Fragment Misère n° 5 / 24 – Papier original :  RO 67-1

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Misère n° 78 p. 15 / C2 : p. 33

Éditions savantes : Faugère I, 223, CXLV / Havet XXV.72 / Michaut 186 / Brunschvicg 379 / Tourneur p. 181-1 / Le Guern 53 / Maeda II p.235 / Lafuma 57 / Sellier 90

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Bibliographie

 

ERNST Pol, Approches pascaliennes, p. 92.

 

Éclaircissements 

 

Il n’est pas bon d’être trop libre.

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Il n’est pas bon d’avoir toutes les nécessités.

 

Nécessités, surtout au pluriel, n’est pas clair.

Le sens du texte change selon qu’on voit entre liberté et nécessité un rapport de complémentarité ou d’opposition.

Faut-il comprendre avoir toutes les nécessités, au sens de omnia necessaria, toutes les choses qui sont nécessaires ? C’est le sens qui paraît le plus convaincant à Y. Maeda. Le deuxième énoncé serait alors complémentaire du premier : s’il n’est pas bon d’avoir trop de liberté, il n’est pas bon non plus de posséder tout ce dont on a besoin. Brunschvicg garde le sens de nécessités necessaria, en se référant à Bossuet.

Une autre interprétation mettrait au contraire les deux phrases en opposition, la nécessité s’entendant comme le contraire de la liberté : avoir toutes les nécessités signifierait dans ce cas avoir tous les manques, avoir toutes les contraintes. Tourneur, Pensées, 2 vol., interprète tous les embarras. Le fragment signifierait donc : il n’est bon ni de disposer de trop de liberté, ni de subir trop de contrainte. Le sens de nécessités, necessitates, au sens d’obligations impérieuses, se trouve dans l’oraison funèbre d’Anne de Gonzague.

Pourquoi ce fragment a-t-il été classé dans la liasse Misère ? Voir Ernst Pol, Approches pascaliennes, p. 92.

Il entre dans le cadre de l’argument de l’impuissance qui est celle de l’homme de fixer le juste point qui permet de demeurer également éloigné des extrêmes. Il est toujours difficile, voire impossible, de fixer le juste milieu entre des caractères différents ou opposés : les excès sont mauvais, mais on ne sait pas comment assigner le juste milieu. On veut trouver un équilibre, mais on ne peut y parvenir : vouloir sans pouvoir, cela définit la misère chez Pascal.