Fragment Fondement n° 14 / 21  – Papier original : RO 27-8

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Fondement n° 288 p. 119-119 v° / C2 : p. 146

Chap. XVIII - Dessein de Dieu de se cacher aux uns, et de se découvrir aux autres :

1669 et janvier 1670 p. 141  / 1678 n° 11 p. 139-140

Éditions savantes : Faugère II, 282, XXIV / Havet XX.7 / Brunschvicg 795 / Tourneur p. 253-1 / Le Guern 222 / Lafuma 237 / Sellier 269

 

 

 

 

 

Dans l’édition de Port-Royal

 

Chap. XVIII - Dessein de Dieu de se cacher aux uns, et de se découvrir aux autres : 1669 et janvier 1670 p. 141  / 1678 n° 11 p. 139-140

       

 

Différences constatées par rapport au manuscrit original

 

Ed. janvier 1670 1

Transcription du manuscrit

 

 Si Jésus-Christ n’était venu que pour sanctifier, toute l’Écriture et toutes choses y tendraient, et il serait bien aisé de convaincre les infidèles. Mais comme il est venu in sanctificationem et in scandalum 3, comme dit Isaïe, nous ne pouvons convaincre l’obstination des infidèles : mais cela ne fait rien contre nous, 4 puisque nous disons, qu’il n’y a point de conviction dans toute la conduite de Dieu, pour les esprits opiniâtres, et qui ne recherchent pas sincèrement la vérité.

 

 

Si Jésus‑Christ n’était venu que pour sanctifier, toute l’Écriture et toutes choses y tendraient, et il serait bien aisé de convaincre les infidèles. Si Jésus‑Christ n’était venu que pour aveugler, toute sa conduite serait confuse et nous n’aurions aucun moyen de convaincre les infidèles. 2 Mais comme il est venu in sanctificationem et in scandalum, comme dit Isaïe, nous ne pouvons convaincre les infidèles et ils ne peuvent nous convaincre, mais par là même nous les convainquons, puisque nous disons qu’il n’y a point de conviction dans toute sa conduite de part ni d’autre.

 

 

1 Conventions : rose = glose des éditeurs ; vert = correction des éditeurs ; marron = texte non retenu par les éditeurs.

2 Texte omis dans les Copies C1 et C2.

3 La référence Is. 8. 14. a été ajoutée dans l’édition de 1678.

4 Ce signe était un point-virgule dans l’édition préoriginale de 1669 ; il a été corrigé en une virgule dans l’édition de janvier 1670.

 

Commentaire

 

Les éditeurs réduisent le raisonnement en le ramenant à l’alternative Si Jésus-Christ n’était venu que pour sanctifier, et il est venu in sanctificationem et in scandalum, ce qui revient à supprimer toute la démarche dialectique du fragment. La suppression se comprend sans doute par le fait que les éditeurs n’ont pas voulu évoquer l’hypothèse que les chrétiens pourraient n’avoir aucun moyen de convaincre les infidèles. D’autre part, ils ajoutent une idée qui n’est pas explicitement dans l’original, que les infidèles refusent de se rendre à la religion chrétienne par refus opiniâtre de chercher la vérité : cette idée n’est pas incompatible avec la pensée de Pascal, mais, exprimée de but en blanc, elle apparaît comme un procès d’intention difficilement justifiable. Ces modifications témoignent d’une sorte de timidité de la part des éditeurs devant le caractère paradoxal et audacieux de certaines formules de Pascal.