Pensées diverses III – Fragment n° 37 / 85 – Papier original : RO 427-10

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 126 p. 373 / C2 : p. 331

Éditions savantes : Faugère II, 388 / Havet VI.25 bis / Brunschvicg 21 / Tourneur p. 102-3 / Le Guern 578 / Lafuma 684 (série XXV) / Sellier 563

 

 

 

Ordre.

 

La nature a mis toutes ses vérités chacune en soi-même. Notre art les renferme les unes dans les autres, mais cela n’est pas naturel. Chacune tient sa place.

 

 

Ce fragment porte, comme le précédent, dont la lecture préalable est nécessaire, sur la manière dont la pensée humaine déforme les rapports naturels entre les vérités.

 

Analyse détaillée...

 

Fragments connexes

 

Misère 14 (Laf. 65, Sel. 99). Diversité.

La théologie est une science, mais en même temps combien est-ce de sciences ? Un homme est un suppôt, mais si on l’anatomise, que sera-ce ? la tête, le cœur, l’estomac, les veines, chaque veine, chaque portion de veine, le sang, chaque humeur du sang ?

Une ville, une campagne, de loin c’est une ville et une campagne, mais à mesure qu’on s’approche, ce sont des maisons, des arbres, des tuiles, des feuilles, des herbes, des fourmis, des jambes de fourmis, à l’infini. Tout cela s’enveloppe sous le nom de campagne.

Pensées diverses (Laf. 532, Sel. 457). Pyrr[honisme].

J’écrirai ici mes pensées sans ordre et non pas peut-être dans une confusion sans dessein. C’est le véritable ordre et qui marquera toujours mon objet par le désordre même. Je ferais trop d’honneur à mon sujet si je le traitais avec ordre puisque je veux montrer qu’il en est incapable.

Pensées diverses (Laf. 683, Sel. 562). Ordre.

Pourquoi prendrai-je plutôt à diviser ma morale en quatre qu’en six ? Pourquoi établirai-je plutôt la vertu en quatre, en deux, en un ? Pourquoi en abstine et sustine plutôt qu’en suivre nature ou faire ses affaires particulières sans injustice comme Platon, ou autre chose ?

Mais voilà, direz-vous, tout renfermé en un mot : oui mais cela est inutile si on ne l’explique. Et quand on vient à l’expliquer, dès qu’on ouvre ce précepte qui contient tous les autres ils en sortent en la première confusion que vous vouliez éviter. Ainsi quand ils sont tous renfermés en un ils y sont cachés et inutiles, comme en un coffre et ne paraissent jamais qu’en leur confusion naturelle. La nature les a tous établis, sans renfermer l’un en l’autre.

Pensées diverses (Laf. 694, Sel. 573). Ordre.

J’aurais bien pris ce discours d’ordre comme celui-ci : pour montrer la vanité de toutes sortes de conditions, montrer la vanité des vies communes, et puis la vanité des vies philosophiques, pyrrhoniennes, stoïques ; mais l’ordre n’y serait pas gardé. Je sais un peu ce que c’est, et combien peu de gens l’entendent. Nulle science humaine ne le peut garder. Saint Thomas ne l’a pas gardé. La mathématique le garde, mais elle est inutile en sa profondeur.

 

Mots-clés : Art NatureOrdrePlaceVérité.