Fragment Preuves de Jésus-Christ n° 8 / 24  – Papier original : RO 59-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Preuves de J.-C. n° 338 p. 157 v° / C2 : p. 188

Éditions de Port-Royal : Chap. XVI - Diverses preuves de Jésus-Christ : 1669 et janvier 1670 p. 131  / 1678 n° 6 et 7 p. 130-131

Éditions savantes : Faugère II, 320, XVII / Havet XIX.4 ter / Brunschvicg 638 / Tourneur p. 277-3 / Le Guern 287 / Lafuma 305 / Sellier 336

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Bibliographie

 

 

COHN Lionel (Yehuda Arye), Une polémique judéo-chrétienne au Moyen Âge et ses rapports avec l’analyse pascalienne de la religion juive, Reprint of Bar Ilan, volume in Humanities and social sciences, Jérusalem, 1969.

Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, art. Galout, Paris, Cerf, 1993, p. 425-428.

ERNST Pol, Approches pascaliennes, Gembloux, Duculot, 1970, p. 438 sq.

GROTIUS, De veritate religionis christianae, V, XVI (XVII).

LODS Adolphe, Les prophètes d’Israël, p. 179 sq.

MAIRE Catherine, “La date du « retour » d’Israël : un enjeu polémique pour les figuristes au XVIIIe siècle”, Port-Royal et le peuple d’Israël, Chroniques de Port-Royal, n° 53, p. 215-238.

POZNANSKI Lucien, La chute du temple de Jérusalem, Paris, Complexe, 1991.

SELLIER Philippe, Pascal et saint Augustin, Paris, Colin, 1970.

SELLIER Philippe, “La rencontre de ce peuple m’étonne”, Port-Royal et le peuple d’Israël, Chroniques de Port-Royal, n° 53, p. 13-28.

 

 

Éclaircissements

 

Preuves de Jésus-Christ.

 

En quoi ce fragment contient-il une preuve de Jésus-Christ ?

La prophétie de l’exil est exprimée en termes très forts dans le Deutéronome, XXVIII : « 64. Le Seigneur vous dispersera parmi tous les peuples, depuis une extrémité de la terre jusqu’à l’autre ; et vous adorerez là des dieux étrangers que vous ignoriez, vous et vos pères, des dieux de bois et de pierre.

65. Et même parmi ces peuples, vous n’aurez aucun repos ; vous ne trouverez pas seulement où poser en paix votre pied ; car le Seigneur vous donnera un cœur toujours agité de crainte, des yeux languissants, et une âme tout abîmée dans la douleur ;

66. Votre vie sera comme en suspens devant vous. Vous tremblerez nuit et jour, et vous ne croirez pas à votre vie.

67. Vous direz le matin : Qui me donnera de voir le soir ? Et le soir : Qui me donnera de voir le matin ? Tant votre cœur sera saisi d’épouvante, et tant la vue des choses qui se passeront devant vos yeux vous effrayera.

68. Le Seigneur vous fera ramener par mer en Égypte, dont il vous avait dit que vous ne deviez jamais reprendre le chemin ; vous serez vendus là à vos ennemis, vous, pour être leurs esclaves, et vos femmes, pour être leurs servantes ; et il ne se trouvera pas même de gens pour vous acheter. »

Toutefois la prophétie de Jacob contient une promesse sur la pérennité de la royauté de Juda, jusqu’à l’avènement du Messie.

Genèse, XLIX, 10. « Le sceptre ne sera point ôté de Juda, ni le prince de sa postérité, jusqu’à ce que celui qui doit être envoyé soit venu ; et c’est lui qui sera l’attente des nations ».

La lignée de Juda ne devait donc être interrompue qu’à l’arrivée du Messie.

Mais on pouvait objecter que cet événement était déjà arrivé dans le passé bien avant Jésus-Christ, puisque les Juifs avaient subi l’exil lors de l’exil imposé par les Perses à Babylone, époque où le peuple a perdu sa liberté et ses rois leur souveraineté.

La thèse de Pascal est que cet exil n’a constitué qu’une apparence de rupture, et que ce n’est pas la loi de Moïse qui était en cause : voir la note de Havet, éd. Pensées, II, p. 40.

 

Ce n’est pas avoir été captif que de l’avoir été avec assurance d’être délivré, dans 70 ans,

 

Ernst Pol, Approches pascaliennes, p. 463. Pascal doit donc répondre à l’objection : ne peut-on dire que le sceptre était déjà sorti de Juda, lors de la captivité à Babylone ?

