L’édition de Port-Royal de 1678

 

 

 

Pensées - page 170

petit cachot où il se trouve logé, c’est-

à-dire ce monde visible, il apprenne

à estimer la Terre, les Royaumes,

les villes, et soi-même son juste prix.

Qu’est-ce qu’un homme dans l’infini ?

Qui le peut comprendre ? Mais

pour lui présenter un autre prodige

aussi étonnant, qu’il recherche dans ce

qu’il connaît les choses les plus délicates.

Qu’un ciron, par exemple,

lui offre dans la petitesse de son corps

des parties incomparablement plus petites,

des jambes avec des jointures,

des veines dans ces jambes, du sang

dans ces veines, des humeurs dans ce

sang, des gouttes dans ces humeurs,

des vapeurs dans ces gouttes. Que divisant

encore ces dernières choses, il

épuise ses forces, et ses conceptions ;

et que le dernier objet où il peut arriver

soit maintenant celui de notre

discours. Il pensera peut-être, que

c’est là l’extrême petitesse de la nature.

Je veux lui faire voir là-dedans

un abîme nouveau. Je veux lui peindre

non seulement l’univers visible,

mais encore tout ce qu’il est capable

de concevoir de l’immensité de la nature,

dans l’enceinte de cet atome imperceptible.

 

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