L’édition de Port-Royal de 1678

 

 

 

Pensées - page 6

qu’enfin la mort qui nous menace à

chaque instant nous doit mettre dans

peu d’années, et peut-être en peu de

jours dans un état éternel de bonheur,

ou de malheur, ou d’anéantissement.

Entre nous et le ciel, l’enfer, ou le

néant il n’y a donc que la vie qui est

la chose du monde la plus fragile ; et

le ciel n’étant pas certainement pour

ceux qui doutent si leur âme est immortelle,

ils n’ont à attendre que l’enfer

ou le néant.

Il n’y a rien de plus réel que cela ni

de plus terrible. Faisons tant que nous

voudrons les braves, voilà la fin qui

attend la plus belle vie du monde.

C’est en vain qu’ils détournent leur

pensée de cette éternité qui les attend,

comme s’ils la pouvaient anéantir en

n’y pensant point. Elle subsiste malgré

eux, elle s’avance, et la mort qui

la doit ouvrir les mettra infailliblement

dans peu de temps dans l’horrible

nécessité d’être éternellement ou

anéantis, ou malheureux.

Voilà un doute d’une terrible conséquence ;

et c’est déjà assurément un

très grand mal que d’être dans ce

doute ; mais c’est au moins un devoir

 

 

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