Cette objection est classique : elle se trouve dans Adereth Salomon ben, Perouchey Agadoth, p. 97 sq. Rabbi Salomon ben Adereth (Rabbi Chlomo ben Adereth, dit Rachba), né entre 1235 et 1240 à Barcelone, mort vers 1310, tente de prouver que la religion juive gardera toujours sa valeur, donc que la religion chrétienne ne peut se présenter comme une prolongation du judaïsme.

Voir Cohn Lionel (Yehuda Arye), Une polémique judéo-chrétienne au Moyen Age et ses rapports avec l’analyse pascalienne de la religion juive, Reprint of Bar Ilan, volume in Humanities and social sciences, Jérusalem, 1969. L’intérêt de l’ouvrage de Ben Adereth (Perouchey Agadoth) est qu’il propose, dans plusieurs cas, la réfutation d’arguments que, quatre siècles plus tard, Pascal devait employer. Cinq cents ans avant la destruction du second Temple, Israël avait été exilé en Babylonie. La tribu de Juda était chassée de Terre sainte. Donc à cette époque le sceptre avait été ôté de Juda, et le Messie ne s’est pas manifesté à cette date.

Lods Adolphe, Les prophètes d’Israël, p. 179 sq., souligne que la condition du peuple juif en exil, où ils n’étaient ni esclaves, ni serfs, répondait à la volonté des Assyriens de le priver de son élite et briser sa résistance : p. 183-184.

Cependant, la thèse de Pascal, c’est que la royauté dans le peuple juif n’a pas été vraiment interrompue par l’exil à Babylone, qui n’a pas été un véritable exil.

En premier lieu, cet exil à Babylone a été relativement bref, 70 ans seulement.

D’autre part, cette durée est censée avoir été prédite par les prophètes. Comme l’écrit Grotius Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVII, p. 82 : « Cum olim populus gravissimis sceleribus se contaminasset..., passus est exsilium, sed non diutius annis septuaginta, atque interea non omisit Deus per Prophetas illos alloqui et solari spe reditus, indicato etiam ejus tempore ».

L’exil des Juifs à Babylone n’était pas une véritable captivité : voir Prophéties 21 (Laf. 342, Sel. 374). Prophéties. Le sceptre ne fut point interrompu par la captivité de Babylone à cause que leur retour était prompt et prédit. Ce n’est pas être vraiment captif que l’être avec la promesse de sortir de captivité au bout de 70 ans, car cette promesse laisse subsister la perspective d’une libération, et évite la tentation du désespoir.

L’expression de Grotius indicato ejus tempore, qui signifie que le temps de l’exil à Babylone avait été annoncé par les prophètes, renvoie à Jérémie, XXIX, 10-14. « Car voici ce que dit le Seigneur des armées : Lorsque soixante et dix ans se seront passés à Babylone, je vous visiterai, et je vérifierai les paroles favorables que je vous ai données, en vous faisant revenir en cette terre.

Car je sais les pensées que j’ai sur vous, dit le Seigneur, qui sont des pensées de paix, et non d’affliction, pour vous donner la patience dans vos maux, et pour les finir au temps que j’ai marqué.

Vous m’invoquerez, et vous retournerez ; vous me prierez, et je vous exaucerai.

Vous me chercherez, et vous me trouverez lorsque vous me chercherez de tout votre cœur.

C’est alors que vous me trouverez, dit le Seigneur ; et je vous ramènerai vos captifs ; et je vous rassemblerai du milieu de tous les peuples et de tous les lieux où je vous avais chassés, dit le Seigneur, et je vous ferai revenir de ce même lieu où je vous avais fait transporter. »

Voir aussi Jérémie, XXV, 8-13, qui indique le temps de cet exil à Babylone : « 8. Voici ce que dit le Seigneur des armées : Parce que vous n’avez point écouté mes paroles,

9. Je prendrai tous les peuples de l’aquilon, dit le Seigneur, je les envoierai [sic] avec Nabuchodonosor roi de Babylone, mon serviteur, et je les ferai venir contre cette terre, contre ses habitants et contre toutes les nations qui l’environnent ; je les ferai passer au fil de l’épée, je les rendrai l’étonnement et la fable des hommes, et les réduirai à d’éternelles solitudes.

10. Je ferai cesser parmi eux les cris de joie et les chants de réjouissance, les cantiques de l’époux, et les chants de l’épouse, le bruit de la meule et la lumière de la lampe.

