Pensées diverses III – Fragment n° 2 / 85 – Papier original : RO 441-2
Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 115 p. 365 / C2 : p. 321
Éditions de Port-Royal : Chap. XXIX - Pensées morales : 1669 et janvier 1670 p. 281-282 / 1678 n° 23 p. 278
Éditions savantes : Faugère I, 259, XXXVI ; I, 194, XLVIII ; II, 43, XIII / Havet XXV.25 ter, VI.16, IV.6 / Brunschvicg 59 et 109 / Tourneur p. 95 / Le Guern 543 / Lafuma 637 à 639 (série XXV) / Sellier 529
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Bibliographie ✍
BRAS Gérard et CLÉRO Jean-Pierre, Pascal. Figures de l’imagination, Paris, Presses Universitaires de France, 1994. CROQUETTE Bernard, Pascal et Montaigne. Étude des réminiscences des Essais dans l’œuvre de Pascal, Genève, Droz, 1974. FERREYROLLES Gérard, Les reines du monde. L’imagination et la coutume chez Pascal, Paris, Champion, 1995. MESNARD Jean, “L’exemple dans les Pensées de Pascal”, in B. Guion, M. S. Seguin, S. Menant et P. Sellier, Poétique de la pensée. Études sur l’âge classique et le siècle philosophique, Paris, Champion, 2006, p. 569-585. MESNARD Jean, La culture au XVIIe siècle. Enquêtes et synthèses, Paris, Presses Universitaires de France, 1992. SHIOKAWA Tetsuya, Entre foi et raison : l’autorité. Études pascaliennes, Paris, Champion, 201. SUSINI Laurent, L’écriture de Pascal. La lumière et le feu. La « vraie éloquence » à l’œuvre dans les Pensées, Paris, Champion, 2008. |
✧ Éclaircissements
Éteindre le flambeau de la sédition : trop luxuriant.
Arnauld d’Andilly Robert, Œuvres chrétiennes, Prière à Jésus-Christ sur la délivrance de la Terre sainte, IX, Paris, Le Petit, 1685, p. 55 :
« D’un seul de tes regards nos troupes animées
De nos divisions éteindront le flambeau ».
Luxuriant ne figure ni dans Furetière, ni dans Richelet, ni dans le Dictionnaire de l’Académie.
Havet, Pensées, 1852, p. 365 ; 1866, p. 213. Havet note que luxuriant est une expression latine qui se dit proprement d’un luxe de végétation, et par suite toute espèce de surabondance. Si on prodigue les termes expressifs, on leur ôte leur effet, pour vouloir faire trop d’effet. Si on dit l’inquiétude de son génie quand ce serait assez dire l’inquiétude de son esprit, on étonne plus qu’on ne touche, et on finit par ne plus étonner. L’excès d’expressivité tue l’expressivité.
Sur la condamnation des fausses beautés, voir Susini Laurent, L’écriture de Pascal. La lumière et le feu. La « vraie éloquence » à l’œuvre dans les Pensées, p. 288 sq.
Sur les positions de Pascal à l’égard des fausses beautés de langage, voir Mesnard Jean, “Vraie et fausse beauté dans l’esthétique du XVIIe siècle”, in La culture au XVIIe siècle. Enquêtes et synthèses, p. 222 sq.
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L’inquiétude de son génie : trop de deux mots hardis.
Havet Ernest, Pensées, 1852, p. 364. Le mot inquiétude est d’une grande force, d’après l’étymologie ; il signifie proprement l’impossibilité de demeurer en repos. De mon inquiétude : l’agitation perpétuelle de ma vie.
Génie ne désigne pas seulement le naturel d’un homme, son caractère : c’est une puissance mystérieuse qui réside en lui, et qui le fait ce qu’il est.
GEF XII, p. 60, et Brunschvicg minor, p. 341, notent que, malgré la justesse de la remarque de Pascal, Racine a eu raison, dans Britannicus (1669), d’attribuer à Néron, parlant d’Agrippine, la réplique « Mon génie étonné tremble devant le sien ».
