Fragment Fausseté des autres religions n° 15 / 18  – Papier original : RO 459-1

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Fausseté n° 272 p. 109 / C2 : p. 134-135

Éditions de Port-Royal : Chap. XII - Figures : 1669 et janvier 1670 p. 93-94  / 1678 n° 1 p. 92

     et Chap. XVII - Contre Mahomet : 1669 et janvier 1670 p. 134-135  / 1678 n° 4 p. 134 (une phrase)

Éditions savantes : Faugère II, 248, X / Havet XVI.1 / Brunschvicg 650 / Tourneur p. 248-2 / Le Guern 203 / Lafuma 217 / Sellier 250

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Bibliographie

 

 

Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme, Paris, Cerf, 1993, art. Apocalypse, p. 81 sq.

DUBARLE A., “Pascal et l’interprétation des Écritures”, Les Sciences philosophiques et Théologiques, vol. II, 1941-1942, p. 346-379.

Encyclopédie saint Augustin, Paris, Cerf, 2005, p. 60 sq.

FORCE Pierre, Le problème herméneutique chez Pascal, Paris, Vrin, 1989.

LHERMET J. Pascal et la Bible, Paris, Vrin, 1931.

MESNARD Jean, Les Pensées de Pascal, 2e éd., Paris, SEDES-CDU, 1993.

MESNARD Jean, “La théorie des figuratifs dans les Pensées de Pascal”, in La culture du XVIIe siècle, Paris, Presses Universitaires de France, 1992, p. 426-453.

PÉCHARMAN Martine, “Interprétation et traduction : Pascal et Port-Royal”, in CANZIANI Guido et ZARKA Yves Charles (dir.), L’interpretazione nei secoli XVI e XVII, Francoangeli, 1993, p. 661-687.

PÉROUSE Marie, L’invention des Pensées de Pascal. Les éditions de Port-Royal (1670-1678), Paris, Champion, p. 168-169.

SIMON M. et BENOIT A., Le Judaïsme et le Christianisme antique, Paris, Presses Universitaires de France, 1968, p. 65 sq.

 

Voir la bibliographie générale de la liasse Loi figurative.

 

 

Éclaircissements

 

Il y a des figures claires et démonstratives, mais il y en a d’autres qui semblent un peu tirées par les cheveux, et qui ne prouvent qu’à ceux qui sont persuadés d’ailleurs.

 

On dit qu’un passage, qu’une comparaison, sont tirés par les cheveux lorsqu’ils ne viennent pas naturellement au sujet, qu’ils sont tirés de trop loin (Furetière). Port-Royal dit qui semblent moins naturelles, ce qui revient à remplacer une expression familière par une explication banale.

Ce fragment des Pensées ouvre une perspective sur les figures et le discours figuré, que rien jusque là n’avait laissé attendre. Cette nouveauté est d’autant plus surprenante qu’elle se présente d’un point de vue critique, puisque Pascal s’en prend aux figures non convaincantes avant d’avoir proposé la théorie des figures claires et démonstratives.

À vrai dire, Pascal n’a pas encore intérêt à entrer trop avant dans le sujet, dans la mesure où il va devoir, en abordant les figures scripturaires, poser en principe que les figures qui sont claires et démonstratives sont celles qui enferment une absurdité qui est censée conduire l’esprit au sens spirituel caché derrière le sens littéral.

Il se contente donc d’indiquer

1. qu’il y a des figures de genres différents pour ce qui est de la valeur persuasive ;

2. que certaines figures sont claires, indubitables et persuasives par elles-mêmes ;

3. que d’autres ne sont pas claires par elles-mêmes, de sorte qu’il faut, pour les comprendre, être persuadé d’ailleurs, c’est-à-dire par une autre source de persuasion ;

4. que les figures de la religion chrétienne sont du premier type, alors que celles des autres (dont les tenants sont dans la suite désignés par le pronom ils) sont du deuxième type ;

5. qu’il n’est pas équitable de mettre les deux types de figures sur le même plan et de leur accorder la même valeur et la même force persuasive.

