Miracles II  – Fragment n° 4 / 15 – Papier original : RO 471 (feuille complète)

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 192 p. 441 v° à 443 v° / C2 : p. 239 à 241

Éditions de Port-Royal : Chap. XXVII - Pensées sur les miracles : 1669 et janv. 1670 p. 228-229 et p. 222-223 / 1678 n° 10 p. 221-222 et n° 5 p. 216

Éditions savantes : Faugère II, 219, XI / Havet XXIII.31, 17 ; XXV.147 ; XXIII. 6 / Brunschvicg 843 / Tourneur p. 142 / Le Guern 684 / Lafuma 840 (série XXXIII, notée XXXII par erreur) / Sellier 425

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Transcription savante (origine : Recueil des originaux)

 

RO 471, feuillet de droite

 

 

 

Ce n’est point icy le pays de la verité elle erre

inconnue, parmy les hommes, nostre rel Dieu l’a couverte

 d’un voile qui la laisse meconoistre a ceux qui n’entendent

      pas sa voix, c’est non s le lieu est ouvert au

       blaspheme & mesme sur des veritez au moins bien

       apparentes si l’on presche publie les veritez de

          l’Evangile, on en publie de contraires & on les 1

obscurcit les questions en sorte en sorte que le peuple

       peut

 ne pourroit discerner. Si des miracles arrivent on

 dit que les miracles& on demande qu’avez vous qui

 vous face 2 plustost croire que les autres. quel

          faittes

 signe faites vous, vous n’avez que des parolles &

    nous aussy, si vous aviez 3 des miracles bien 4. Cela est

    une verité que la doctrine doit estre soutenue par

  les miracles dont on abuse pour blasphemer la doctrine

     & si les miracles arrivent, on dit que les miracles

            suffisent       sans

         ne jugent pas de la doctrine mais & c’est une autre

         verité pour blasphemer les miracles,

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J. C. gairit 5 l’aveuglé né & fit quantité de miracles

                             ou il aveugloit les

au jour du Sabat, par ou les pharisiens qui disoyent

qu’il falloit juger des miracles par la doctrine

 

Notes

 

1 C1 et C: « en ». P. Faugère a corrigé.

2 C1 et C2 puis P. Faugère, E. Havet, L. Brunschvicg et Ph. Sellier : « pour vous faire ». Z. Tourneur a corrigé. M. Le Guern : « qui vous fait ». Voir la transcription diplomatique.

3 C1 et C: « avez ». P. Faugère a corrigé.

4 C1 et C: « bon ». P. Faugère a corrigé.

5 E. Havet : « guérît ».

 

 

RO 471, feuillet de gauche

 

 

 

nous avons Moyse & mais celuy la nous ne savons d’ou il est

     C’est ce qui est admirable que vous ne savez d’ou il est

         & cependant il fait de tels miracles,

-----------

  J. C. ne parloit ni contre dieu ni contre Moyse.

    L’antechrist & les faux prophetes predits par l’un & l’autre

      testament parleront ouvertement contre dieu & contre J. C.

      qui n’est point contre 1 qui seroit ennemy couvert

    dieu ne permettroit pas qu’il fi[s]t 2 des miracles ouvertement.

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    Jamais en une dispute publique ou les deux partys 3

  se disent a dieu a J. C. a l’Eglise les miracles ne sont

    du costé des faux Chrestiens, & l’autre costé sans miracle

  --------------

     Il a le diable Jeh. 10. 21. 4 Et les autres disoyent le diable

       peut il ouvrir les yeux des aveugles

      --------

         Les preuves que J. C. & les apostres tirent de l’escriture ne

                      demonstratives

       sont pas affirmatives car ils disent seulement que Moyse

          a dit qu’un prophete viendroit mais ils ne prouvent 5 pas

            par la que ce soit celuy la, & c’estoit toute la question

            Ces passages ne servent donc qu’a monstrer qu’on n’est pas

            contraire a l’escriture & qu’il n’y paroist point de

             repugnance mais non pas qu’il y ayt accord.

             or cela suffit, exclusion de repugnance avec 6 miracles

            ------

 

Notes

 

1 P. Faugère puis E. Havet  n’ont pas pu lire ces deux derniers mots. L. Brunschvicg : « qui n’est point caché... ». Z. Tourneur a corrigé en confirmant la transcription des Copies.