Cette remarque s’inscrit parmi celles qui touchent aux manières ordinaires de parler, comme le fragment Laf. 583, Sel. 485. Deviner.
La part que je prends à votre déplaisir.
M. le Cardinal ne voulait point être deviné.
J’ai l’esprit plein d’inquiétude. Je suis plein d’inquiétude vaut mieux.
Éloquence qui persuade par douceur non par empire, en tyran non en roi.
Le mot inquiétude est aussi mentionné dans ce fragment, mais pour d’autres raisons apparemment.
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Quand on se porte bien, on admire comment on pourrait faire si on était malade. Quand on l’est, on prend médecine gaiement, le mal y résout ;
Admirer : considérer avec surprise, avec étonnement quelque chose de surprenant, ou dont on ignore les causes (Furetière). La suite du texte suggère que Pascal y ajoute une nuance de crainte.
Voir la Vie de M. Pascal de Gilberte Périer, § 50, OC I, éd. J. Mesnard, p. 587-588. « La mortification de ses sens n’allait pas seulement à se retrancher de tout ce qui pouvait leur être agréable, mais encore à ne leur rien refuser pour cette raison qu’il leur pourrait déplaire, soit pour la nourriture, soit pour les remèdes. Il a pris quatre ans durant des consommés sans en témoigner le moindre dégoût ; et il prenait toutes les choses qu’on lui ordonnait pour sa santé, sans aucune peine, quelque difficiles qu’elles fussent ; et lorsque je m’étonnais de ce qu’il ne témoignait pas la moindre répugnance en le prenant, il se moquait de moi, et me disait qu’il ne pouvait comprendre lui-même comment on pouvait témoigner de la répugnance quand on prenait une médecine volontairement et après qu’on avait été averti qu’elle était mauvaise, et qu’il n’y avait que la violence ou la surprise qui dussent produire ces effets. C’est en cette manière qu’il travaillait sans cesse à la mortification de ses sens. »
on n’a plus les passions et les désirs de divertissements et de promenades que la santé donnait et qui sont incompatibles avec les nécessités de la maladie. La nature donne alors des passions et des désirs conformes à l’état présent.
C’est précisément ce point qui, selon la Prière pour demander à Dieu le bon usage des maladies, permet de trouver un avantage dans la condition de malade. Voir le § III, OC IV, éd. J. Mesnard, p. 999-1000.
« Je vous loue, mon Dieu, et je vous bénirai tous les jours de ma vie, de ce qu’il vous a plu me réduire dans l’incapacité de jouir des douceurs de la santé et des plaisirs du monde, et de ce que vous avez anéanti en quelque sorte, pour mon avantage, les idoles trompeuses que vous anéantirez effectivement pour la confusion des méchants, au jour de votre colère. Faites, Seigneur, que je me juge moi-même ensuite de cette destruction que vous avez faite à mon égard, afin que vous ne me jugiez pas vous-même ensuite de l’entière destruction que vous ferez de ma vie et du monde. Car, Seigneur, comme à l’instant de ma mort je me trouverai séparé du monde, dénué de toutes choses, seul en votre présence, pour répondre à votre justice de tous les mouvements de mon cœur, faites que je me considère en cette maladie comme en une espèce de mort, séparé du monde, dénué de tous les objets de mes attachements, seul en votre présence, pour implorer de votre miséricorde la conversion de mon cœur ; et qu’ainsi j’aie une extrême consolation de ce que vous m’envoyez maintenant une espèce de mort pour exercer votre miséricorde, avant que vous m’envoyiez effectivement la mort pour exercer votre jugement. Faites donc, ô mon Dieu, que comme vous avez prévenu ma mort, je prévienne la rigueur de votre sentence, et que je m’examine moi-même avant votre jugement, pour trouver miséricorde en votre présence. »
Promenades : la promenade peut être le cadre de rencontres galantes. Voir le premier acte du Menteur de Corneille.
