Fragment Conclusion n° 3 / 6  – Papier original : RO 485-2

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Conclusion n° 370 p. 185 / C2 : p. 217

Éditions savantes : Faugère II, 233, XXV / Havet XXV.42 / Brunschvicg 825 / Tourneur p. 296-3 / Le Guern 359 / Lafuma 379 / Sellier 411

 

 

 

Les miracles ne servent pas à convertir mais à condamner. I. p. q. 113, a. 10, ad. 2.

 

 

Cette référence à la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin confirme les réflexions que Pascal a faites dans les fragments Conclusion 2 (Laf. 378, Sel. 410), Si j’avais vu un miracle, disent-ils, je me convertirais, et Pensées diverses (Laf. 574, Sel. 477), Un miracle, dit-on, affermirait ma créance : il ne s’agit que de mauvais prétextes, car les miracles ne servent pas à susciter la conversion.

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Fragments connexes

 

Conclusion 2 (Laf. 378, Sel. 410). Si j’avais vu un miracle, disent-ils, je me convertirais. Comment assurent-ils qu’ils feraient ce qu’ils ignorent. Ils s’imaginent que cette conversion consiste en une adoration qui se fait de Dieu comme un commerce et une conversation telle qu’ils se la figurent. La conversion véritable consiste à s’anéantir devant cet être universel qu’on a irrité tant de fois et qui peut vous perdre légitimement à toute heure, à reconnaître qu’on ne peut rien sans lui et qu’on n’a rien mérité de lui que sa disgrâce. Elle consiste à connaître qu’il y a une opposition invincible entre Dieu et nous et que sans un médiateur il ne peut y avoir de commerce.

Pensées diverses (Laf. 574, Sel. 477). Un miracle, dit-on, affermirait ma créance, on le dit quand on ne le voit pas. Les raisons qui, étant vues de loin, paraissent borner notre vue, mais quand on y est arrivé on commence à voir encore au-delà. Rien n’arrête la volubilité de notre esprit. Il n’y a point, dit-on, de règle qui n’ait quelque exception ni de vérité si générale qui n’ait quelque face par où elle manque. Il suffit qu’elle ne soit pas absolument universelle pour nous donner sujet d’appliquer l’exception au sujet présent, et de dire, cela n’est pas toujours vrai, donc il y a des cas où cela n’est pas. Il ne reste plus qu’à montrer que celui-ci en est et c’est à quoi on est bien maladroit ou bien malheureux si on ne trouve quelque joint.

Miracles II (Laf. 835, Sel. 423). Les prophéties, les miracles mêmes et les preuves de notre religion ne sont pas de telle nature qu’on puisse dire qu’ils sont absolument convaincants, mais ils le sont aussi de telle sorte qu’on ne peut dire que ce soit être sans raison que de les croire. Ainsi il y a de l’évidence et de l’obscurité pour éclairer les uns et obscurcir les autres, mais l’évidence est telle qu’elle surpasse ou égale pour le moins l’évidence du contraire, de sorte que ce n’est pas la raison qui puisse déterminer à ne la pas suivre, et ainsi ce ne peut être que la concupiscence et la malice du cœur. Et par ce moyen il y a assez d’évidence pour condamner, et non assez pour convaincre, afin qu’il paraisse qu’en ceux qui la suivent c’est la grâce et non la raison qui fait suivre, et qu’en ceux qui la fuient c’est la concupiscence et non la raison qui fait fuir.

 

Mots-clés : Condamnation – Conversion – Miracle.