Fragment Preuves de Jésus-Christ n° 6 / 24 – Papier original : RO 61-5
Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Preuves de J.-C. n° 337 p. 157-157 v° / C2 : p. 188
Éditions de Port-Royal : Préface : 1669 et janvier 1670 p. [39] / 1678 p. [25-26]
Éditions savantes : Faugère II, 370, XXXI / Havet XIX.2 bis / Brunschvicg 799 / Tourneur p. 277-1 / Le Guern 285 / Lafuma 303 / Sellier 334
Dans l’édition de Port-Royal
Préface : 1669 et janvier 1670 p. [39] / 1678 p. [25-26] |
Différences constatées par rapport au manuscrit original
Ed. janvier 1670 1 |
Transcription du manuscrit |
Voici donc quelle est cette pensée, et en quel état on l’a trouvée parmi ces fragments : Un artisan qui parle des richesses, un Procureur qui parle de la guerre, de la Royauté, etc. Mais le riche parle bien des richesses, le Roi parle froidement d’un grand don qu’il vient de faire, et Dieu parle bien de Dieu.
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Un artisan qui parle des richesses, un procureur qui parle de la guerre, de la royauté, etc., mais le riche parle bien des richesses, le roi parle froidement d’un grand don qu’il vient de faire, et Dieu parle bien de Dieu. |
1 Conventions : rose = glose des éditeurs ; vert = correction des éditeurs ; marron = texte non retenu par les éditeurs.
Commentaire
Étienne Périer, auteur de la préface, en donne une explication :
« Il y a dans ce fragment une fort belle pensée ; mais il y a peu de personnes qui la puissent voir, parce qu’elle y est expliquée très imparfaitement et d’une manière fort obscure, fort courte, et fort abrégée : en sorte que si on ne lui avait souvent ouï-dire de bouche la même pensée, il serait difficile de la reconnaître dans une expression si confuse et si embrouillée. Voici à peu près en quoi elle consiste.
Il avait fait plusieurs remarques très particulières sur le style de l’Écriture et principalement de l’Évangile, et il y trouvait des beautés que peut-être personne n’avait remarquées avant lui. Il admirait entre autres choses la naïveté, la simplicité, et pour le dire ainsi la froideur avec laquelle il semble que Jésus-Christ y parle des choses les plus grandes et les plus relevées, comme sont, par exemple, le Royaume de Dieu, la gloire que possèderont les Saints dans le ciel, les peines de l’enfer, sans s’y étendre, comme ont fait les Pères, et tous ceux qui ont écrit sur ces matières. Et il disait que la véritable cause de cela était que ces choses qui à la vérité sont infiniment grandes et relevées à notre égard, ne le sont pas de même à l’égard de Jésus-Christ, et qu’ainsi il ne faut pas trouver étrange qu’il en parle de cette sorte sans étonnement et sans admiration ; comme l’on voit sans comparaison qu’un Général d’armée parle tout simplement et sans s’émouvoir du siège d’une place importante, et du gain d’une grande bataille ; et qu’un Roi parle froidement d’une somme de quinze ou vingt millions, dont un particulier et un artisan ne parleraient qu’avec de grandes exagérations.
Voilà quelle est la pensée qui est contenue et renfermée sous le peu de paroles qui composent ce fragment ; et cette considération jointe à quantité d’autres semblables pouvait servir assurément dans l’esprit des personnes raisonnables, et qui agissent de bonne foi, de quelque preuve de la divinité de Jésus-Christ. » (Préface, p. [39]-[42])