Bernard Croquette, Pascal et Montaigne. Étude des réminiscences des Essais dans l’œuvre de Pascal, p. 60, renvoie, sur ce passage à Montaigne, Essais, I, XIX (XX), Que philosopher, c’est apprendre à mourir, éd. Balsamo et alii, p. 92 ; mais le rapport est assez lointain. « Tout ainsi que j’ai essayé en plusieurs autres occurrences, ce que dit César, que les choses nous paraissent souvent plus grandes de loin que de près, j’ai trouvé que sain j’avais eu les maladies beaucoup plus en horreur, que lorsque je les ai senties. L’allégresse où je suis, le plaisir et la force, me font paraître l’autre état si disproportionné à celui-là, que par imagination je grossis ces incommodités de la moitié, et les conçois plus pesantes, que je ne les trouve, quand je les ai sur les épaules. »
Mais le rapprochement est plus clair avec les deux passages suivants :
Montaigne, Essais, II, 6, De l’exercitation, éd. Balsamo et alii, Pléiade, p. 390.
« Plusieurs choses nous semblent plus grandes par imagination, que par effet. J’ai passé une bonne partie de mon âge en une parfaite et entière santé : je dis non seulement entière, mais encore allègre et bouillante. Cet état plein de verdeur et de fête, me faisait trouver si horrible la considération des maladies, que quand je suis venu à les expérimenter, j’ai trouvé leurs pointures molles et lâches au prix de ma crainte.
Voici que j’éprouve tous les jours : Suis-je à couvert chaudement dans une bonne salle, pendant qu’il se passe une nuit orageuse et tempêtueuse : je m’étonne et m’afflige pour ceux qui sont lors en la campagne : y suis-je moi-même, je ne désire pas seulement d’être ailleurs.
Cela seul, d’être toujours enfermé dans une chambre, me semblait insupportable : je fus incontinent dressé à y être une semaine, et un mois, plein d’émotion, d’altération et de faiblesse : Et ai trouvé que lors de ma santé, je plaignais les malades beaucoup plus, que je ne me trouve à plaindre moi-même, quand j’en suis ; et que la force de mon appréhension enchérissait près de moitié l’essence et vérité de la chose. »
Montaigne, Essais, II, 37, De la ressemblance des enfants aux pères, éd. Balsamo et alii, p. 797-798.
« Mais les souffrances vraiment essentielles et corporelles, je les goûte bien vivement. Si est-ce pourtant, que les prévoyant autrefois d’une vue faible, délicate, et amollie par la jouissance de cette longue et heureuse santé et repos, que Dieu m’a prêté, la meilleure part de mon âge : je les avais conçues par imagination, si insupportables, qu’à la vérité j’en avais plus de peur, que je n’y ai trouvé de mal : Par où j’augmente toujours cette créance, que la plupart des facultés de notre âme, comme nous les employons, troublent plus le repos de la vie, qu’elles n’y servent. »
Pascal mentionne le changement que les circonstances peuvent provoquer en l’homme dans De l’Esprit géométrique, II, De l’art de persuader, OC III, éd. J. Mesnard, p. 417, § 11. « La raison de cette extrême difficulté vient de ce que les principes du plaisir ne sont pas fermes et stables. Ils sont divers en tous les hommes, et variables dans chaque particulier avec une telle diversité, qu’il n’y a point d’homme plus différent d’un autre que de soi même dans les divers temps. Un homme a d’autres plaisirs qu’une femme ; un riche et un pauvre en ont de différents ; un prince, un homme de guerre, un marchand, un bourgeois, un paysan, les vieux, les jeunes, les sains, les malades, tous varient ; les moindres accidents les changent. »
Dans le cas de la maladie, ce n’est pas la nature qui donne des désirs conformes à l’état présent : il y faut la grâce que seule peut obtenir la prière. Voir la Prière pour demander à Dieu le bon usage des maladies, IX.
