Pensées diverses V – Fragment n° 4 / 7 – Papier original : RO 227-1 r° / v° et 226

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 170 p. 401 v°-403 / C2 : p. 375 v° à 377 v°

Éditions de Port-Royal : Chap. XXVIII - Pensées chrestiennes : 1669 et janvier 1670 p. 264 /

1678 n° 53 et 54 p. 256-257

Éditions savantes : Faugère II, 375, XLII ; II, 205, XXX ; I, 324, XIV ; II, 206, XXX / Havet XXIV.32, XXV.143, XXIV.31 bis / Michaut 480, 957 à 959 / Brunschvicg 497, 899, 858, 847 / Tourneur p. 122-1 / Le Guern 648 à 651 / Lafuma 774 à 777 (série XXVII) / Sellier 638 à 642

 

 

 

Contre ceux qui sur la confiance de la miséricorde

de Dieu demeurent dans la nonchalance

sans faire de bonnes œuvres.

Comme les deux sources de nos péchés sont l’orgueil et la paresse, Dieu nous a découvert deux qualités en lui pour les guérir : sa miséricorde et sa justice. Le propre de la justice est d’abattre l’orgueil,

quelque saintes que soient les œuvres, et non intres in judicium, etc.,

et le propre de la miséricorde est de combattre la paresse en invitant aux bonnes œuvres selon ce passage : La miséricorde de Dieu invite à pénitence, et cet autre des Ninivites : Faisons pénitence pour voir si par aventure il aura pitié de nous. Et ainsi tant s’en faut que la miséricorde autorise le relâchement que c’est au contraire la qualité qui le combat formellement. De sorte qu’au lieu de dire : S’il n’y avait point en Dieu de miséricorde, il faudrait faire toutes sortes d’efforts pour la vertu, il faut dire au contraire que c’est parce qu’il y a en Dieu de la miséricorde qu’il faut faire toutes sortes d’efforts.

 

Contre ceux qui abusent des passages de l’Écriture

et qui se prévalent de ce qu’ils en trouvent

quelqu’un qui semble favoriser leur erreur.

Le chapitre de vêpres, le dimanche de la Passion, loraison pour le roi.

 

Explication de ces paroles Qui n’est point pour moi est contre moi

et de ces autres Qui n’est point contre vous est pour vous.

Une personne qui dit Je ne suis ni pour ni contre, on doit lui répondre...

 

 

L’histoire de l’Église doit proprement être appelée l’histoire de la vérité.

 

Une des antiennes des vêpres de Noël : Exortum est in tenebris lumen rectis corde.

 

 

Suite de notes portant sur des sujets divers, mais qui touchent des points importants de la religion chrétienne, comme en témoigne le nombre de fragments connexes.

 

Et non intres in judicium : Et n’entrez point en jugement...

Exortum est in tenebris lumen rectis corde : [Dieu] s’est élevé comme une lumière au milieu des ténèbres sur ceux qui ont le cœur droit (Traduction de la Bible de Port-Royal).

 

Analyse détaillée...

 

Fragments connexes

 

Commencement 8 (Laf. 158, Sel. 190). Par les partis vous devez vous mettre en peine de rechercher la vérité, car si vous mourez sans adorer le vrai principe vous êtes perdu. Mais, dites-vous, s’il avait voulu que je l’adorasse il m’aurait laissé des signes de sa volonté. Aussi a-t-il fait, mais vous les négligez. Cherchez les donc, cela le vaut bien.

Fausseté 6 (Laf. 208, Sel. 240). Car ne voyant pas la vérité entière ils n’ont pu arriver à une parfaite vertu, les uns considérant la nature comme incorrompue, les autres comme irréparable, ils n’ont pu fuir ou l’orgueil ou la paresse qui sont les deux sources de tous les vices, puisqu’il[s] ne peu[ven]t sinon ou s’y abandonner par lâcheté, ou en sortir par l’orgueil. Car s’ils connaissaient l’excellence de l’homme, ils en ignorent la corruption de sorte qu’ils évitaient bien la paresse, mais ils se perdaient dans la superbe et s’ils reconnaissent l’infirmité de la nature ils en ignorent la dignité de sorte qu’ils pouvaient bien éviter la vanité mais c’était en se précipitant dans le désespoir.

