Fragment Prophéties n° 19 / 27 – Papier original : RO 229-2
Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Prophéties n° 358 p. 171 / C2 : p. 204
Éditions de Port-Royal : Chap. XV - Preuves de Jésus-Christ par les prophéties : 1669 et janvier 1670 p. 125 / 1678 n° 14 p. 126
Éditions savantes : Faugère II, 202, XXIII / Havet XVIII.21 / Brunschvicg 720 / Tourneur p. 287-2 / Le Guern 321 / Lafuma 340 / Sellier 372
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Bibliographie ✍
Le saint Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean, XIX, 15, Bruxelles, Fricx, 1698, p. 735, et la note, p. 478. |
✧ Éclaircissements
Non habemus regem nisi Cæsarem. Donc Jésus-Christ était le Messie puisqu’ils n’avaient plus de roi qu’un étranger et qu’ils n’en voulaient point d’autre.
L’argument se comprend à partir de la prophétie de Jacob, Genèse, XLIX, 10, lorsqu’il disait que « le sceptre ne sera point ôté de Juda, ni le prince de sa postérité, jusqu’à ce que celui qui doit être envoyé soit venu ; et c’est lui qui sera l’attente des nations » (tr. Sacy). Voir Preuves de Jésus-Christ 19 (Laf. 317, Sel. 348) : J.-C. prédit quant au temps et à l’état du monde. Le duc ôté de la cuisse, et la 4e monarchie.
Prophéties 18 (Laf. 339, Sel. 371). Les prophètes ayant donné diverses marques qui devaient toutes arriver à l’avènement du Messie il fallait que toutes ces marques arrivassent en même temps. Ainsi il fallait que la quatrième monarchie fût venue lorsque les septante semaines de Danielseraient accomplies et que le sceptre fût alors ôté de Juda.
Sur la prophétie de Jacob, voir Loi figurative 14 (Laf. 259, Sel. 290). Figure. [...] Il est dit que la loi sera changée, que le sacrifice sera changé, qu’ils seront sans roi, sans princes et sans sacrifices, qu’il sera fait une nouvelle alliance, que la loi sera renouvelée, que les préceptes qu’ils ont reçus ne sont pas bons, que leurs sacrifices sont abominables, que Dieu n’en a point demandé. Il est dit au contraire que la loi durera éternellement, que cette alliance sera éternelle, que le sacrifice sera éternel, que le sceptre ne sortira jamais d’avec eux, puisqu’il n’en doit point sortir que le roi éternel n’arrive.
L’argument peut paraitre étrange. D’ordinaire, ce n’est pas l’empereur de Rome (Vespasien en l’occurrence) que l’on mentionne pour répondre à la prophétie de Jacob.
C’est Hérode, étranger, puisqu’il était est Iduméen, qui servait de preuve que le Messie était venu en la personne du Christ.
Mais Pascal cite ici l’exclamation des Juifs eux-mêmes, lorsqu’ils ont récusé Jésus comme roi. En déclarant eux-mêmes qu’ils ne reconnaissaient pour roi qu’un étranger, les Juifs auraient dû comprendre que, selon la prophétie de Jacob, leur déclaration même signifiait que le Messie était arrivé, et qu’il ne pouvait être que Jésus-Christ.
L’argument ne prouve rien objectivement : c’est bien Hérode le roi étranger qui remplit la prophétie de Jacob. Mais il constitue une réfutation par rétorsion : puisque les Juifs déclarent n’admettre que César pour souverain, ils auraient dû penser que le sceptre s’était éloigné de Juda, donc que le Messie était arrivé. En d’autres termes, c’est contre leurs principes mêmes qu’ils n’ont pas voulu voir que l’avènement du Messie était réalisé. C’est donc leur cœur mauvais qui les a poussés à méconnaître le Messie en Jésus-Christ.
Le commentaire de Sacy dans les notes sur Jean, XIX, 15, s’oriente dans une direction différente : « Ce que les princes des prêtres répondirent à Pilate en lui disant : Qu’ils n’avaient de roi que César, était, selon saint Cyrille, un renoncement public au privilège dont ils se glorifiaient, d’avoir Dieu pour roi. Eux qui en parlant à Jésus-Christ même s’étaient vantés de n’avoir jamais été assujettis à qui que ce soit, se font un mérite présentement de reconnaître César pour leur souverain, et de n’en reconnaître point d’autre. Ils attendaient de tout temps le Christ, qui devait être leur chef et leur prince, pour rétablir le royaume d’Israël : mais ils renoncent ici à le reconnaître pour leur roi, n’en voulant point d’autre que César. Ainsi ç’a été très justement, comme disent les saints Pères, qu’Israël ayant rejeté le règne de Dieu, et lui ayant préféré celui de César, il a été dans la suite livré à la puissance de César, pour être détruit d’une manière si funeste ». Pascal s’oriente dans une direction toute différente.