Pascal ne précise ici ni comment on distingue les figures claires, démonstratives et indubitables de celles qui ne le sont pas. Ces explications seront données dans la liasse Loi figurative.

Le fragment ne précise pas non plus qui désigne le pronom ils. Le contexte de la liasse Fausseté permet de penser que Pascal pense essentiellement à l’islam. Mais Pascal reconnaît que le christianisme enferme des sectes dont l’intempérance interprétative est aussi excessive ; dans le fragment Laf. 575, Sel. 478, il rappelle aussi les délires des préadamites et des millénaristes.

Pérouse Marie, L’invention des Pensées de Pascal. Les éditions de Port-Royal (1670-1678), p. 168-169. Rôle de ce texte dans l’économie démonstrative du chapitre de l’édition de 1670. Les exemples de figures claires seront donnés dans les chapitres suivants.

 

Celles‑là sont semblables aux apocalyptiques.

 

Voir sur les Apocalyptiques le fragment Laf. 575, Sel. 478.

M. Le Guern (Pléiade, II, p. 1405) précise qu’il faut entendre « aux figures des Apocalyptiques ». Pascal désigne en effet par ce mot les auteurs de figures tirées de l’Apocalypse. Voir Pensées, éd. Havet, II, Delagrave, 1866, p. 1 et 11.

L’édition Brunschvicg, GEF XIV, p. 91, signale que « les Apocalyptiques et les Millénaires se confondent parfois », à cause du texte de l’Apocalypse cité ci-après. Pascal distingue peut-être les Apocalyptiques chrétiens des Millénaires juifs qui interprétaient le récit de la Genèse d’après Psaumes, XC, 4, et prédisaient six mille ans de combat suivis d’un Sabbat millénaire.

Semblables aux apocalyptiques : de ceux qui, comme dit Port-Royal, « fondent des prophéties sur l’Apocalypse, qu’ils expliquent à leur fantaisie ». Ces prophéties proviennent du chapitre XX de l’Apocalypse, v. 4 : « Et vidi sedes, et sederunt super eas, et judicium datium est illis : et animas decollatorum propter testimonium Jesu, et propter verbum Dei, et qui non adoraverunt bestiam, neque imaginem ejus, nec acceperunt characterem ejus in frontibus aut in manibus suis, et vixerunt, et regnaverunt cum Christo mille annis ». Tr. de Sacy : « Je vis aussi des trônes, et des personnes qui s’assirent dessus, et la puissance de juger leur fut donnée. Je vis encore les âmes de ceux à qui on a coupé le cou pour avoir rendu témoignage à Jésus, et pour la parole de Dieu, et qui n’ont point adoré la bête ni reçu son caractère sur le front ou aux mains : et ils ont vécu et régné avec Jésus-Christ pendant mille ans ». Les notes de Sacy soulignent la difficulté de l’interprétation de ce passage ; il ne s’engage dans son explication qu’en suivant saint Augustin « et tous les autres interprètes qui l’ont suivi sur le sujet des mille ans qui font la principale difficulté », mille ans qui sont ceux durant lesquels Satan demeurera enchaîné jusqu’à la venue de l’Antéchrist, avant que ne se déclare le grand combat qui doit précéder la fin du monde et le jugement dernier. Avec précaution, Sacy remarque que les mille ans ne doivent pas, selon le style des prophètes, être pris comme un « nombre préfix », mais désignent seulement « le plus grand nombre ». Il expose ensuite des opinions relatives à ces mille années. Plusieurs anciens « tant Grecs que Latins, entre lesquels ont été saint Irénée, saint Justin, Tertullien et plusieurs autres, ont cru que ces mille ans, et l’enchaînement de Satan ne devaient commencer qu’après la mort de l’Antéchrist, et qu’il se ferait après le second avènement de Jésus-Christ une résurrection particulière de tous les justes qui demeureraient avec lui sur la terre durant mille ans ; que la ville de Jérusalem serait rebâtie de nouveau et embellie, que les saints, les patriarches et les prophètes vivraient pendant ce temps avec Jésus-Christ dans des délices toutes spirituelles, qu’à la fin néanmoins les saints seraient attaqués et leurs ennemis consumés par le feu du ciel, après quoi se ferait la résurrection générale et le jugement dernier ». Sacy passe alors au cas des interprètes abusifs de l’Apocalypse : « Mais il y en avait d’autres, qui s’égarant dans des fables ridicules, prétendaient que les saints passeraient tout ce temps dans des festins tout charnels, et dans tous les autres plaisirs corporels. Ce sentiment dont Cerinthe est considéré comme le premier auteur, a toujours été en abomination dans l’Église, au lieu qu’on a toujours eu un grand respect pour ceux qui ont été dans l’autre opinion, quoique l’Église l’ait rejetée. Il semble que l’auteur ait été Papias disciple de saint Jean ; et ce fut sans doute l’autorité de cet apôtre dont on crut que Papias avait reçu cette opinion, qui le rendit d’abord si considérable. » Après avoir réduit l’autorité de Papias à sa juste mesure, Sacy conclut : « Le règne des martyrs avec Jésus-Christ consiste en deux choses : premièrement dans la gloire qu’ils ont au ciel avec Jésus-Christ qui les y a reçus pour les y faire régner avec lui, et secondement dans la manifestation de cette gloire sur la terre parmi les honneurs qu’on leur a rendus dans l’Église. Ce règne doit durer pendant mille ans, c’est-à-dire durant toute l’étendue des siècles jusqu’au jour du jugement, mais cela se doit entendre de la gloire dont Dieu les relève sur la terre et dans l’Église ; car celle dont ils jouissent dans le ciel ne finira jamais, non plus que le règne de Jésus-Christ ».

