Fragment Vanité n° 31 / 38 – Papiers originaux : RO 361-361 v° et 369-369 v°
Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Vanité n° 51 à 65 p. 82 à 13 / C2 : p. 24 à 30
Éditions de Port-Royal : Chap. XXV - Faiblesse de l’homme : 1669 et janv. 1670 p. 190 à 198 /
1678 n° 4, 7, 8, 11, 13, 14 et 16 p. 186 à 194
Éditions savantes : Faugère II, 47 à 53, I-I à V / Havet III.3 et III.19 / Michaut 601 / Brunschvicg 82 et 83 / Tourneur p. 173-6 / Le Guern 41 / Maeda II p. 13 / Lafuma 44 et 45 / Sellier 78
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Transcription diplomatique (les additions sont signalées en couleur orange)
La méthode d’écriture utilisée par Pascal dans ce document est caractéristique : Pascal se réserve de grandes marges aussi bien à gauche qu’à droite puis il les utilise pour compléter le texte ou ajouter une note parfois reliée au corps du texte au moyen d’un renvoi (+) ou mise dans un cartouche. Contrairement à son habitude Pascal n’a pas signé les feuillets (une façon de consacrer son texte à Dieu).
Les variations de la couleur de l’encre sont très nettes sur le manuscrit et permettent de distinguer certaines corrections. En particulier le titre et la cote A ont été ajoutés dans une encre violet foncé différente de celle qui a été utilisée au début du texte mais commune à plusieurs ajouts et corrections.
RO p. 361
Jmag ination a
1 Cest cette partie dominante dans Lhome Et defausseté , Jnfaillible Jnfailli~ seroit regle deVerité Si ell l estoit dumensonge Mais estant leplus Souuentfausse elle marquant du mesme caractere leVray Elfaux 3 nedonne aucune Marque de Sa qualité Jeneparle pas des fous Je parle qulJmagination 5 6 nepeut mettre 7 Laraison a beau crier , elle Cette Superbe puissance ennemie delaraison , qui Seplaist ala controller Etala domi ner , pour monstrer Combien elle peut en toutes choses , a estably danslhomme VneSeconde nature . Elle a Ses heureux Ses malheureux ,Ses hostes . douter nyer laraison que dVoir dVne laraison , Les habiles par Jmagination , Se plaisent tout autremt plaire fo us Et Ses raisonnablemt, Jls regardent les gens auec Jls disputent Et cette gayeté devisage leur donne Souuent lauantage dans lopi nion des ecoutans , tant les Sages Jmaginaires faueur auprez des ont de les fous , mais elle les rend heureux , alenuy dlaraison rendre Ses amys que qui ne peut degloire lautr e dehonte + 9 Qui dispensela reputation ,qui donne le respect veneration, aux personnes , aux ouurages , aux loix * Toutes les delaterre Jnsuffisantes Sans Son consentemt magistrat Vieillesse Venerable Ne diriez Vous pas que Ce Vne queJl 10 pure EtSublime , Et juge ds choses |
Notes
1 L’encre utilisée au début du texte est de couleur violet gris.
2 Lecture douteuse.
3 Correction effectuée dans une encre gris clair.
4 Ajout affectué dans une encre semblable au titre.
5 Correction faite dans une encre violette qui tend vers le marron. Selon Y. Maeda, Cours de Sorbonne, Il y a eu correction parce que le texte était incompréhensible ou prêtait à contresens.
6 L’encre devient très claire et de couleur grise.
7 Correction faite dans une encre violette qui tend vers le marron.
8 Lecture douteuse.
9 Renvoi sans texte, peut-être effacé selon Z. Tourneur.
10 Correction dans une encre violet foncé.
* Étapes de la rédaction selon Yoichi Maeda
L’ordre des corrections est le suivant.
Premier jet : Quel pouvoir exerce elle sur les âmes sur les corps, combien de maladies guairies, combien de santés altérées, combien de richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez. Je n ay dou vient que le plus grave hom.
Le premier jet en marge contient une accumulation de combien.
En marge a ensuite été ajouté : (combien) de malades lui sont redevables et combien de sains de leur santé, Et combien de leurs maladies.
Le texte devient donc :
« Quel pouvoir exerce elle sur les âmes sur les corps, combien de maladies guairies, combien de santés altérées, de malades lui sont redevables de leur santé, Et combien de sains de leurs maladies, combien de richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez. »
Puis est supprimée la longue expansion : « Quel pouvoir excerce-t-elle sur les âmes, sur les corps, combien de maladies guéries [combien de malades lui sont redevables de leur santé], combien de santés altérées [et combien de sains de leurs maladies], combien de richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez.
Quel pouvoir exerce elle sur les âmes sur les corps, combien de maladies guairies, combien de santés altérées, de malades lui sont redevables de leur santé, Et combien de leurs maladies, combien de richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez.
Quel pouvoir exerce elle sur les âmes sur les corps, combien de maladies guairies, combien de santés altérées, de malades lui sont redevables de leur santé, Et combien de leurs maladies, combien de richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez. »
Ce développement supprimé est remplacé par cette seule formule : « toutes les richesses de la terre insuffisantes sans son consentement ». C’est-à-dire qu’on passe d’une hyperbole par entassement à une hyperbole d’intensité.
État final : Quel pouvoir exerce elle sur les âmes sur les corps, combien de maladies guairies, combien de santés altérées, de malades lui sont redevables de leur santé, Et combien de leurs maladies, combien de Toutes les richesses inutiles à celui qui s’imagine n’en avoir pas assez. De la terre Insuffisantes sans son consentement.
Mais Pascal oublie, sans doute par inadvertance, de barrer un combien en bout de ligne. Noter que selon Maeda, sur le manuscrit, le combien est barré par un trait tiré en rature. Mais les deux Copies et l’édition de Port-Royal considèrent que le mot n’est pas rayé, ce qui donne pour texte combien toutes les richesses de la terre insuffisantes sans son consentement. Ce combien gêne les éditeurs ; soit il subsiste flottant ; soit on le supprime. Faugère est le premier qui ait considéré le combien comme supprimé ; depuis, les éditeurs sont partagés sur ce point ; Molinier, Havet, Giraud, Sellier donnent le combien ; Brunschvicg, Tourneur, Lafuma et Le Guern le suppriment. Cela pose un problème d’édition : les éditeurs, qui se sentent obligés de maintenir ce combien doivent effectuer une autre intervention grammaticale pour sauver le texte.