Les dossiers MIRACLES I à III

 

 

Copie C1

Copie C2

Table des matières (non paginée)

Unités à titre 1 à 27 (p. 1 à 187)

Table des matières (p. 189)

Dossier de travail (p. 191 à 199)

Preuves par discours I à III (p. 201 à 231 v°)

Preuves par les Juifs I à VI (p. 233 à 257)

Prophéties I à VIII (p. 259 bis à 309)

 

Règle de la créance (p. 313 à 313 v°)

Géométrie-Finesse I et II (p. 317 à 323)

Pensées diverses I à IX (p. 325 à 429 v°)

Titre Miracles (p. 431)

Miracles I à III (p. 435 à 471 v°)

 

Table des matières (Feuillet B)

Dossier de travail (p. 1 à 10)

Unités à titre 1 à 27 (p. 13 à 219)

[...]

Miracles I à III (p. 229 à 273)

Pensées diverses I à IX (p. 275 à 401)

Géométrie-Finesse I et II (p. 401 à 403 v°)

Règle de la créance (p. 405 à 407)

 

Preuves par discours I à III (p. 411 à 445)

Preuves par les Juifs I à VI (p. 447 à 475)

Prophéties I à VIII (p. 477 à 531)

Ordonnancement de C1 et C2 (extrait) 1

 

Ces mêmes dossiers sont appelés Séries XXXI à XXXIII par L. Lafuma (voir le décalage provoqué par l’erreur de regroupement de deux dossiers des Pensées diverses), séries XXXII à XXXIV par M. Le Guern, et Miracles 1 à 3 par Ph. Sellier.

--------

1 L’ordre des dossiers est différent dans C1 et C2, et la dénomination des « dossiers sans titre » change selon les éditeurs modernes. Voir Proust Gilles, “Les Copies des Pensées”, in Courrier du Centre international Blaise Pascal, n° 32, 2010, p. 5 et 6 (Ordonnancement de C1 et C2 et Les grands ensembles dans C2), ainsi que l’Annexe p. 44 (Ordonnancement détaillé des Copies). Voir aussi Descotes Dominique et Proust Gilles, “Un projet du Centre international Blaise Pascal : l’édition électronique des Pensées”, in Courrier du Centre international Blaise Pascal, n° 30, Clermont-Ferrand, 2018, “III. Remarques sur l’ordre des Copies”, p. 12.

 

Composition des dossiers

 

Dossier I : 2 fragments dont les papiers ont été perdus. On pourrait penser que ces deux fragments étaient regroupés sur un seul papier, mais il n’en est rien : en témoignent les Copies, dans lesquelles (fait exceptionnel et spécifique aux dossiers sur les miracles) la séparation des textes des fragments est matérialisée par un trait horizontal.

Dossier II : ce dossier est complet et contient 15 fragments.

Répartition dans le RO : les papiers ont été répartis dans les cahiers n° 11 (2 fragments), 12 (1), 20 (1), 37 (2), 38 (5), 39 (3). Le fragment 13, composé d’un feuillet et demi, a été réparti dans les cahiers 11 et 37.

13 fragments sur 15 sont percés d’un trou d’enfilage en liasse, en général situé dans la partie inférieure gauche. Ces fragments sont composés soit d’une grande partie d’un feuillet, soit d’un feuillet complet, soit d’un feuillet et demi, soit d’une feuille complète.

Les papiers ne portent que l’écriture de Pascal. Aucun secrétaire n’est intervenu.

3 papiers portent un titre ou des sous-titres : n° 1 : Commencement ; Objection à la règle ; Raison pourquoi on ne croit point ; Fondement de la religion ; n° 7 : Règle ; n° 14 : Contestation.

Le dossier III est aussi complet ; il est composé de 11 fragments.

Répartition dans le RO : les papiers ont été collés dans les cahiers n° 29 (1), 33 (1), 34 (1), 37 (5), 38 (2) et 39 (1).

