Fragment Conclusion n° 2 / 6  – Papier original : RO 483-1

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Conclusion n° 369 p. 185 / C2 : p. 217

Éditions de Port-Royal : Chap. VI - Foi sans raisonnement : 1669 et janvier 1670 p. 50  / 1678 n° 1 p. 52

Éditions savantes : Faugère II, 232, XXV / Havet XIII.9 / Brunschvicg 470 / Tourneur p. 296-2 / Le Guern 358 / Lafuma 378 / Sellier 410

 

 

 

Si j’avais vu un miracle, disent‑ils, je me convertirais. Comment assurent‑ils qu’ils feraient ce qu’ils ignorent ? Ils s’imaginent que cette conversion consiste en une adoration qui se fait de Dieu comme un commerce et une conversation telle qu’ils se la figurent. La conversion véritable consiste à s’anéantir devant cet être universel qu’on a irrité tant de fois et qui peut vous perdre légitimement à toute heure, à reconnaître qu’on ne peut rien sans lui et qu’on n’a rien mérité de lui que sa disgrâce. Elle consiste à connaître qu’il y a une opposition invincible entre Dieu et nous et que sans un médiateur il ne peut y avoir de commerce.

 

 

Ce fragment, comme Pensées diverses (Laf. 574, Sel. 477), traite la question du rapport des miracles et de la conversion. Pascal semble avoir envisagé la question dans les premiers temps de la préparation de son Apologie. Il a conclu que les miracles ne peuvent servir d’argument efficace pour susciter une recherche qui puisse aboutir à une conversion.

Selon Conclusion 3 (Laf. 379, Sel. 411). Les miracles ne servent pas à convertir ; ils servent seulement pour ceux qui ne les admettent pas, à condamner. Dans le présent fragment, Pascal envisage les mauvais prétextes que certains incrédules tirent des miracles (même de bonne foi) pour ne pas s’engager dans la recherche de Dieu.

Mais ils ne l’abordent pas du même point de vue. Laf. 574, Sel. 477 note que ces raisons supposent une ignorance de ce qu’est concrètement un miracle : Un miracle, dit-on, affermirait ma créance, on le dit quand on ne le voit pas. Le présent fragment, lui, soutient que ces prétextes supposent que l’on ignore ce qu’est la conversion. Ce fragment relève donc bien du dernier mouvement de l’Apologie, où Pascal cherche à ôter les ultimes résistances qui peuvent s’opposer à la recherche.

 

Analyse détaillée...

 

Fragments connexes

 

Conclusion 3 (Laf. 379, Sel. 411). Les miracles ne servent pas à convertir mais à condamner.

Pensées diverses (Laf. 574, Sel. 477). Un miracle, dit-on, affermirait ma créance, on le dit quand on ne le voit pas. Les raisons qui étant vues de loin paraissent borner notre vue, mais quand on y est arrivé on commence à voir encore au-delà. Rien n’arrête la volubilité de notre esprit. Il n’y a point, dit-on, de règle qui n’ait quelque exception, ni de vérité si générale qui n’ait quelque face par où elle manque. Il suffit qu’elle ne soit pas absolument universelle pour nous donner sujet d’appliquer l’exception au sujet présent, et de dire, cela n’est pas toujours vrai, donc il y a des cas où cela n’est pas. Il ne reste plus qu’à montrer que celui-ci en est et c’est à quoi on est bien maladroit ou bien malheureux si on ne trouve quelque jour.

 

Mots-clés : AdorationAnéantirAssurance – Commerce – Conversation – Conversion – DieuDisgrâceÊtreImaginationIrriterMédiateurMiracleOppositionPerdreUniversel.