Pensées diverses II – Fragment n° 19 / 37 – Papier original : RO 1-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 109 p. 357  / C2 : p. 313

Éditions savantes : Faugère II, 89, XXIII / Brunschvicg 660 / Tourneur p. 90-4 / Le Guern 523 / Lafuma 616 (série XXIV) / Sellier 509

 

 

 

La concupiscence nous est devenue naturelle et a fait notre seconde nature. Ainsi il y a deux natures en nous, l’une bonne, l’autre mauvaise. Où est Dieu ? Où vous n’êtes pas, et Le royaume de Dieu est dans vous.

Rabbins.

 

 

Ce bref fragment concentre un nombre considérable de thèmes : la corruption de la nature de l’homme par la concupiscence, et le mode de présence de Dieu à l’homme, mais aussi, indirectement, les manières dont les facultés déréglées par la concupiscence engendrent une seconde nature.

 

Analyse détaillée...

 

Fragments connexes

 

Vanité 31 (Laf. 44, Sel. 78). Imagination.

[...].

Cette superbe puissance ennemie de la raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses, a établi dans l’homme une seconde nature.

Contrariétés 9 (Laf. 126, Sel. 159)Les pères craignent que l’amour naturel des enfants ne s’efface. Quelle est donc cette nature sujette à être effacée ?

La coutume est une seconde nature qui détruit la première.

Mais qu’est-ce que nature ? Pourquoi la coutume n’est-elle pas naturelle ?

J’ai grand peur que cette nature ne soit elle-même qu’une première coutume, comme la coutume est une seconde nature.

A P. R. 1 (Laf. 149, Sel. 182). À P.R.

Commencement, après avoir expliqué l’incompréhensibilité.

Les grandeurs et les misères de l’homme sont tellement visibles qu’il faut nécessairement que la véritable religion nous enseigne et qu’il y a quelque grand principe de grandeur en l’homme et qu’il y a un grand principe de misère.

[...]

De ce principe que je vous ouvre vous pouvez reconnaître la cause de tant de contrariétés qui ont étonné tous les hommes et qui les ont partagés en de si divers sentiments. Observez maintenant tous les mouvements de grandeur et de gloire que l’épreuve de tant de misères ne peut étouffer et voyez s’il ne faut pas que la cause en soit en une autre nature.

Rabbinage 2 (Laf. 278, Sel. 309). Sur le mot de la Genèse 8, la composition du cœur de l’homme est mauvaise dès son enfance.

R. Moïse Haddarschan : Ce mauvais levain est mis dans l’homme dès l’heure où il est formé.

Massechet Succa : Ce mauvais levain a sept noms : dans l’Écriture il est appelé mal, prépuce, immonde, ennemi, scandale, cœur de pierre, aquilon, tout cela signifie la malignité qui est cachée et empreinte dans le cœur de l’homme.

Cette malignité se renouvelle tous les jours contre l’homme comme il est écrit Ps. 37 : L’impie observe le juste et cherche à le faire mourir, mais Dieu ne l’abandonnera point.

Cette malignité tente le cœur de l’homme en cette vie et l’accusera en l’autre.

Tout cela se trouve dans le Talmud.

Dossier de travail (Laf. 407, Sel. 26). Les stoïques disent : « Rentrez au dedans de vous-même, c’est là où vous trouverez votre repos. » Et cela n’est pas vrai.

Les autres disent : « Sortez dehors et cherchez le bonheur en un divertissement. » Et cela n’est pas vrai, les maladies viennent.

Le bonheur n’est ni hors de nous ni dans nous ; il est en Dieu et hors et dans nous.

Pensées diverses (Laf. 564, Sel. 471). La vraie et unique vertu est donc de se haïr, car on est haïssable par sa concupiscence, et de chercher un être véritablement aimable pour l’aimer. Mais comme nous ne pouvons aimer ce qui est hors de nous, il faut aimer un être qui soit en nous, et qui ne soit pas nous. Et cela est vrai d’un chacun de tous les hommes. Or il n’y a que l’être universel qui soit tel. Le royaume de Dieu est en nous. Le bien universel est en nous, est nous-même et n’est pas nous.

Pensées diverses (Laf. 630, Sel. 523). La nature de l’homme est tout nature, omne animal.

Il n’y a rien qu’on ne rende naturel. Il n’y a naturel qu’on ne fasse perdre.

 

Mots-clés : ConcupiscenceDieuNatureRabbinRoyaume.