L’édition de Port-Royal de 1678

 

 

 

Pensées - page 205

qu’ils ne se connaissent pas eux-mêmes.

Un Gentilhomme croit sincèrement

qu’il y a quelque chose de grand

et de noble dans la chasse : il dira, que

c’est un plaisir royal. Il en est de

même des autres choses dont la

plupart des hommes s’occupent. On

s’imagine qu’il y a quelque chose de

réel et de solide dans les objets mêmes.

On se persuade que si l’on avait

obtenu cette charge, on se reposerait

ensuite avec plaisir : et l’on ne sent

pas la nature insatiable de sa cupidité.

On croit chercher sincèrement le

repos ; et l’on ne cherche en effet que

l’agitation.

Les hommes ont un instinct secret

qui les porte à chercher le divertissement

et l’occupation au-dehors, qui

vient du ressentiment de leur misère

continuelle. Et ils ont un autre instinct

secret qui reste de la grandeur

de leur première nature, qui leur fait

connaître, que le bonheur n’est en

effet que dans le repos. Et de ces deux

instincts contraires, il se forme en eux

un projet confus, qui se cache à leur

vue dans le fond de leur âme, qui

les porte à tendre au repos par l’agitation,

 

 

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