L’édition de Port-Royal de 1678

 

 

 

Pensées - page 203

assister en leurs besoins, ils ne laissent

pas d’être misérables, parce que

personne ne les empêche plus de songer

à eux.

De là vient que tant de personnes

se plaisent au jeu, à la chasse, et aux

autres divertissements qui occupent

toute leur âme. Ce n’est pas qu’il y

ait en effet du bonheur dans ce que

l’on peut acquérir par le moyen de

ces jeux, ni qu’on s’imagine que la

vraie béatitude soit dans l’argent

qu’on peut gagner au jeu, ou dans le

lièvre que l’on court. On n’en voudrait

pas s’il était offert. Ce n’est

pas cet usage mol et paisible, et qui

nous laisse penser à notre malheureuse

condition, qu’on recherche ;

mais c’est le tracas qui nous détourne

d’y penser.

De là vient que les hommes aiment

tant le bruit et le tumulte du monde ;

que la prison est un supplice si horrible ;

et qu’il y a si peu de personnes

qui soient capables de souffrir la solitude.

Voilà tout ce que les hommes ont

pu inventer pour se rendre heureux.

Et ceux qui s’amusent simplement à

 

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