11. Et toute cette terre deviendra un désert affreux, qui épouvantera ceux qui le verront ; et toutes ces nations seront assujetties au roi de Babylone pendant soixante-dix années.

12. Et lorsque les soixante-dix ans seront finis, je visiterai dans ma colère le roi de Babylone et son peuple, dit le Seigneur, je jugerai leur iniquité et la terre des Chaldéens, et je la réduirai en une éternelle solitude.

13. Je vérifierai mes paroles ; je ferai fondre sur cette terre tous les maux que j’ai prédits contre elle, tout ce qui est écrit dans ce livre, et tout ce que Jérémie a prophétisé contre toutes les nations. »

Commentaire de la Bible de Port-Royal sur ce passage : « Dieu pour rendre la captivité de Babylone utile à son peuple, et de guérir de cette impatience, qui le portait à croire plutôt les vaines promesses des faux prophètes, que la vérité de sa parole, lui fait déclarer par Jérémie, que son dessein n’était pas de les affliger, mais de leur donner enfin la paix au bout de ce temps qu’il leur marquait en faisant finir alors tous leurs maux, et leur donnant cependant la patience qui leur était nécessaire pour les soutenir. Lorsqu’il leur déclare, dit saint Jérôme, qu’il sait les pensées qu’il a sur eux, il les avertit d s’y soumettre humblement sans prétendre approfondir ses conseils, dont la connaissance lui appartient comme à leur Dieu. Et quoi qu’il pût accomplir ce qu’il avait promis, sans qu’ils l’en priassent, il les exhorte à l’invoquer et à le prier, afin de se rendre dignes de recevoir l’effet salutaire de ses promesses. »

Pour le spe reditus, c’est-à-dire l’espoir du retour en terre palestinienne entretenu par les prophètes, il faut renvoyer à Ezéchiel, XXXVI-XXXVII. Durant l’exil à Babylone même, Ézéchiel était présent pour apporter du réconfort au peuple juif captif, pour lui annoncer que Dieu ne l’abandonnait pas. Les prophètes, après la destruction du premier temple, avaient eux-mêmes assuré aux exilés que leur situation ne se pérenniserait pas.

Pascal reprend ces mêmes idées dans le fragment Prophéties 21.

Il est imité par Bossuet dans le Discours sur l’histoire universelle, éd. Velat et Champailler, Pléiade, Pléiade, p. 812. Voir Goyet Thérèse, L’humanisme de Bossuet, II, p. 305. Référence au Discours, II, XXI, 337, Pléiade, p. 870 sq. Les Chaldéens n’ont jamais infligé aux Juifs des peines aussi dures que les Romains. Sous les Chaldéens, l’exil n’a duré que 70 ans. Mais l’exil de Babylone n’était que l’ombre du châtiment dont Titus a été le ministre ; mais il y a 1 600 ans que dure le nouvel esclavage des Juifs.

 

mais maintenant ils le sont sans aucun espoir.

 

La prophétie à laquelle Pascal pense est celle d’Osée, III, 4 : « C’est l’état où les enfants d’Israël seront pendant un long temps, sans roi, sans prince, sans sacrifice, sans autel, sans éphod, et sans théraphins ; 5. Et après cela les enfants d’Israël reviendront, et ils chercheront le Seigneur leur Dieu, et David, leur roi ; et dans les derniers jours ils recevront avec une frayeur respectueuse le Seigneur, et les grâces qu’il doit leur faire. » (tr. Sacy). Commentaire : « Les nouveaux interprètes croient que le mot de théraphins signifie des idoles en cet endroit aussi bien que dans tous les autres. Et ce sens semble avoir plus de rapport avec ce qui précède, où le prophète dit à la femme que Dieu lui avait ordonné d’épouser pour être la figure de la Synagogue, qu’il ne vivrait point avec elle pendant un longtemps, et qu’elle aussi ne s’abandonnerait point à un autre. Car c’est l’état où sont aujourd’hui les Juifs, et où ils demeureront jusques à la fin du monde, étant en effet sans autel et sans sacrifice, depuis la destruction de Jérusalem, qui est le seul lieu où ils pourraient sacrifier selon la loi, et en même temps sans théraphins, c’est-à-dire sans idoles, puisqu’ils ne conservent toujours une grande aversion de l’idolâtrie ».

La différence entre l’exil du peuple juif à Babylone et la diaspora est que ce second exil, qui a suivi la destruction du temple de Jérusalem par Titus, diffère du premier en ce qu’il est définitif, et ne laisse place à aucun espoir.