Perpétuité 5 (Laf. 283, Sel. 315). Les six âges, les six pères des six âges, les six merveilles à l’entrée des six âges, les six orients à l’entrée des six âges.

Preuves de Jésus-Christ 19 (Laf. 317, Sel. 348). Qu’il est beau de voir par les yeux de la foi, Darius et Cyrus, Alexandre, les Romains, Pompée et Hérode, agir sans le savoir pour la gloire de l’Évangile.

Dossier de travail (Laf. 388, Sel. 7). Jésus-Christ que les deux Testaments regardent, l’Ancien comme son attente, le Nouveau comme son modèle, tous deux comme leur centre.

Preuves par discours I (Laf. 418, Sel. 680). Le juste est de ne point parier.

Preuves par les Juifs VI (Laf. 461, Sel. 700). Le monde subsiste pour exercer miséricorde et jugement, non pas comme si les hommes y étaient sortant des mains de Dieu, mais comme des ennemis de Dieu auxquels il donne, par grâce, assez de lumière pour revenir, s’ils le veulent chercher et le suivre, mais pour les punir, s’ils refusent de le chercher ou de le suivre.

Prophéties VIII (Laf. 500, Sel. 737). Beau de voir des yeux de la foi l’histoire d’Hérode, de César.

Règle de la créance (Laf. 505, Sel. 672). L’autorité.

Tant s’en faut que d’avoir ouï dire une chose soit la règle de votre créance, que vous ne devez rien croire sans vous mettre en l’état comme si jamais vous ne l’aviez ouï.

C’est le consentement de vous à vous-même et la voix constante de votre raison et non des autres qui vous doit faire croire.

Pensées diverses (Laf. 518, Sel. 452). Pyrrh[onisme].

L’extrême esprit est accusé de folie comme l’extrême défaut ; rien que la médiocrité n’est bon : c’est la pluralité qui a établi cela et qui mord quiconque s’en échappe par quelque bout que ce soit. Je ne m’y obstinerai pas, je consens bien qu’on m’y mette et me refuse d’être au bas bout, non pas parce qu’il est bas, mais parce qu’il est bout, car je refuserais de même qu’on me mît au haut. C’est sortir de l’humanité que de sortir du milieu.

La grandeur de l’âme humaine consiste à savoir s’y tenir, tant s’en faut que la grandeur soit à en sortir qu’elle est à n’en point sortir.

Pensées diverses (Laf. 563, Sel. 470). Hérétiques.

Ézéch.

Tous les païens disaient du mal d’Israël et le prophète aussi. Et tant s’en faut que les Israélites eussent droit de lui dire : « Vous parlez comme les païens », qu’il fait sa plus grande force sur ce que les païens parlent comme lui.

Pensées diverses (Laf. 573, Sel. 476). La Synagogue ne périssait point parce qu’elle était la figure. Mais parce qu’elle n’était que la figure elle est tombée dans la servitude. La figure a subsisté jusqu’à la vérité afin que l’Église fût toujours visible ou dans la peinture qui la promettait ou dans l’effet.

Pensées diverses (Laf. 593, Sel. 493). Les Juifs le refusent mais non pas tous ; les saints le reçoivent et non les charnels, et tant s’en faut que cela soit contre sa gloire que c’est le dernier trait qui l’achève. Comme la raison qu’ils en ont et la seule qui se trouve dans tous leurs écrits, dans le Talmud et dans les rabbins, n’est que parce que Jésus-Christ n’a pas dompté les nations en main armée. Gladium tuum potentissime. N’ont-ils que cela à dire ? Jésus-Christ a été tué, disent-ils, il a succombé et il n’a pas dompté les païens par sa force. Il ne nous a pas donné leurs dépouilles. Il ne donne point de richesses, n’ont-ils que cela à dire ? C’est en cela qu’il m’est aimable. Je ne voudrais pas celui qu’ils se figurent. Il est visible que ce n’est que le vice qui leur a empêché de le recevoir et par ce refus ils sont des témoins sans reproche, et qui plus est par là ils accomplissent les prophéties.

