Pensées - page 267
XXIX.
Pensées Morales.
1. Les sciences ont deux extrémités
qui se touchent. La première
est la pure ignorance naturelle, où se
trouvent tous les hommes en naissant.
L’autre extrémité est celle où arrivent
les grandes âmes, qui ayant parcouru
tout ce que les hommes peuvent
savoir, trouvent qu’ils ne savent
rien, et se rencontrent dans cette
même ignorance d’où ils étaient
partis. Mais c’est une ignorance savante
qui se connaît. Ceux d’entre-
deux qui sont sortis de l’ignorance
naturelle, et n’ont pu arriver à l’autre,
ont quelque teinture de cette science
suffisante, et font les entendus. Ceux-
là troublent le monde, et jugent plus
mal de tout que les autres. Le peuple
et les habiles composent pour l’ordinaire
le train du monde. Les autres le
méprisent, et en sont méprisés.
2. Le peuple honore les personnes
|