Preuves de Jésus-Christ 16 (Laf. 314, Sel. 345). Mais la seconde destruction est sans promesse de rétablissement, sans prophètes, sans roi, sans consolation, sans espérance parce que le sceptre est ôté pour jamais.

La différence entre le premier et le second exil, c’est que la diaspora qui a suivi la destruction du Temple par Titus en 70 ne laisse aux Juifs aucun espoir de retour. Les Juifs pourtant ne désespèrent pas. Quoique pour les rabbins, l’ère de la prophétie soit révolue, ils conservent leur foi en la rédemption d’Israël, mais personne ne pouvait savoir quand cette rédemption se produirait.

 

L’exil

 

Sur l’idée de l’exil chez les Juifs, voir Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, art. Galout, p. 425-428. Le mot galout désigne en hébreu de la Bible l’exil, la captivité. Dans la Bible ce mot n’est jamais un terme abstrait se référant à l’errance ou à l’esclavage, l’association avec ces concepts ne s’est faite qu’après la destruction du second temple, à l’époque talmudique. Mais la notion d’exil se trouve tôt dans le Bible : le séjour des Israéliens en Égypte représente le paradigme de la notion de galout ; ce sera toujours le cas dans la littérature rabbinique. Dans la littérature prophétique, l’exil est la punition qui sanctionne Israël pécheur ; mais il ne signifie pas que l’alliance entre Dieu et son peuple est révoquée. L’exil est perçu comme le juste châtiment infligé par la providence divine à Israël : privation de foyer, sujétion à l’hostilité et à la discrimination. Avec le temps, le mot finit par désigner l’état d’exil dans lequel les Juifs se sont trouvés après 70 après Jésus-Christ, synonyme de diaspora (dispersion) : il désignait tout pays, hors d’Erets Israël, où vivaient des Juifs, sans tenir compte de la manière dont ils y étaient parvenus.

 

Dieu leur a promis qu’encore qu’il les dispersât aux bouts du monde, néanmoins s’ils étaient fidèles à sa loi il les rassemblerait. Ils y sont très fidèles et demeurent opprimés.

 

Les Juifs conservent malgré tout l’espoir du retour,

Comme on l’a vu plus haut, la prophétie d’Osée, III, 4, déclare que « C’est l’état où les enfants d’Israël seront pendant un long temps, sans roi, sans prince, sans sacrifice, sans autel, sans éphod, et sans théraphins »  (tr. Sacy). Commentaire : « Les nouveaux interprètes croient que le mot de théraphins signifie des idoles en cet endroit aussi bien que dans tous les autres. Et ce sens semble avoir plus de rapport avec ce qui précède, où le prophète dit à la femme que Dieu lui avait ordonné d’épouser pour être la figure de la Synagogue, qu’il ne vivrait point avec elle pendant un longtemps, et qu’elle aussi ne s’abandonnerait point à un autre. Car c’est l’état où sont aujourd’hui les Juifs, et où ils demeureront jusques à la fin du monde, étant en effet sans autel et sans sacrifice, depuis la destruction de Jérusalem, qui est le seul lieu où ils pourraient sacrifier selon la loi, et en même temps sans théraphins, c’est-à-dire sans idoles, puisqu’ils ne conservent toujours une grande aversion de l’idolâtrie ».

Les Juifs se trompent en imaginant le second exil sur le modèle du premier : pour Pascal, il y a là une erreur tragique : contrairement au premier exil, le second est véritable et définitif. Voir Grotius Hugo, De veritate religionis christianae, V, XVI (XVII) : « Nunc, ex quo semel ejecti patria sunt, manent extorres, contenti ; nullus ad eos venit Propheta ; nulla futuri reditus significatio » ; « Ils ne sont pas seulement privés de leur patrie, ils sont l’objet du mépris de tout le monde. Aucun prophète ne s’élève parmi eux. De quelque côté qu’ils se tournent, ils n’aperçoivent aucune marque qui leur fasse espérer d’être rétablis dans leur pays. »

Toutefois, la même prophétie d’Osée ajoute que, « après cela les enfants d’Israël reviendront, et ils chercheront le Seigneur leur Dieu, et David, leur roi ; et dans les derniers jours ils recevront avec une frayeur respectueuse le Seigneur, et les grâces qu’il doit leur faire. »

Dieu a bien promis que les Juifs seraient réunis lorsqu’ils se seront soumis à sa loi. Mais le fait qu’ils demeurent opprimés malgré leur fidélité à la loi de Moïse prouve que ce n’est pas cette loi qui était en cause, et que les Juifs se trompent de loi : voir la note de Havet, éd. Pensées, II, Delagrave, 1866, p. 40, le raisonnement est inachevé : Pascal veut dire que lorsque Dieu promet que les Juifs seront réunis s’ils obéissent à sa loi, il veut parler d’une autre loi que celle de Moïse, c’est-à-dire de la loi du Christ.