Tous les fragments ont été percés d’un trou d’enfilage en liasse, en général situé dans la partie inférieure gauche. Les fragments sont de différentes tailles mais n’excèdent pas un feuillet.

Les papiers RO 451-1, 401-1, 415-1, 447-2 et 463-2 portent des notes écrites au crayon puis repassées à la plume.

Le papier RO 415 porte deux notes écrites par un enfant ou un analphabète. Ces deux notes ont été barrées puis réécrites par Pascal. Le texte du papier RO 469-2 a été écrit par le secrétaire assidu de Pascal.

5 papiers portent un titre ou des sous-titres : n° 3 : Perpétuité ; Miracles ; n° 4 : Première objection : Ange du ciel ; Deuxième objection : Mais l’Antéchrist fera des signes ; n° 6 : Athées ; Pensées ; Miracle ; n° 8 : Aveuglement de l’Écriture ; n° 11 : Pyrrhonisme ; Probabilité ; Impies.

 

Trois visages ont été dessinés au recto du papier RO 447-2, et des figures géométriques ont été tracées au verso, le tout à la sanguine.

 

Utilisation de fragments des dossiers Miracles dans l’édition de Port-Royal

Dossier I : les deux fragments n’ont pas été retenus dans l’édition. C’est naturel en raison du caractère privé du questionnaire adressé à Barcos par Pascal. Le mot de fragment, appliqué à ce questionnaire est du reste quelque peu inadéquat.

Dossier II : 13 fragments / 15

Chapitre XXVIII - Pensées chrétiennes : fragments 3 et 9 ; le fragment 2 a été ajouté en 1678.

Les fragments 1, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12 et 14 ont été intégrés dans le chapitre XXVII - Pensées sur les miracles.

Dossier III : 7 fragments / 11

Chapitre XXVIII - Pensées chrétiennes : fragments 9 et 11.

Les fragments 1, 3, 4, 5 et 10 ont été intégrés dans le chapitre XXVII - Pensées sur les miracles.

Les autres fragments n’ont pas été retenus par le Comité. La plupart ont ensuite été recopiés par Louis Périer, dont une copie a été conservée. Il faut, sauf exceptions, attendre l’édition Faugère (1844) pour qu’ils soient publiés entièrement.

Le chapitre XXVII - Pensées sur les miracles a été composé essentiellement à partir des fragments du dossier Miracles, auxquels ont été adjoints les fragments Pensées diverses (Laf. 734, Sel. 615), Pensées diverses (Laf. 735, Sel. 616) et la IVe lettre à Mlle de Roannez (article n° 18) :

 

P-R-pages

 

 

 

 

Chap. XXVII - Pensées sur les miracles : 1669 et janv. 1670 p. 234-237 / 1678 n° 18 p. 227-230

       

 

Différences constatées par rapport au manuscrit original

 

Ed. janvier 1670 1

Transcription de la IVe lettre à Mlle de Roannez (voir Mesnard J., OC III, p. 1029)

 

 

 

 

18 P-R-fleuron Il y a si peu de personnes à qui Dieu se fasse paraître par ces coups extraordinaires, qu’on doit bien profiter de ces occasions ; puisqu’il ne sort du secret de la nature qui le couvre, que pour exciter notre foi à le servir avec d’autant plus d’ardeur que nous le connaissons avec plus de certitude.

