à l’époque talmudique. Avec le temps, le mot est devenu synonyme de diaspora (dispersion) : il désignait tout pays, hors d’Érets Israël, où vivaient des Juifs, sans tenir compte de la manière dot ils y étaient parvenus. La notion d’exil se trouve tôt dans le Bible : le séjour des Israéliens en Égypte représente le paradigme de la notion de galout ; ce sera toujours le cas dans la littérature rabbinique. Dans la littérature prophétique, l’exil est la punition qui sanctionne Israël pécheur ; mais il ne signifie pas que l’alliance entre Dieu et son peuple est révoquée. L’exil de Babylone : p. 426 sq. Dans la terminologie rabbinique, galout finit par désigner le tragique état d’exil et d’aliénation dans lequel se trouvent les Juifs après 70 après J.-C. L’exil est perçu comme le juste châtiment infligé par la providence divine à Israël : privation de foyer, sujétion à l’hostilité et à la discrimination. Lors de la destruction du premier temple, les prophètes avaient assuré au peuple que l’exil ne serait pas définitif ; la durée de 400 ans de servitude était fixée (Genèse, XV, 13) : p. 427. Mais pour les rabbins, l’ère de la prophétie était révolue : ils conservent leur foi en la rédemption d’Israël, mais personne ne peut savoir quand cette rédemption se produirait.