Pensées - page 157
lumière que celle qu’il trouve dans sa
nature.
Les principales raisons des Pyrrhoniens
sont, que nous n’avons aucune
certitude de la vérité des principes,
hors la foi et la révélation, sinon en
ce que nous les sentons naturellement
en nous. Or ce sentiment naturel n’est
pas une preuve convaincante de leur
vérité ; puisque n’y ayant point de
certitude hors la foi, si l’homme est
créé par un Dieu bon, ou par un démon
méchant, s’il a été de tout
temps, ou s’il s’est fait par hasard, il
est en doute si ces principes nous sont
donnés ou véritables, ou faux, ou
incertains selon notre origine. De
plus, que personne n’a d’assurance
hors la foi, s’il veille, ou s’il dort ;
vu que durant le sommeil on ne croit
pas moins fermement veiller, qu’en
veillant effectivement. On croit voir
les espaces, les figures, les mouvements ;
on sent couler le temps, on le
mesure ; et enfin on agit de même
qu’éveillé. De sorte que la moitié de
la vie se passant en sommeil par notre
propre aveu, où, quoi qu’il nous en
paraisse, nous n’avons aucune idée du |