« Oui, Seigneur, jusqu’ici j’ai toujours été sourd à vos inspirations : j’ai méprisé vos oracles ; j’ai jugé au contraire de ce que vous jugez ; j’ai contredit aux saintes maximes que vous avez apportées au monde du sein de votre Père éternel, et suivant lesquelles vous jugerez le monde. Vous dites : « Bienheureux sont ceux qui pleurent, et malheur à ceux qui sont consolés. » Et moi j’ai dit : « Malheureux ceux qui gémissent, et très heureux ceux qui sont consolés. » J’ai dit : « Heureux ceux qui jouissent d’une fortune avantageuse, d’une réputation glorieuse et d’une santé robuste. » Et pourquoi les ai-je réputés heureux, sinon parce que tous ces avantages leur fournissaient une facilité très ample de jouir des créatures, c’est-à-dire de vous offenser ? Oui, Seigneur, je confesse que j’ai estimé la santé un bien, non pas parce qu’elle est un moyen facile pour vous servir avec utilité, pour consommer plus de soins et de veilles à votre service, et pour l’assistance du prochain ; mais parce qu’à sa faveur je pouvais m’abandonner avec moins de retenue dans l’abondance des délices de la vie, et en mieux goûter les funestes plaisirs. Faites-moi la grâce, Seigneur, de réformer ma raison corrompue, et de conformer mes sentiments aux vôtres. Que je m’estime heureux dans l’affliction, et que, dans l’impuissance d’agir au-dehors, vous purifiiez tellement mes sentiments qu’ils ne répugnent plus aux vôtres ; et qu’ainsi je vous trouve au-dedans de moi-même, puisque je ne puis vous chercher au-dehors à cause de ma faiblesse. Car, Seigneur, votre royaume est dans vos fidèles ; et je le trouverai dans moi-même, si j’y trouve votre Esprit et vos sentiments. »
Brunschvicg renvoie à La Bruyère, Caractères, De l’homme, 30 (I). « Il y a des maux effroyables et d’horribles malheurs où l’on n’ose penser, et dont la seule vue fait frémir : s’il arrive que l’on y tombe, l’on se trouve des ressources que l’on ne se connaissait point, l’on se raidit contre son infortune, et l’on fait mieux qu’on ne l’espérait ».
Il n’y a que les craintes, que nous nous donnons nous‑mêmes et non pas la nature, qui nous troublent, parce qu’elles joignent à l’état où nous sommes les passions de l’état où nous ne sommes pas.
Le passage qui suit contient une formule analogue : parce qu’ils joignent à l’état où nous sommes les plaisirs de l’état où nous ne sommes pas.
Brunschvicg renvoie à Épictète, Manuel, V : « Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions qu’ils ont sur les choses ». Voir Les stoïciens, éd. P. M. Schuhl, Pléiade, Paris, Gallimard, 1962, p. 1113. Voir sur ce sujet Rodis-Lewis Geneviève, La morale stoïcienne, Paris, P. U. F., 1970, p. 100 sq.
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La nature nous rendant toujours malheureux en tous états, nos désirs nous figurent un état heureux, parce qu’ils joignent à l’état où nous sommes les plaisirs de l’état où nous ne sommes pas. Et quand nous arriverions à ces plaisirs nous ne serions pas heureux pour cela, parce que nous aurions d’autres désirs conformes à ce nouvel état.
Le passage précédent contient une formule analogue : parce qu’elles joignent à l’état où nous sommes les passions de l’état où nous ne sommes pas.
Quelle que soit la situation, la disposition est toujours la même, composée de l’état présent et du désir d’un état imaginaire. La nature nous rend malheureux parce qu’elle joint ces deux états, l’état présent et l’idée d’un état de bonheur imaginaire. Si par impossible, on parvient au bonheur imaginaire, on aurait d’autres désirs conformes à ce nouvel état, et par suite on ne serait pas heureux pour cela. Chaque étape répète la précédente, ce qui fait une sorte de récurrence continuelle, qui rend l’insatisfaction perpétuelle en l’homme.
Le mécanisme rappelle celui du divertissement où, parvenu à un premier but censé lui donner le bonheur, l’homme s’engage dans la recherche d’un second but.
D’autre part, la notion de l’état où nous ne sommes pas enferme une référence implicite aux fictions de l’imagination. Il faut se reporter au fragment Vanité 31 (Laf. 44, Sel. 78), Imagination.
Sur les rapports de l’imagination et des opinions que les hommes se forgent, voir Ferreyrolles Gérard, Les reines du monde. L’imagination et la coutume chez Pascal, p. 100 sq., qui souligne les rapports entre certains thèmes de Pascal et les idées des stoïciens.