Les Apocalyptiques ne figurent pas dans le Dictionnaire des hérésies de l’abbé Pluquet (1847).

Lhermet J. Pascal et la Bible, Paris, Vrin, 1931, p. 401 sq., montre que le sens du fragment vise la réfutation du figurisme : l’excès de figurisme conduit à des excès extravagants. Pascal entend parler contre les trop grands figuratifs (Loi figurative 10 - Laf. 254, Sel. 286).

Dans le fragment Laf. 575, Sel. 478, Pascal s’en prend aux extravagances des Apocalyptiques et préadamites, millénaires, etc., et montre sur des exemples tirés comment on peut fonder des opinions extravagantes sur l’Écriture en fondera par exemple sur cela.

Il est dit que cette génération ne passera point jusqu’à ce que tout cela se fasse. Sur cela je dirai qu’après cette génération il viendra une autre génération et toujours successivement.

Il est parlé dans le II Paralipomènes de Salomon et de roi comme si c’étaient deux personnes diverses. Je dirai que c’en étaient deux.

Simon M. et Benoit A., Le Judaïsme et le Christianisme antique, Paris, Presses Universitaires de France, 1968, p. 65 sq. La littérature apocalyptique à l’aube du christianisme. Les auteurs visionnaires annoncent que l’ordre divin a été ébranlé par les forces du mal, mais que sera rétabli dans son intégrité l’ordre et le royaume de Dieu ; après une période de grandes calamités, Jérusalem libérée sera restaurée dans une splendeur inouïe. Dans une seconde étape, la résurrection aura lieu dans les temps ultimes, soit pour les justes, soit pour tous les hommes, avec le jugement dernier.

Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme, art. Apocalypse, p. 81 sq. L’Apocalypse est un genre littéraire de réflexions eschatologiques sur les mystères du monde surnaturel. L’apocalyptique se fonde sur l’espoir d’un ordre social radicalement nouveau, qui reflète les réalités historiques de l’époque où les textes ont été écrits. Les apocalypses juives sont des pseudépigraphes, c’est-à-dire qu’elles ne donnent pas les noms de leurs auteurs véritables, mais prétendent rapporter les révélations prophétiques passées (Hénoch, Abraham, Moïse). Les apocalyptiques, dans la croyance qu’ils sont la « dernière génération » entre ce monde et le nouveau monde où règnera la justice, imaginent la fin du monde comme un processus cosmique accompagné de bouleversements naturels, où les événements sur terre ne seraient qu’un écho de l’affrontement final entre les forces du bien et du mal. Les courants apocalyptiques présentent des traits caractéristiques, notamment la périodisation de l’histoire en ères chronologiques fixées par Dieu, à l’issue desquelles viendra l’ère messianique pour les élus, tandis qu’Israël connaîtra une restauration politique, un savoir secret, des voyages hors du monde et des ascensions célestes, avec vision du trône de Dieu et révélations sur une vie éternelle individuelle et un jugement dernier, et un dualisme qui définit Satan comme une entité métaphysique dirigeant des anges révoltés contre Dieu.