Si Dieu se découvrait continuellement aux hommes, il n’y aurait point de mérite à le croire ; et s’il ne se découvrait jamais, il y aurait peu de foi. Mais il se cache ordinairement, et se découvre rarement à ceux qu’il veut engager dans son service. Cet étrange secret, dans lequel Dieu s’est retiré, impénétrable à la vue des hommes, est une grande leçon pour nous porter à la solitude, loin de la vue des hommes. Il est demeuré caché sous le voile de la nature, qui nous le couvre, jusques à l’incarnation ; et quand il a fallu qu’il ait paru, il s’est encore plus caché en se couvrant de l’humanité. Il était bien plus reconnaissable quand il était invisible, que non pas quand il s’est rendu visible. Et enfin quand il a voulu accomplir la promesse qu’il fit à ses Apôtres, de demeurer avec les hommes jusqu’à son dernier avènement, il a choisi d’y demeurer dans le plus étrange et le plus obscur secret de tous, savoir sous les espèces de l’Eucharistie. C’est ce Sacrement que S. Jean appelle dans l’Apocalypse une manne cachée 2 ; et je crois qu’Isaïe le voyait en cet état, lorsqu’il dit en esprit de prophétie : véritablement tu es un Dieu caché 3. C’est là le dernier secret où il peut être. Le voile de la nature qui couvre Dieu a été pénétré par plusieurs infidèles, qui, comme dit S. Paul, ont reconnu un Dieu invisible, par la nature visible. Beaucoup de Chrétiens hérétiques l’ont connu à travers son humanité, et adorent Jésus-Christ Dieu et homme. Mais pour nous, nous devons nous estimer heureux de ce que Dieu nous éclaire jusques à la reconnaître sous les espèces du pain et du vin.

On peut ajouter à ces considérations le secret de l’Esprit de Dieu caché encore dans l’Écriture. Car il y a deux sens parfaits, le littéral et le mystique ; et les Juifs s’arrêtant à l’un, ne pensent pas seulement qu’il y en ait un autre, et ne songent pas à le chercher. De même que les impies voyant les effets naturels, les attribuent à la nature, sans penser qu’il y en ait un autre auteur. Et comme les Juifs voyant un homme parfait en Jésus-Christ, n’ont pas pensé à y chercher une autre nature : Nous n’avons pas pensé que ce fût lui 4, dit encore Isaïe. Et de même enfin que les hérétiques voyant les apparences parfaites de pain dans l’Eucharistie ne pensent pas à y chercher une autre substance. Toutes choses couvrent quelque mystère. Toutes choses sont des voiles qui couvrent Dieu. Les Chrétiens doivent le reconnaître en tout. Les afflictions temporelles couvrent les biens éternels où elles conduisent. Les joies temporelles couvrent les maux éternels qu’elles causent. Prions Dieu de nous le faire reconnaître et servir en tout ; et rendons-lui des grâces infinies, de ce que s’étant caché en toutes choses pour tant d’autres, il s’est découvert en toutes choses et en tant de manières pour nous.

 

 

Vers le 29 octobre 1656.

Il me semble que vous prenez assez de part au miracle pour vous mander en particulier que la vérification en est achevée par l'Église, comme vous le verrez par cette sentence de M. le Grand Vicaire. Il y a si peu de personnes à qui Dieu se fasse paraître par ces coups extraordinaires qu'on doit bien profiter de ces occasions ; puisqu'il ne sort du secret de la nature qui le couvre que pour exciter notre foi à le servir avec d'autant plus d'ardeur que nous le connaissons avec plus de certitude.

Si Dieu se découvrait continuellement aux hommes, il n'y aurait point de mérite à le croire ; et s'il ne se découvrait jamais, il y aurait peu de foi. Mais il se cache ordinairement, et se découvre rarement à ceux qu'il veut engager dans son service. Cet étrange secret, dans lequel Dieu s'est retiré, impénétrable à la vue des hommes, est une grande leçon pour nous porter à la solitude loin de la vue des hommes. Il est demeuré caché sous le voile de la nature qui nous le couvre jusques à l'Incarnation ; et quand il a fallu qu'il ait paru, il est encore plus caché en se couvrant de l'humanité. Il était bien plus reconnaissable quand il était invisible, que non pas quand il s'est rendu visible. Et enfin, quand il a voulu accomplir la promesse qu'il fit à ses Apôtres de demeurer avec les hommes jusques à son dernier avènement, il a choisi d'y demeurer dans le plus étrange et le plus obscur secret de tous, qui sont les espèces de l'Eucharistie. C'est ce sacrement que saint Jean appelle dans l'Apocalypse une manne cachée ; et je crois qu'Isaïe le voyait en cet état, lorsqu'il dit en esprit de prophétie : Véritablement tu es un Dieu caché. C'est là le dernier secret où il peut être. Le voile de la nature qui couvre Dieu a été pénétré par plusieurs infidèles, qui, comme dit saint Paul, ont reconnu un Dieu invisible par la nature visible. Les chrétiens hérétiques l'ont connu à travers son humanité, et adorent Jésus-Christ Dieu et homme. Mais de le reconnaître sous des espèces de pain, c'est le propre des seuls catholiques : il n'y a que nous que Dieu éclaire jusque-là.

