Pensées diverses III – Fragment n° 68 / 85 – Papier original : RO 437-7

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 143 p. 381 v° / C2 : p. 341

Éditions savantes : Faugère I, 214, CXVII / Havet XXV.58 / Brunschvicg 215 / Tourneur p. 108-5 / Le Guern 609 / Lafuma 716 (série XXV) / Sellier 594

 

 

 

Craindre la mort hors du péril et non dans le péril, car il faut être homme.

 

 

Paradoxe qui inverse le lieu commun que la mort est à craindre dans le danger, mais que hors du péril, il n’y a pas lieu d’avoir peur.

 

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Fragments connexes

 

Divertissement 2 (Laf. 133, Sel. 166). Divertissement.

Les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser.

Divertissement 4 (Laf. 136, Sel. 168). Divertissement.

[...]

Mais quand j’ai pensé de plus près et qu’après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs j’ai voulu en découvrir la raison, j’ai trouvé qu’il y en a une bien effective et qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle et si misérable que rien ne peut nous consoler lorsque nous y pensons de près.

Commencement 5 (Laf. 154, Sel. 187). Partis.

Il faut vivre autrement dans le monde, selon ces diverses suppositions.

1. s’il est sûr qu’on y sera toujours. Si on pouvait y être toujours.

2. s’il est incertain si on y sera toujours ou non.

3. s’il est sûr qu’on n’y sera pas toujours mais qu’on soit assuré d’y être longtemps.

4. s’il est certain qu’on n’y sera pas toujours et incertain si on y sera pas longtemps.

5. s’il est sûr qu’on n’y sera pas longtemps, et incertain si on y sera une heure.

Cette dernière supposition est la nôtre.

Preuves par discours II (Laf. 427, Sel. 681). Il ne faut pas avoir l’âme fort élevée pour comprendre qu’il n’y a point ici de satisfaction véritable et solide, que tous nos plaisirs ne sont que vanité, que nos maux sont infinis, et qu’enfin la mort, qui nous menace à chaque instant, doit infailliblement nous mettre, dans peu d’années, dans l’horrible nécessité d’être éternellement ou anéantis ou malheureux.

Il n’y a rien de plus réel que cela, ni de plus terrible. Faisons tant que nous voudrons les braves : voilà la fin qui attend la plus belle vie du monde. Qu’on fasse réflexion là-dessus, et qu’on dise ensuite s’il n’est pas indubitable qu’il n’y a de bien en cette vie qu’en l’espérance d’une autre vie, qu’on n’est heureux qu’à mesure qu’on s’en approche, et que, comme il n’y aura plus de malheurs pour ceux qui avaient une entière assurance de l’éternité, il n’y a point aussi de bonheur pour ceux qui n’en ont aucune lumière.

 

2e ms Guerrier et ms Joly de Fleury (Laf. 984, Sel. 781). Mort soudaine seule à craindre, et c’est pourquoi les confesseurs demeurent chez les Grands.

 

Mots-clés : Crainte – HommeMort (voir Mourir)Péril.