Fragment Loi figurative n° 20 / 31  – Papier original : RO 35-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Loi figurative n° 306 p. 131 / C2 : p. 158

Éditions savantes : Faugère II, 254 (note) / Brunschvicg 677 / Tourneur p. 261-4 / Le Guern 248 / Lafuma 265 / Sellier 296

 

 

 

Figure porte absence et présence, plaisir et déplaisir.

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Chiffre a double sens. Un clair et où il est dit que le sens est caché.

 

 

Deux notes brèves, énigmatiques en apparence, mais bien à leur place dans cette liasse, puisque Pascal y condense des idées qui se trouvent développées dans plusieurs fragments de Loi figurative.

Pour éclaircir la notion de figure, Pascal la présente comme un cas particulier de la théorie de la représentation picturale ; puisque, comme toute métaphore, les figures rhétoriques de la Bible évoquent par imitation l’objet qu’elles représentent, il les traite comme des portraits, qui donnent à ceux qui les regardent à la fois le plaisir de voir les choses représentées, mais aussi le déplaisir de sentir leur absence réelle. Cette audacieuse définition lui permet, dans le fragment Loi figurative 14 (Laf. 259, Sel. 290), de montrer que le texte du vieux Testament est figuratif.

Mais il y est aussi expliqué que, si le vieux Testament est un chiffre (Loi figurative 31 - Laf. 276, Sel. 307), par lequel les prophètes s’exprimaient en figures dont le sens spirituel était caché sous des expressions charnelles, ce chiffre n’était pas si obscur qu’il ne s’y trouve des passages clairs qui en donnent la clé.

 

Analyse détaillée...

Fragments connexes

 

Loi figurative 5 (Laf. 249, Sel. 281). Figuratives. Clé du chiffre.

Loi figurative 14 (Laf. 259, Sel. 290). Figure.

Si la loi et les sacrifices sont la vérité il faut qu'elle plaise à Dieu et qu'elle ne lui déplaise point. S'ils sont figures il faut qu'ils plaisent et déplaisent.

Or dans toute l'Écriture ils plaisent et déplaisent. Il est dit que la loi sera changée, que le sacrifice sera changé, qu'ils seront sans roi, sans princes et sans sacrifices, qu'il sera fait une nouvelle alliance, que la loi sera renouvelée, que les préceptes qu'ils ont reçus ne sont pas bons, que leurs sacrifices sont abominables, que Dieu n'en a point demandé.

Il est dit au contraire que la loi durera éternellement, que cette alliance sera éternelle, que le sacrifice sera éternel, que le sceptre ne sortira jamais d'avec eux, puisqu'il n'en doit point sortir que le roi éternel n'arrive.

Tous ces passages marquent-ils que ce soit réalité ? non ; marquent-ils aussi que ce soit figure ? non, mais que c'est réalité ou figure ; mais les premiers excluant la réalité marquent que ce n'est que figure.

Tous ces passages ensemble ne peuvent être dits de la réalité ; tous peuvent être dits de la figure. Ils ne sont pas dits de la réalité mais de la figure.

Loi figurative 15 (Laf. 260, Sel. 291). Un portrait porte absence et présence, plaisir et déplaisir. La réalité exclut absence et déplaisir.

Figures.

Pour savoir si la loi et les sacrifices sont réalité ou figure il faut voir si les prophètes en parlant de ces choses y arrêtaient leur vue et leur pensée, en sorte qu’ils n’y vissent que cette ancienne alliance, ou s’ils y voient quelque autre chose dont elle fût la peinture. Car dans un portrait on voit la chose figurée. Il ne faut pour cela qu’examiner ce qu’ils en disent.

Quand ils disent qu’elle sera éternelle entendent-ils parler de l’alliance de laquelle ils disent qu’elle sera changée et de même des sacrifices, etc.

Le chiffre a deux sens. Quand on surprend une lettre importante où l’on trouve un sens clair, et où il est dit néanmoins que le sens en est voilé et obscurci, qu’il est caché en sorte qu’on verra cette lettre sans la voir et qu’on l’entendra sans l’entendre, que doit-on penser sinon que c’est un chiffre à double sens.

Les prophètes ont dit clairement qu’Israël serait toujours aimé de Dieu et que la loi serait éternelle et ils ont dit que l’on n’entendrait point leur sens et qu’il était voilé.

Et d’autant plus qu’on y trouve des contrariétés manifestes dans le sens littéral. Combien doit-on donc estimer ceux qui nous découvrent le chiffre et nous apprennent à connaître le sens caché, et principalement quand les principes qu’ils en prennent sont tout à fait naturels et clairs ? C’est ce qu’a fait Jésus-Christ et les apôtres. Ils ont levé le sceau. Il a rompu le voile et a découvert l’esprit. Ils nous ont appris pour cela que les ennemis de l’homme sont ses passions, que le rédempteur serait spirituel et son règne spirituel, qu’il y aurait deux avènements, l’un de misère pour abaisser l’homme superbe, l’autre de gloire pour élever l’homme humilié, que Jésus-Christ serait Dieu et homme.

Loi figurative 23 (Laf. 268, Sel. 299). Figures. La lettre tue. Tout arrivait en figures. Il fallait que le Christ souffrît. Un Dieu humilié. Voilà le chiffre que saint Paul nous donne.

Loi figurative 31 (Laf. 276, Sel. 307). Le vieux testament est un chiffre.

Pensées diverses (Laf. 557, Sel. 465). Les langues sont des chiffres où, non les lettres sont changées en lettres, mais les mots en mots. De sorte qu’une langue inconnue est déchiffrable.

 

Mots-clés : Absence – Cacher – Chiffre – Clair – FigurePlaisirPrésenceSens.