2 Pascal puis C1 et C2 et P. Faugère : « fit » au lieu de « fît » (subjonctif). E. Havet a corrigé.

3 C1 et C2 puis L. Brunschvicg : « parties ». P. Faugère a corrigé.

4 C1 et C: « Johan 20. 21 ». P. Faugère : « Jeh. 20, 21 » et signale en note le texte référencé « Joan. X. 20, 21 ». E. Havet : « Joh. XX, 21 ». L. Brunschvicg : « Joh., X, 21 » et précise en note « Verset 20 ». Z. Tourneur : « Jeh. 10. 21 ». M. Le Guern : « Jean, X, 21 ». Ph. Sellier signale que la citation Il a le diable est tirée de Jean, X, 20, et que Et les autres disaient : Le diable peut‑il ouvrir les yeux des aveugles ? est tirée de Jean, X, 21.

5 C1 et C: « il ne promet ». P. Faugère a corrigé.

6 L. Lafuma : « avant ».

 

Premières éditions et copies des XVIIe - XVIIIe siècles et du début du XIXe

 

Une grande partie du fragment a été retenue dans le chapitre Pensées sur les miracles de l’édition de Port-Royal.

 

Voir cette étude...

 

La copie Périer reproduit un paragraphe non retenu dans l’édition, p. 130 : (en rouge : différences par rapport à C1 et C2)

Ce n’est point ici le païs de la vérité. Elle est inconnue parmi les hommes. Dieu l’a couverte d’un voile qui la laissé méconnoitre à ceux qui n’entendent pas sa voix. le lieu est ouvert au blaspheme et même sur des vérités                                                [saut du même au même sur le mot vérités] l’Evangile on en publie de contraires, et on en obscurcit les questions : en sorte que le Peuple ne peut discerner, Et on demande qu’avez vous fait plutôt croire que les autres ? Quel signe faites vous ? Vous n’avez que des paroles, et nous aussi ; si vous avez des miracles, bon. Cela est une vérité que la doctrine doit être soutenuë par les miracles dont on abuse pour blasphémer la doctrine ; et si les miracles arrivent, on dit que les miracles ne suffisent pas sans la doctrine ; et c’est une autre vérité pour blasphémer les miracles.

Autre copie :

Copie de Marie-Scolastique Le Sesne de Ménilles de Théméricourt, p. 62 :

Ce n’est point icy le pays de la verité, elle est inconnue parmi les hommes, Dieu l’a couverte d’un voile qui la laisse meconnoitre aceux qui n’entendent pas sa voix : Le lieu est ouvert au blasphême, et même sur des veritez au moins bien apparentes ; Si l’on publie les veritez de l’Evangile, on en publie de contraires, et on en obscurcit les questions, en sorte que le peuple ne peut discerner, et on demande qu’avez vous pour vous faire plutost croire que les autres ? quel signe faites vous ? Vous n’avez que des paroles et nous aussi ; Si vous avez des miracles, bon, Cela est une verité que la doctrine doit être soutenue par les miracles dont on abuse pour blasphemer la doctrine, et si les miracles arrivent on dit que les miracles ne suffisent pas sans la doctrine, et cest une autre verité pour blasphemer les miracles.

Jamais dans une dispute publique ou les deux partis se disent a Dieu, a J.C. a l’Eglise, les miracles ne sont du côté des faux chretiens, et l’autre côté sans miracles.