Pensées diverses (Laf. 733, Sel. 614). L’Église a toujours été combattue par des erreurs contraires. Mais peut-être jamais en même temps comme à présent, et si elle en souffre plus à cause de la multiplicité d’erreurs, elle en reçoit cet avantage qu’ils se détruisent.

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Elle se plaint des deux, mais bien plus des calvinistes à cause du schisme.

[...]

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La foi embrasse plusieurs vérités qui semblent se contredire, temps de rire, de pleurer, etc. responde ne respondeas, etc.

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La source en est l’union des deux natures en Jésus-Christ.

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Et aussi les deux mondes. La création d’un nouveau ciel et nouvelle terre. Nouvelle vie, nouvelle mort.

Toutes choses doublées et les mêmes noms demeurant.

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Et enfin les deux hommes qui sont dans les justes. Car ils sont les deux mondes, et un membre et image de Jésus-Christ. Et ainsi tous les noms leur conviennent de justes pécheurs, mort vivant, vivant mort, élu réprouvé, etc.

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Il y a donc un grand nombre de vérités, et de foi et de morale, qui semblent répugnantes et qui subsistent toutes dans un ordre admirable.

Pensées diverses (Laf. 746, Sel. 619). Sur ce que Josèphe ni Tacite, et les autres historiens, n’ont point parlé de Jésus-Christ.

Tant s’en faut que cela fasse contre, qu’au contraire cela fait pour. Car il est certain que Jésus-Christ a été et que sa religion a fait grand bruit et que ces gens-là ne l’ignoraient pas et qu’ainsi il est visible qu’ils ne l’ont celé qu’à dessein ou bien qu’ils en ont parlé et qu’on l’a supprimé, ou changé.

Pensées diverses (Laf. 747, Sel. 620). Sur ce que la religion chrétienne n’est pas unique.

Tant s’en faut que ce soit une raison qui fasse croire qu’elle n’est pas la véritable, qu’au contraire c’est ce qui fait voir qu’elle l’est.

Pensées diverses (Laf. 766, Sel. 631). Vêpres.

Pensées diverses (Laf. 817, Sel. 659). On a beau dire : il faut avouer que la religion chrétienne a quelque chose d’étonnant. C’est parce que vous y êtes né dira-t-on. Tant s’en faut je me roidis contre par cette raison-là même, de peur que cette prévention ne me suborne, mais quoique j’y sois né je ne laisse pas de le trouver ainsi.

Miracles III (Laf. 881, Sel. 443). Les miracles ont une telle force qu’il a fallu que Dieu ait averti qu’on n’y pense point contre lui, tout clair qu’il soit qu’il y a un Dieu.

Sans quoi ils eussent été capables de troubler.

Et ainsi tant s’en faut que ces passages, Deut. 13, fassent contre l’autorité des miracles, que rien n’en marque davantage la force.

 

Laf. 965, Sel. 799. Pour la foule des casuistes tant s’en faut que ce soit un sujet d’accusation contre l’Église que c’est au contraire un sujet de gémissement de l’Église.

Laf. 967, Sel. 800. Et ainsi les fidèles n’ont aucun prétexte de suivre ces relâchements qui ne leur sont offerts que par les mains étrangères de ces casuistes, au lieu de la saine doctrine qui leur est présentée par les mains paternelles de leurs propres pasteurs. Et les impies et les hérétiques n’ont aucun sujet de donner ces abus pour des marques du défaut de la providence de Dieu sur son Église, puisque l’Église étant proprement dans le corps de la hiérarchie, tant s’en faut qu’on puisse conclure de l’état présent des choses, que Dieu l’ait abandonnée à la corruption, qu’il n’a jamais mieux paru qu’aujourd’hui, que Dieu la défend visiblement de la corruption.

 

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