Pensées - page 182
qui fait cela, et qui entraîne la nature.
Mais quelquefois aussi la nature
la surmonte, et retient l’homme
dans son instinct, malgré toute la
coutume bonne ou mauvaise.
9. La curiosité n’est que vanité.
Le plus souvent on ne veut savoir
que pour en parler. On ne voyagerait
pas sur la mer pour ne jamais en
rien dire, et pour le seul plaisir de
voir, sans espérance de s’en entretenir
jamais avec personne.
10. On ne se soucie pas d’être
estimé dans les villes où l’on ne fait
que passer ; mais quand on y doit demeurer
un peu de temps on s’en soucie.
Combien de temps faut-il ? Un
temps proportionné à notre durée
vaine et chétive.
11. Peu de chose nous console ;
parce que peu de chose nous afflige.
12. Nous ne nous tenons jamais
au présent. Nous anticipons l’avenir
comme trop lent, et comme pour le
hâter ; ou nous rappelons le passé
pour l’arrêter comme trop prompt.
Si imprudents, que nous errons dans
les temps qui ne sont pas à nous, et
ne pensons point au seul qui nous appartient : |