Encyclopédie saint Augustin, p. 60 sq. Les enseignements des lettres de saint Paul et des Évangiles, avec les enseignements chrétiens sur la parousie ont été mêlés à des attentes juives traditionnelles (bataille finale entre le bien et le mal, désastres célestes et sociaux, résurrection corporelle des saints et renouvellement de Jérusalem). Avec la chute de l’empire romain en 410, Augustin est contraint de redéfinir les croyances apocalyptiques orthodoxes dans La cité de Dieu. Les premiers chrétiens avaient une idée parfaitement claire de ce qu’il fallait attendre : les souffrances des saints s’effaceraient au profit de leur justification, avec la parousie du Christ. Le pouvoir injuste de Rome qui les persécutait serait mis en déroute, puis détruit. Les martyrs ressusciteraient et ils règneraient avec le Christ pour une période de mille ans ; après le dernier jugement, la Jérusalem céleste paraîtrait, et la mort serait abolie. De même que Dieu a créé le monde en 6 jours, et s’est reposé le 7e, de même le monde subsistera durant 6 jours ou périodes de 1 000 ans chacune ; à la fin de la 6e période, dans la 6 000e année de la fondation du monde, le Christ reviendra dans la gloire pour établir le repos sabbatique millénaire des saints (Ap. XX, 4-5). Certains intellectuels, embarrassés par la littéralité de l’attente millénariste, préfèrent interpréter les passages prophétiques dans un sens allégorique. L’attente de la résurrection de la chair et de la restauration de Jérusalem doit être prise au sens spirituel. La prise de Rome par les Goths en 410 a libéré un torrent de spéculations apocalyptiques. Augustin écrit La cité de Dieu dans ce contexte. Il s’en prend aux conceptions matérialistes et millénaristes de ceux qui interprètent des versets d’Apocalypse XX, 1-6 et du Psaume XC, 4, rejetant l’interprétation littérale de 1 000 : le nombre 1 000 indique une qualité spirituelle, et non une quantité empirique.

 

Mais la différence qu’il y a c’est qu’ils n’en ont point d’indubitables tellement qu’il n’y a rien de si injuste que quand ils montrent que les leurs sont aussi bien fondées que quelques‑unes des nôtres. Car ils n’en ont pas de démonstratives comme quelques-unes des nôtres.

La partie n’est donc pas égale. Il ne faut pas égaler et confondre ces choses parce qu’elles semblent être semblables par un bout, étant si différentes par l’autre. Ce sont les clartés qui méritent, quand elles sont divines, qu’on révère les obscurités.

 

Aussi bien fondées que quelques-unes des nôtres : l’une des liasses suivantes porte le titre Fondement.

Ce passage montre que ce qui est en cause n’est pas pour le moment la question théorique des figures, mais le discernement des différentes religions qui sont encore concurrentes à cette étape de la recherche : Pascal s’intéresse ici à la manière de les évaluer. Selon lui, c’est une erreur, sous prétexte que certaines religions paraissent avoir des points communs, de les mettre toutes dans le même sac. Il s’oppose sur ce point à la manière de penser des libertins, qui, en généralisant après un examen superficiel d’une religion à toutes les autres, les rejettent en bloc comme si elles étaient toutes identiques entre elles. La bonne façon de raisonner ne consiste pas à réduire au même tout ce qui présente une ressemblance ; il faut regarder au détail, juger des ressemblances à partir des différences, qui, bien examinées, montrent que les religions ne sont ni identiques, ni égales. Pascal emploie souvent le verbe discerner pour désigner cette manière de chercher la vérité.