On peut ajouter à ces considérations le secret de l'esprit de Dieu caché encore dans l'Écriture. Car il y a deux sens parfaits, le littéral et le mystique, et les Juifs, s'arrêtant à l'un, ne pensent pas seulement qu'il y en ait un autre, et ne songent pas à le chercher ; de même que les impies, voyant les effets naturels, les attribuent à la nature, sans penser qu'il y en ait un autre auteur ; et comme les Juifs, voyant un homme parfait en Jésus-Christ, n'ont pas pensé à y chercher une autre nature : Nous n'avons pas pensé que ce fût lui, dit encore Isaïe ; et de même enfin que les hérétiques, voyant les apparences parfaites du pain, ne pensent pas à y chercher une autre substance. Toutes choses couvrent quelque mystère ; toutes choses sont des voiles qui couvrent Dieu. Les Chrétiens doivent le reconnaître en tout. Les afflictions temporelles couvrent les biens éternels où elles conduisent. Les joies temporelles couvrent les maux éternels qu'elles causent. Prions Dieu de nous le faire reconnaître et servir en tout. Et rendons-lui des grâces infinies de ce que, s'étant caché en toutes choses pour les autres, il s'est découvert en toutes choses et tant de manières pour nous…

 

1 Conventions : rose = glose des éditeurs ; vert = correction des éditeurs ; marron = texte non retenu par les éditeurs.

2 L’édition de 1678 ajoute dans la marge : « Apoc. 2. 17. ».

3 L’édition de 1678 ajoute dans la marge : « Isa. 45. 25. ».

4 L’édition de 1678 ajoute dans la marge : « Isa. 53. 33. ».

 

Voir le dossier thématique sur le Dieu caché.

Voir le dossier thématique sur le miracle de la sainte Épine.

 

Aspects stratigraphiques des fragments des Miracles

 

Dossier II :

Le fragment n° 1 (RO 235-3 et RO 237-1) est constitué d’une feuille complète dont les feuillets ont été séparés lors de leur collage dans le Recueil et collés sur deux pages consécutives, qui conservent l’ordre de lecture du texte. Le texte du premier feuillet commence par l’intitulé Commencement (écrit à la plume par Pascal) et le deuxième feuillet était à gauche du premier. Seul l’intérieur de la feuille a été utilisé. Cette feuille est de type Écusson fleurette RC/DV. Le filigrane est situé sur le feuillet de droite.

Le papier du fragment n° 2 (RO 113-1), qui montre de nombreuses roussures (comme sur les papiers de type Écusson fleurette RC/DV), porterait, selon P. Ernst, un filigrane B. RODIER (à vérifier). Il proviendrait donc d’un feuillet de type Écu aux 3 annelets / P. F & B. RODIER (sans le pot).

Les papiers des fragments n° 3 (RO 119-1), 9 (RO 465-5) et n° 15 (RO 463-1) portent un filigrane Écusson fleurette RC/DV.

Les fragments n° 4 (RO 471) et n° 7 (RO 473) sont constitués chacun d’une feuille complète, conservée intacte. L’intitulé Commencement a été ajouté au crayon sur les feuillets de droite. Seul l’intérieur des feuilles a été utilisé (d’abord le feuillet de droite puis le feuillet de gauche). Ces feuilles sont de type Écusson fleurette RC/DV. Le filigrane est situé sur les feuillets de droite. Voir aussi le fragment 1, ci-dessus.