Voir dans Shiokawa Tetsuya, Entre foi et raison : l’autorité. Études pascaliennes, p. 68 sq., sur le rapport entre fantaisie et opinion.
GEF XIII, p. 37, interprète ce fragment comme l’inverse et le complément du précédent tout à la fois. Quand on est heureux, on ne sait comment on supporterait le malheur ; quand on est malheureux, on croit qu’on serait heureux par le plaisir. Ces deux illusions proviennent du fait qu’on projette ses désirs actuels dans l’avenir, qui exclut ces mêmes désirs.
GEF XIII, p. 37, renvoie, peut-être à bon escient, aux Essais de morale, VI, Paris, Desprez, 1733, Pensées diverses, XXXIII, p. 234-235, où Nicole propose une laborieuse généralisation : « Ce qui nous trompe en comparant les avantages des conditions. Ce qui nous trompe dans la comparaison de l’avantage des conditions, c’est que nous nous transportons en une autre condition avec les passions de la nôtre, sans nous revêtir de celles qui sont attachées à cette condition. C’est ce qui fait que nous la croyons plus avantageuse, parce qu’elle serait telle en effet, si ceux qui la possèdent n’avaient point d’autres passions que celles que nous avons. Mais il n’en est pas ainsi : chaque condition a ses passions, ou plutôt le fond de cupidité que nous avons en nous, se répand selon la mesure des conditions dans lesquelles il se trouve : il s’étend et se déborde, quand il trouve plus de place, il se resserre quand il en a moins, et nous fatigue presque également en tout état.
Ce n’est donc pas par la satisfaction des passions qu’il faut juger du bonheur des états, puisqu’elles sont presque aussi peu satisfaites en un état que dans un autre, mais par d’autres considérations plus essentielles ».
Le lien avec La Rochefoucauld, Maximes, 49, « On n’est jamais ni si heureux ni si malheureux qu’on s’imagine » est aussi assez lointain.
Il faut particulariser cette proposition générale.
Particulariser : marquer le détail, les particularités d’une affaire, d’un événement (Dictionnaire de l’Académie). Dire beaucoup de menues circonstances d’une affaire. Les histoires qu’on particularise trop, dont on dit trop de détail, sont ennuyeuses (Furetière). Noter cependant que Pascal parle ici de particulariser une proposition, et non un fait. Il entend sans doute le mot dans un sens un peu différent des dictionnaires.
Sur la généralité et la particularité, voir Arnauld Antoine et Nicole Pierre, La logique ou l’art de penser, I, V, éd. D. Descotes, Paris, Champion, 2014, p. 129 sq.
Cette note présente l’intérêt de montrer que, tout persuadé de l’importance de trouver des propositions ou des méthodes universelles, Pascal ne perd pas de vue l’intérêt de les appuyer sur des exemples particuliers et susceptibles d’une explication détaillée.
Mesnard Jean, “L’exemple dans les Pensées de Pascal”, p. 569-585. La « particularisation » se fait par le choix d’exemple. Voir notamment la conclusion, qui situe Pascal à un tournant de l’évolution intellectuelle, entre la tendance qui goûte le concret, le divers, voire le symbolique, et celle qui recherche le concept, l’abstraction et la clarté. Cet équilibre ne tarde pas à se défaire : voir p. 584-585.
Sur les « règles de l’exemple », on peut consulter Bras Gérard et Cléro Jean-Pierre, Pascal. Figures de l’imagination, p. 46 sq.
Un exemple d’exemple nécessitant une particularisation se trouve dans le fragment précédent, qui oblige le lecteur à chercher dans Le grand Cyrus les détails de l’histoire de Cléobuline. De la même manière, le fragment Miracles III (Laf. 897, Sel. 448), Comminuentes cor. Saint Paul. Voilà le caractère chrétien. Albe vous a nommé, je ne vous connais plus. Corneille. Voilà le caractère inhumain. Le caractère humain est le contraire, n’est compréhensible que si l’on connaît les circonstances de la tragédie Horace.