Fragment Commencement n° 8 / 16 – Papier original : RO 65-1
Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Commencement n° 221 p. 77 v° / C2 : p. 104
Éditions de Port-Royal : Chap. XXVIII - Pensées Chrétiennes : 1669 et janv. 1670 p. 247 / 1678 n° 21 p. 239
Éditions savantes : Faugère II, 173, II / Havet XXIV.17 / Brunschvicg 236 / Tourneur p. 227-1 / Le Guern 147 / Lafuma 158 / Sellier 190
Par les partis vous devez vous mettre en peine de rechercher la vérité, car si vous mourez sans adorer le vrai principe vous êtes perdu. Mais, dites‑vous, s’il avait voulu que je l’adorasse il m’aurait laissé des signes de sa volonté. Aussi a‑t‑il fait, mais vous les négligez. Cherchez-les donc, cela le vaut bien.
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Ce fragment est lié à l’argument du pari, dans la mesure où il repose sur l’idée de parti (Preuves par discours I - Laf. 418, Sel. 680). Il repose apparemment sur l’idée de la crainte de l’enfer : l’athée qui, post mortem, s’apercevra qu’il s’est trompé et tombe entre les mains d’un Dieu irrité (Preuves par discours II - Laf. 427, Sel. 681) aura fait un très mauvais calcul. Mais Pascal n’en conclut pas qu’il faut croire, car cet argument ne pourrait engendrer qu’une foi intéressée, donc sans valeur, mais seulement qu’il est de l’intérêt le plus évident de chercher la vérité.
Dans ce dialogue, la réponse de l’athée consiste à objecter que, dans l’hypothèse où un Dieu exigerait des hommes qu’ils le cherchent, il leur aurait accordé des moyens de le trouver. L’objection ne vise naturellement pas à accuser un Dieu auquel l’incrédule ne croit pas, mais à pointer une incohérence de la doctrine chrétienne.
Pascal répond que c’est effectivement le cas, mais que c’est parce que l’athée ne prend pas la peine de les chercher qu’il ne les voit pas, ce qui revient à faire peser sur lui la responsabilité de sa passivité. La conclusion est que la recherche, qui est toujours au pouvoir de l’homme, s’impose au nom de la plus élémentaire prudence humaine.
La suite logique de ce fragment se trouve dans Preuves par discours I (Laf. 418, Sel. 680), “Infini rien”, qui propose l’argument du pari.
Fragments connexes
Commencement 4 (Laf. 153, Sel. 186). Que me promettez-vous enfin, car dix ans est le parti, sinon dix ans d'amour-propre à bien essayer de plaire sans y réussir, outre les peines certaines.
Commencement 5 (Laf. 154, Sel. 187). Partis. Il faut vivre autrement dans le monde, selon ces diverses suppositions :
1. Si on pouvait y être toujours.
2. S’il est incertain si on y sera toujours ou non. (barré verticalement)
Faux (barré verticalement)
3. S’il est sûr qu’on n’y sera pas toujours, mais qu’on soit assuré d’y être longtemps. (barré verticalement)
4. S’il est certain qu’on n’y sera pas toujours et incertain si on y sera longtemps. (barré verticalement)
5. S’il est sûr qu’on n’y sera pas longtemps, et incertain si on y sera une heure.
Cette dernière supposition est la nôtre.
Fondement 21 (Laf. 244, Sel. 277). Objection des athées. Mais nous n'avons nulle lumière.
Preuves par discours I (Laf. 418, Sel. 680). “Infini rien”.
Preuves par discours II (Laf. 427, Sel. 681). Comme je ne sais d’où je viens, aussi je ne sais où je vais ; et je sais seulement qu’en sortant de ce monde je tombe pour jamais ou dans le néant, ou dans les mains d’un Dieu irrité, sans savoir à laquelle de ces deux conditions je dois être éternellement en partage.
Pensées diverses (Laf. 748, Sel. 621). Objection : Ceux qui espèrent leur salut sont heureux en cela, mais ils ont pour contrepoids la crainte de l’enfer. Réponse : Qui a plus sujet de craindre l’enfer, ou celui qui est dans l’ignorance s’il y a un enfer, et dans la certitude de la damnation s’il y en a ; ou celui qui est dans une certaine persuasion qu’il y a un enfer, et dans l’espérance d’être sauvé s’il est.
Mots-clés : Adorer – Négliger – Parti – Perdre – Principe – Recherche – Signe – Vérité – Volonté (voir Vouloir).