Les fragments n° 5 (RO 125-1) et 8 (RO 459-2) étaient probablement des feuillets complets qui ont été rognés lors de leur collage dans le Recueil. Ils portent un filigrane Écusson fleurette RC/DV.

Les fragments n° 6 (RO 461-1), 11 (RO 469-1) et 14 (RO 455-3), qui ne portent pas de filigrane, proviendraient aussi de feuillets de type Écusson fleurette RC/DV. Le papier RO 469-1 était probablement un feuillet complet qui a été rogné lors de son collage dans le Recueil.

Le fragment n° 13 est constitué d’un feuillet et demi dont le demi feuillet a été séparé du feuillet complet lors de leur collage dans le Recueil et collés sur deux pages (actuellement)* très éloignées l’une de l’autre RO 117-1 et RO 449-2. L’utilisation de la feuille d’origine est semblable à celle des fragments 1, 4 et 7 : d’abord le feuillet de droite puis le feuillet de gauche et seul l’intérieur de la feuille a été utilisé. Cette feuille était de type Écusson fleurette RC/DV. Le filigrane est ici situé sur le verso du feuillet de gauche. * ‘actuellement’, car des cahiers du Recueil ont pu être changés de place avant que celui-ci ne soit relié.

Dossier III :

Le papier RO 451-1 porte un filigrane AP dont on ne connaît pas l’origine. Ce papier porte une partition de musique au verso.

Le papier RO 449-1 porte un filigrane 8L qui pourrait correspondre à un feuillet de type 8L & BR posé sur un croissant.

Le papier RO 401-1 est un demi-feuillet et porte un petit fragment d’un filigrane Cor couronné / WR.

Le papier RO 447-1 porte un fragment d’un filigrane Écusson fleurette RC/DV. Le papier RO 467-6 pourrait aussi provenir d’un feuillet de ce type.

Les papiers RO 415-1 et 463-2 portent un cadran en filigrane. Il sont issus de feuilles de type Cadran & B ♥ C. Le papier RO 447-2, qui porte un filigrane B ♥ C provient d’un feuillet de même type. Le papier RO 343 (un feuillet complet) porterait aussi un filigrane B ♥ C (à vérifier). Les trois derniers fragments se suivent dans les Copies.

Le papier RO 469-2, écrit par le secrétaire assidu de Pascal, pourrait provenir d’une feuille de type Cadran d'horloge & Armes de France et Navarre / P ♥ H.

 

Sur le contenu des textes des dossiers Miracles                                                                       

 

Dossier I

Fragment 1 : questionnaire que Pascal a proposé à Martin de Barcos, abbé de Saint-Cyran, sur plusieurs points particuliers, notamment la définition fondamentale du miracle, la distinction entre vrais et faux miracles et le rapport entre les miracles et la vérité de la doctrine chrétienne. Pascal pense qu’il ne faut pas définir le miracle comme effet qui dépasse toutes les forces de la nature, mais comme effet qui dépasse les possibilités naturelles du moyen que l’on y emploie. Ce déplacement de sens a des conséquences importantes sur la théorie des miracles.

Fragment 2 : « Le second miracle peut supposer le premier, le premier ne peut supposer le second. » Fragment elliptique et assez obscur. Le rapprochement avec le fragment 8 de Miracles II permet de l’éclaircir.

Dossier II :

Fragment 1 : notes elliptiques et variées sur la foi que l’on doit aux miracles. Pascal indique les conditions que doit respecter toute doctrine sur le sens, la réalité et la vérité des miracles. Pascal indique aussi les raisons pour lesquelles on ne croit. Pas, aussi bien dans le présent que dans la fin des temps.

Fragment 2 : réflexion sur la croyance aux miracles. Le caractère de la foi dans les miracles exclut la certitude, mais elle n’est pas sans raison ; elle comporte, comme la foi en Dieu, assez de lumière et d’incertitude pour que ce qui détermine la croyance ne soit pas la contrainte d’une démonstration, mais le mouvement du cœur entraîné par la grâce. La doctrine des miracles est ainsi mise en rapport étroit avec celle de la grâce. On retrouve dans ce fragment l’idée du clair-obscur de la foi, qui enferme à la fois l’évidence qui permet de condamner les cœurs mauvais, et de persuader les cœurs purs.

