Pensées - page 278
à tous nos besoins.
23. Quand on se porte bien, on
ne comprend pas comment on pourrait
faire si on était malade ; et quand
on l’est, on prend médecine gaiement ;
le mal y résout. On n’a plus les
passions et les désirs des divertissements
et des promenades, que la santé
donnait, et qui sont incompatibles
avec les nécessités de la maladie. La
nature donne alors des passions et des
désirs conformes à l’état présent. Ce
ne sont que les craintes que nous
nous donnons nous-mêmes, et non
pas la nature, qui nous troublent ; parce
qu’elles joignent à l’état où nous
sommes, les passions de l’état où
nous ne sommes pas.
24. Les discours d’humilité sont
matière d’orgueil aux gens glorieux,
et d’humilité aux humbles. Aussi ceux
de Pyrronisme et de doute sont matière
d’affirmation aux affirmatifs.
Peu de gens parlent de l’humilité
humblement ; peu de la chasteté
chastement ; peu du doute en doutant.
Nous ne sommes que mensonge, duplicité,
contrariétés. Nous nous cachons
et nous déguisons à nous- |