Fragment Fausseté des autres religions n° 10 / 18  – Papier original : RO 467-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Fausseté n° 270 p. 107 v° / C2 : p. 133

Le texte a été ajouté dans l’édition de 1678 : Chapitre XIV - Jésus-Christ : 1678 n° 7 p. 112

Éditions savantes : Faugère I, 314, III / Havet XVII.7 / Brunschvicg 528 / Tourneur p. 247-3 / Le Guern 198 / Lafuma 212 / Sellier 245

 

 

 

Jésus-Christ est un Dieu dont on s’approche sans orgueil et sous lequel on s’abaisse sans désespoir.

 

 

Le fragment définit la religion chrétienne par rapport aux philosophies qui persuadent soit l’orgueil, soit le désespoir, qui sont les deux principales tentations de l’homme sans Dieu. Jésus-Christ sauve l’homme de l’orgueil en lui révélant sa corruption à la suite de la faute originelle, et du désespoir parce qu’il le libère du péché par la grâce.

 

Analyse détaillée...

 

 

Fragments connexes

 

Excellence 5 (Laf. 192, Sel. 225). La connaissance de Dieu sans celle de sa misère fait l’orgueil.

La connaissance de sa misère sans celle de Dieu fait le désespoir.

La connaissance de Jésus-Christ fait le milieu parce que nous y trouvons et Dieu et notre misère.

Fausseté 6 (Laf. 208, Sel. 240). Sans ces divines connaissances qu'ont pu faire les hommes sinon ou s'élever dans le sentiment intérieur qui leur reste de leur grandeur passée, ou s'abattre dans la vue de leur faiblesse présente. Car ne voyant pas la vérité entière ils n'ont pu arriver à une parfaite vertu, les uns considérant la nature comme incorrompue, les autres comme irréparable, ils n'ont pu fuir ou l'orgueil ou la paresse qui sont les deux sources de tous les vices, puisqu'il ne peut sinon ou s'y abandonner par lâcheté, ou en sortir par l'orgueil. Car s'ils connaissaient l'excellence de l'homme, ils en ignorent la corruption de sorte qu'ils évitaient bien la paresse, mais ils se perdaient dans la superbe et s'ils reconnaissent l'infirmité de la nature ils en ignorent la dignité, de sorte qu'ils pouvaient bien éviter la vanité mais c'était en se précipitant dans le désespoir.

De là viennent les diverses sectes des stoïques et des épicuriens, des dogmatistes et des académiciens, etc.

La seule religion chrétienne a pu guérir ces deux vices, non pas en chassant l'un par l'autre par la sagesse de la terre, mais en chassant l'un et l'autre par la simplicité de l'Évangile. Car elle apprend aux justes qu'elle élève jusqu'à la participation de la divinité même, qu'en ce sublime état ils portent encore la source de toute la corruption qui les rend durant toute la vie sujets à l'erreur, à la misère, à la mort, au péché, et elle crie aux plus impies qu'ils sont capables de la grâce de leur rédempteur. Ainsi donnant à trembler à ceux qu'elle justifie et consolant ceux qu'elle condamne, elle tempère avec tant de justesse la crainte avec l'espérance par cette double capacité qui est commune à tous et de la grâce et du péché, qu'elle abaisse infiniment plus que la seule raison ne peut faire mais sans désespérer, et qu'elle élève infiniment plus que l'orgueil de la nature, mais sans enfler, et que faisant bien voir par là qu'étant seule exempte d'erreur et de vice il n'appartient qu'à elle et d'instruire et de corriger les hommes.

Morale chrétienne 2 (Laf. 352, Sel. 384). La misère persuade le désespoir.

L’orgueil persuade la présomption.

L’Incarnation montre à l’homme la grandeur de sa misère par la grandeur du remède qu’il a fallu.

Morale chrétienne 4 (Laf. 354, Sel. 386). Il n’y a point de doctrine plus propre à l’homme que celle-là qui l’instruit de sa double capacité de recevoir et de perdre la grâce à cause du double péril où il est toujours exposé de désespoir ou d’orgueil.

Morale chrétienne 8 (Laf. 358, Sel. 390). Avec combien peu d’orgueil un chrétien se croit-il uni à Dieu. Avec combien peu d’abjection s’égale-t-il aux vers de la terre ! La belle manière de recevoir la vie et la mort, les biens et les maux.

Dossier de travail (Laf. 416, Sel. 35). Sans J. C., il faut que l’homme soit dans le vice et dans la misère. Avec J. C. l’homme est exempt de vice et de misère.

En lui est toute notre vertu et toute notre félicité.

Hors de lui il n’y a que vice, misère, erreur, ténèbres, mort, désespoir.

Pensées diverses (Laf. 449, Sel. 690). [La religion chrétienne] enseigne donc ensemble aux hommes ces deux vérités : et qu’il y a un Dieu, dont les hommes sont capables, et qu’il y a une corruption dans la nature, qui les en rend indignes. Il importe également aux hommes de connaître l’un et l’autre de ces points ; et il est également dangereux à l’homme de connaître Dieu sans connaître sa misère, et de connaître sa misère sans connaître le Rédempteur qui l’en peut guérir. Une seule de ces connaissances fait, ou la superbe des philosophes, qui ont connu Dieu et non leur misère, ou le désespoir des athées, qui connaissent leur misère sans Rédempteur.

 

Mots-clés : AbaissementDésespoirDieuJésus-ChristOrgueil.