Fragment 3 : Pascal pose ici, selon la méthode d’autorité, les conditions auxquelles doit répondre une méthode de discernement des miracles. Il donne ensuite des exemples tirés de l’Écriture, qui témoignent de l’utilité des miracles comme preuve de la religion.

Fragment 4 : réflexions sur les rapports des miracles et de la vérité. Pascal pose le principe fondamental qui permet le discernement des vrais miracles : que jamais, lorsque deux partis se prétendent également détenteurs de la vérité, les miracles ne sont du côté des faux chrétiens.

Fragment 5 : contestations apportées par ceux qui ne croyaient pas aux miracles du Christ. Pascal conclut que, dans cette situation, il était nécessaire de croire les miracles. Il étend ensuite la question à la condition de ses contemporains ; ceux qui refusent de croire les miracles d’aujourd’hui pour une prétendue contradiction chimérique, ne sont pas excusés.

Fragment 6 : ce texte, dont la partie centrale touche les miracles, les rattache à plusieurs thèmes pascaliens bien connus : sagesse et folie de la religion chrétienne, amour de Dieu, et histoire de l’Église.

Fragment 7 : notes de Pascal sur la doctrine des miracles, où Pascal formule le principe qui en constitue le fondement, savoir la distinction des temps.

Fragment 8 : réflexions sur la nécessité de croire les miracles du Christ et leur utilité lorsque l’on ne peut s’appuyer sur la doctrine.

Fragment 9 : ce texte établit un pont entre la théorie des miracles et les réalités de l’art de persuader. Le principe que la charité ne peut être un principe figuratif implique que la doctrine prêchée par le Christ ne peut faire l’objet d’aucun dépassement.

Fragment 10 : la notion, aujourd’hui peu connue, de tentation de Dieu est au centre de la doctrine pascalienne de la recherche. Elle est aussi déterminante dans ses pensées sur les miracles.

Fragment 11 : recueil de citations de l’Ancien et du Nouveau Testaments sur les miracles et la mauvaise manière de tenter Dieu en les lui demandant.

Fragment 12 : Pascal fournit ici un moyen simple de savoir comment on doit se comporter à l’égard des prophètes.

Fragment 13 : la réflexion sur les miracles, qui prend pour base l’opposition des pharisiens à Jésus-Christ, s’étend au temps moderne avec le miracle de la sainte Épine.

Fragment 14 : cette liste des « contestations » qui ont jalonné l’histoire de l’Église pouvait servir de canevas à un ample tableau de l’histoire universelle, marqué par la perpétuité du combat des hommes de Dieu contre les ennemis de la Vérité.

Fragment 15 : Pascal esquisse une liste des différents termes, qui, dans les traductions de la Bible, expriment l’idée de miracle. Il essaie de discerner les usages constants des mots, ceux qui ont toujours le même sens, et ceux qui en ont plusieurs. Il tente d’établir des concordances dans le discours biblique.

Dossier III :

Fragment 1 : notes relatives aux miracles, mais aussi sur les figures, dans le style des Provinciales.

Fragment 2 : notes diverses sur la religion et les fondements de la foi.

Fragment 3 : suite de notes relatives à différents points de l’histoire de l’Église, à la perpétuité et aux miracles.

Fragment 4 : notes consacrées aux polémiques sur la morale et les miracles.

Fragment 5 : note sur la nécessité des miracles, en particulier du miracle de la sainte Épine, pour la défense de la doctrine de l’Église.

Fragment 6 : ensemble de notes sur divers sujets de polémique.

Fragment 7 : notes prises par Pascal dans la Lettre aux catholiques contre les donatistes de saint Augustin.

Fragment 8 : notes de références sur les résistances des Juifs à l’égard du Christ.