Cet argument sera développé dans le fragment Fausseté 16 (Laf. 218, Sel. 251) contre Mahomet : Ce n’est pas par ce qu’il y a d’obscur dans Mahomet et qu’on peut faire passer pour un sens mystérieux que je veux qu’on en juge, mais par ce qu’il y a de clair, par son paradis et par le reste. C’est en cela qu’il est ridicule. Et c’est pourquoi il n’est pas juste de prendre ses obscurités pour des mystères, vu que ses clartés sont ridicules. Il n’en est pas de même de l’Écriture. Je veux bien qu’il y ait des obscurités qui soient aussi bizarres que celles de Mahomet, mais il y a des clartés admirables et des prophéties manifestes et accomplies. La partie n’est donc pas égale. Il ne faut pas confondre et égaler les choses qui ne se ressemblent que par l’obscurité et non pas par la clarté qui mérite qu’on révère les obscurités. Voir aussi ce fragment sur la manière dont le paradis promis par Mahomet a servi d'argument contre l'islam.

 

C’est comme ceux entre lesquels il y a un certain langage obscur ; ceux qui n’entendraient pas cela n’y comprendraient qu’un sot sens. (texte situé en marge et barré verticalement)

 

Cette partie du fragment est inscrite en marge, et barrée verticalement. Pascal ne la rejette donc pas ; il la biffe parce qu’il l’a utilisée ailleurs. Pascal esquisse ici un modèle d’argumentation fondé sur l’interception d’un message : il suppose que deux personnes échangent des propos qui ne présentent en apparence aucun sens intelligible et rationnel, et qu’un tiers, écoutant leur échange, s’interroge sur ce qu’ils veulent dire. S’il n’entre pas dans leur discours, il n’y verra qu’un échange de sottises dénuées de sens. Si en revanche il trouve la clé de ces propos obscurs, il y verra peut-être des significations mystérieuses et profondes.

Pascal amorce ici le modèle de son argumentation sur l’herméneutique des Figuratifs, conçue comme déchiffrement d’un message codé. Dans le présent fragment, la question est abordée brièvement et de manière toute négative, puisque le cas envisagé est celui du tiers qui ne comprend pas les propos obscurs qu’il entend. La question sera traitée dans toute son ampleur dans la liasse Loi figurative, notamment dans le fragment Loi figurative 31 (Laf. 276, Sel. 307), où l’on voit réapparaître la même situation de deux personnes qui échangent des propos incompréhensibles et ineptes en apparence, en présence d’un tiers qui n’est pas dans le secret, et se demande si leur dialogue comporte un sens caché : De deux personnes qui disent de sots contes, l’un qui voit double sens entendu dans la cabale, l’autre qui n’a que ce sens, si quelqu’un n’étant pas du secret entend discourir les deux en cette sorte il en fera même jugement. Mais si ensuite dans le reste du discours l’un dit des choses angéliques et l’autre toujours des choses plates et communes il jugera que l’un parlait avec mystère et non pas l’autre, l’un ayant assez montré qu’il est incapable de telles sottises et capable d’être mystérieux, l’autre qu’il est incapable de mystère et capable de sottise. Ce modèle de l’interception d’un discours obscur, dont on se demande s’il a un sens caché sera appliqué à l’ancien testament, dont le style figuré peut laisser croire à ceux qui n’en saisissent pas le sens spirituel qu’il n’est qu’un tissu de sottises. Pascal en revanche, soutient que le vieux testament est un chiffre (Loi figurative 31 - Laf. 276, Sel. 307).

La reconstitution du feuillet originel (voir cette étude) montre que Pascal a développé presque immédiatement cette idée, en lui donnant un tour plus précis et rigoureux, dans le fragment qui vient d’être cité, qu’il a placé dans la liasse où il comptait exposer à fond la doctrine des figures. L’accolade qui figure sur le manuscrit semble bien être une accolade de transposition, qui relie entre eux deux éléments qui sont séparés par des notes qui répondent à une préoccupation différente. Outre son intérêt de fond, ce texte en présente un autre, qui touche la technique de travail de Pascal.