Les preuves que les apôtres  et J.C.                tirent de l’Ecriture, ne sont pas demonstratives ; Car ils disent seulement que Moyse a dit qu’un Prophete viendroit ; mais il ne promet pas       là que c’etoit celui là : et c’etoit toute la question ; Ces passages ne servent donc qu’a montrer qu’on n’est pas contraire a l’Ecriture, et qu’il n’y paroit point de repugnance, mais non pas quil y ait accord ; or cela suffit, exclusion de repugnance aux miracles.

La copie de l’Oratoire de Troyes (p. 39) reproduit le deuxième § de la copie Théméricourt avec une correction (par là) et une petite différence (pas) :

Jamais dans une dispute publique, où les deux partis se disent à Dieu, à Jésuschrist, à l’église, les miracles ne sont du côté des faux chrétiens, et l’autre côté sans miracles.

Les Preuves que les apôtres et Jésuschrist                tirent de l’écriture ne sont pas démonstratives, car ils disent seulement que Moyse a dit qu’un prophéte viendroit ; mais il ne promet pas par là que c’étoit celuylà, et c’étoit toute la questîon. ces passages ne servent donc qu’à montrer qu’on n’est pas contraire à l’écriture, et qu’il n’y paroit pas de repugnance, mais non pas qu’il y ait accord. or cela sufit, exclusion de répugnance aux miracles.

1ers éditeurs :

Les fragments sur les miracles ont servi à l’élaboration de la Troisième lettre à M. L’évêque de Soissons à l’occasion du miracle opéré à Paris dans la paroisse de Sainte-Marguerite par Mgr Colbert de Croissy, intitulée Pensées de M. Pascal sur les miracles, dont il n’y a eu jusqu’ici qu’une partie d’imprimée. 1727. Voir Lafuma Louis, Histoire des Pensées de Pascal (1656-1952), Paris, Éditions du Luxembourg, 1954, p. 45. Le texte des fragments publiés dans cette lettre est reproduit dans l’édition des Pensées de Port-Royal donnée par Georges Couton et Jean Jehasse, Centre Interuniversitaire d’éditions et de rééditions, coll. Images et témoins de l’âge classique, Université de la région Rhône-Alpes, Saint-Étienne, 1971. Voir p. 528 sq. Ces pensées ont été reprises dans les Œuvres de Colbert de Croissy (évêque de Montpellier), 1740, t. II, p. 265 sq.

V. Cousin, Rapport (1842), p. 151, cite le début du premier § uniquement pour signaler que Bossut « affaiblit le style de Pascal » :

Ce n’est point ici le pays de la vérité ; elle erre inconnue parmi les hommes...

alors que Bossut (I, I, selon Cousin) édite « Elle est inconnue parmi les hommes ». En fait, Bossut reproduit la lettre de Colbert (voir ci-dessus) qui a pris lui-même le texte dans la copie Périer (qui transcrit est inconnue). Bossut (1779) édite cette lettre dans le tome II, Seconde partie, Art. XVI, n° IX et X, p. 322-329. L’extrait que cite Cousin est situé p. 324.

 

Remarques

 

P. Faugère ajoute la glose de l’édition de Port-Royal : « Il s’ensuit donc, qu’il jugeait que ses miracles étaient des preuves certaines de ce qu’il enseignait, et que les Juifs avaient obligation de le croire. Et, en effet, c’est particulièrement les miracles qui rendaient les Juifs coupables dans leur incrédulité. »

E. Havet ne publie pas la note Jamais en une dispute publique où les deux partis se disent à Dieu, à Jésus-Christ, à l’Église, les miracles ne sont du côté des faux chrétiens, et l’autre côté sans miracle.

G. Michaut puis L. Brunschvicg, L. Lafuma et M. Le Guern regroupent ce fragment avec le fragment n° 7 du même dossier (Sel. 428). Ces deux fragments sont écrits sur des feuilles complètes.

 

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