Fragment 9 : notes sur des sujets divers, notamment la polémique des Provinciales, les jansénistes et leurs ennemis, et les objections des esprits forts.

Fragment 10 : fragment consacré à la défense des religieuses et des enfants qu’elles élèvent contre les accusations portées contre elles principalement par les jésuites. Pascal invoque en leur faveur le signe sans équivoque du miracle de la sainte Épine.

Fragment 11 : notes prises en vue des polémiques contre les jésuites, mais aussi sur les miracles.

L’unité de ces textes tient à une réflexion de Pascal sur les miracles, à partir du miracle de la sainte Épine. Elle n’est pas restreinte à la défense de la réalité du miracle, que les polémistes jésuites mettaient publiquement en cause. La réflexion de Pascal se développe dans les directions suivantes, que l’on retrouve sous une forme plus ou moins élaborée selon les fragments.

Primo, le problème du discernement des vrais miracles par opposition aux simples faits extraordinaires, mais surtout aux faux miracles.

Secundo, le problème de la croyance aux miracles, c’est-à-dire aux raisons qui font qu’on y croie, et des celles qui font qu’on n’y croit pas.

Tertio, le problème de la signification des miracles, considéré d’abord sur l’exemple du miracle de la sainte Épine (ce miracle était-il destiné à amener les religieuses de Port-Royal à renoncer au jansénisme, comme le soutenaient les polémistes jésuites ; ou au contraire était-il le signe du fait que les jansénistes défendaient la vérité sur la grâce ?), pris de manière de plus en plus générale, à l’échelle de l’histoire sainte.

Quarto, une réflexion sur la nature claire-obscure de la certitude qui s’attache à la foi aux miracles, qui tient un milieu entre une persuasion du cœur, et un doute qui trahit un cœur mauvais. A ce niveau, la réflexion sur le miracle rejoint la doctrine de la grâce en général.

Quinto, une réflexion d’ordre eschatologique qui s’inscrit dans les prophéties de l’Apocalypse de saint Jean, notamment sur la question des miracles de l’Antéchrist dans les derniers temps.

L’intérêt de ces textes, quelque obscurs qu’ils paraissent souvent, consiste dans la manière dont la réflexion de Pascal, partant d’un fait précis de son temps, le miracle dont a bénéficié Marguerite Périer, gagne en portée grâce aux liens qu’il établit avec les orientations fondamentales de sa pensée et de sa foi. Quoique ces textes aient été mis dans des dossiers à part, ce qui les exclut du projet de défense de la religion chrétienne, il est clair qu’ils ont contribué au développement de la réflexion de Pascal. En effet, Pascal semble avoir renoncé à traiter le problème particulier des miracles, parce qu’il s’est rendu compte qu’étant des effets qui s’éloignent nécessairement dans le temps et dont les témoins disparaissent bientôt, ils conservent difficilement leur force de persuasion. D’autre part, un phénomène miraculeux peut toujours être mis en doute par les esprits forts, et attribué à des causes naturelles encore inconnues de la médecine ou de la physiologie. Aussi Pascal a-t-il résolu d’appuyer son apologétique sur un miracle, mais sur un miracle tel qu’il puisse être présent à l’échelle de l’histoire universelle (et non d’un moment ponctuel de l’histoire), et surtout que sa nature de miracle soit irrécusable : les prophéties de l’Ancien Testament réalisées dans le Nouveau. La doctrine des miracles est ainsi directement intégrée dans une perspective apologétique, en relation avec les motifs de la loi figurative et de la perpétuité.

 

Bibliographie

 

Voir sur ce sujet Gouhier Henri, Blaise Pascal. Commentaires, 2e éd., Paris, Vrin, 1971, p. 163-173.

Mesnard Jean, “Miracle et mystère”, Les Miracles, Communio, Revue catholique internationale, t. XIV, n° 5, septembre-octobre 1989, p. 59-70.