Voir également Ernst Pol, Approches pascaliennes, p. 438-439, sur l’équivoque de s’ils étaient fidèles à sa loi, il les rassemblerait ; il faut entendre que la fidélité des Juifs, qui n’est pas récompensée, prouve que c’est de la Loi nouvelle, et non de l’ancienne, que Dieu parle.

Les Juifs n’ont donc pas entièrement tort d’attendre le salut. Mais pour Port-Royal, celui-ci n’aura pas lieu dans le temps historique. Voir le commentaire de la Bible de Port-Royal sur Osée, III, 4 : lorsque le prophète « dit qu’après cela les enfants d’Israël reviendront à Dieu de tout leur cœur, et le rechercheront, selon quelques-uns, sous la conduite de Zorobabel appelé David, parce qu’il était de sa race », il ne faut pas croire que cela se réfère à la fin de l’exil à Babylone : « ces paroles s’entendent visiblement de la conversion des Juifs » dans les derniers temps. Le commentaire de la note sur le sens spirituel de ce passage insiste sur le fait que la prophétie d’Osée, selon saint Augustin, « marque expressément la conversion des Juifs, qui doit arriver à la fin du monde ». Cette thèse fera l’objet de grandes controverses dans le milieu janséniste au XVIIIe siècle. Sur l’annonce d’une conversion en bloc des Juifs, qui a obsédé le jansénisme du siècle des Lumières, voir Sellier Philippe, “La rencontre de ce peuple m’étonne”, Port-Royal et le peuple d’Israël, Chroniques de Port-Royal, n° 53, p. 21.

Maire Catherine, “La date du « retour » d’Israël : un enjeu polémique pour les figuristes au XVIIIe siècle”, Port-Royal et le peuple d’Israël, Chroniques de Port-Royal, n° 53, p. 215-238.

Le sens de ce tragique second exil, c’est que la diaspora était nécessaire pour répandre la connaissance du Christ.

Saint Augustin, Cité de Dieu, XVIII, p. 651 sq. et surtout p. 653. Si les Juifs étaient restés avec ce témoignage des Écritures confinés dans leur propre pays, au lieu d’être partout, l’Église, qui, elle, est partout, ne pourrait assurément les avoir dans toutes les nations comme témoins des prophéties qui furent émises sur le Christ.

La Genèse, tr. Sacy, Préface, § V. Le peuple juif est devenu comme un grand prophète présent en tout temps et en tous lieux..

Sellier Philippe, Pascal et saint Augustin, p. 492. Sur les psaumes chantés par toute la terre (Ordre 1 - Laf. 1, Sel. 37). Les Psaumes sont le livre prophétique par excellence. Voir La Cité de Dieu, XVCIII, 49 ; In Joh. tr. 45, n. 9, etc. Voir les Confessions, IX, IV, 8 : « a toto orbe terrarum cantantur ». La formule signifie que la terre entière entend les prophéties messianiques et se trouve ainsi préparée à entendre la vérité de la prédication catholique.

Pascal insiste aussi sur la nécessité du destin du peuple Juif « pour la preuve de Jésus-Christ ».

Preuves de Jésus-Christ 14 (Laf. 311, Sel. 342). C’est une chose étonnante et digne d’une étrange attention de voir ce peuple juif subsister depuis tant d’années et de le voir toujours misérable, étant nécessaire pour la preuve de J. C. et qu’il subsiste pour le prouver et qu’il soit misérable, puisqu’ils l’ont crucifié. Et quoiqu’il soit contraire d’être misérable et de subsister, il subsiste néanmoins toujours malgré sa misère.

Dossier de travail (Laf. 385, Sel. 4). Mais ce n’était pas assez que les prophéties fussent, il fallait qu’elles fussent distribuées par tous les lieux et conservées dans tous les temps. Et afin qu’on ne prenne point l’avènement pour un effet du hasard il fallait que cela fût prédit. Il est bien plus glorieux au Messie qu’ils soient les spectateurs et même les instruments de sa gloire, outre que Dieu les ait réservés.