Orcibal Jean, “La signification du miracle et sa place dans l'ecclésiologie pascalienne”, Chroniques de Port-Royal, n° 20-21, 1972, p. 66-82.

Adam Michel, “La signification du miracle dans la pensée de Pascal”, Revue philosophique de la France et de l'étranger, CVI, 1981, p. 401-423.

Ferreyrolles Gérard, “Lecture pascalienne des miracles en Montaigne, in Montaigne et les Essais, 1580-1980, Actes du congrès de Bordeaux, Paris-Genève, Champion-Slatkine, 1983, p. 121-134.

Quantin Jean-Louis, “La vérité rendue sensible ; Port-Royal entre l’histoire et le miracle, de l’Augustinus à la Perpétuité”, Port-Royal et l'Histoire, Chroniques de Port-Royal, 46, Bibliothèque Mazarine, Paris, 1997, p. 119-136.

Jasinski René, “Autour de Port-Royal, sur le miracle de la sainte épine", À travers le XVIIe siècle, Paris, Nizet, 1981, p. 137-157.

Descotes Dominique, L’argumentation chez Pascal, Paris, Presses Universitaires de France, 1993, p. 324-332.

Jouslin Olivier, La campagne des Provinciales de Pascal. Étude d’un dialogue polémique, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2007.

Le livre de Tetsuya Shiokawa, Pascal et les miracles, Paris, Nizet, 1977, est l’ouvrage qui rend le plus complètement le mouvement général de la recherche de Pascal sur ce sujet.

 

L’ordre des dossiers reflète-t-il une certaine logique du développement de la réflexion de Pascal sur les miracles ?

 

La question se pose de manière frappante pour le dossier Miracles I, qui contient le questionnaire adressé à Martin de Barcos. Il ne s’agit pas visiblement d’un questionnaire destiné à une information élémentaire : les questions que pose Pascal sont assez techniques pour supposer déjà une information substantielle. Pascal est assez avancé pour en être à la vérification que ses idées sur la nature du miracle ne sont pas contraires à celles des théologiens scolastiques, et notamment de saint Thomas.

Le questionnaire à Barcos a en commun avec les deux autres dossiers de mentionner deux personnages qui n’apparaissent nulle part ailleurs : l’Antéchrist d’une part, et le P. de Lingendes d’autre part.

L’Antéchrist : voir Miracles II, 1 ; Miracles II, 4 ; Miracles II, 11 ; Miracles II, 14 ; Miracles III, 1 ; Miracles III, 4 et Miracles III, 5.

Le P. de Lingendes : voir Miracles III, 4.

Or la nature de ces mentions dans Miracles I, 1 est d’une nature assez différente de celle des dossiers qui suivent. Pascal interroge Barcos sur des points très précis, qui supposent qu’il a déjà réfléchi : sur l’Antéchrist, la question n’est pas de savoir s’il fera des signes (miracles), mais au nom de qui il en fera ; en d’autres termes, il ne s’agit pas de savoir s’il fera des miracles, ou si ces miracles seront vrais ou faux, mais d’évaluer son degré de duplicité.

Pour l’allusion au P. de Lingendes, le fragment Miracles III, 4 mentionne seulement une de ses affirmations, alors que le questionnaire porte sur le fait de savoir si les hérétiques déclarés peuvent guérir des malades non incurables, question qui ne peut se poser qu’à une étape avancée de la réflexion.

D’autre part, certaines distinctions comme celle des miracles quoad subjectum et quoad ordinem n’apparaissent nulle part dans les dossiers Miracles II et III, ce qui tend à prouver que Pascal ne disposait pas de cette distinction lorsqu’il en a réuni les fragments. La question des oracles païens dans Miracles I est aussi toute nouvelle.

On peut se fonder sur ces indices pour estimer que Miracles I est plus tardif que Miracle II et III, et que Miracles II et III correspondent à une étape plus ancienne de la recherche.

On peut dater Miracles I des premiers mois de 1657, sans doute de février. Les deux autres dossiers remonteraient dans ce cas à la fin 1656.