Fragment Soumission et usage de la raison n° 8 / 23  – Papier original : RO 406-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Soumission n° 230 p. 81 v° / C2 : p. 108

Éditions de Port-Royal : Chap. V - Soumission, et usage de la raison : 1669 et janv. 1670 p. 48 / 1678 n° 4 p. 50-51

Éditions savantes : Faugère II, 348, II / Havet XIII.4 / Brunschvicg 270 / Tourneur p. 229-4 / Le Guern 163 / Lafuma 174 / Sellier 205

 

 

 

Saint Augustin. La raison ne se soumettrait jamais si elle ne jugeait qu’il y a des occasions où elle se doit soumettre.

Il est donc juste qu’elle se soumette quand elle juge qu’elle se doit soumettre.

 

 

Le but de ce fragment est de prévenir une objection qui consisterait à alléguer que la soumission à la Révélation surnaturelle est imposée à la raison à son corps défendant, par un abus d’autorité. Pascal souligne qu’au contraire, rien ne peut parvenir à assujettir la raison sans qu’elle donne son consentement. De sorte que si la substance de la Révélation est effectivement fondée sur des principes qui s’imposent pour ainsi dire de l’extérieur, elle ne peut y parvenir que si la raison elle-même y consent. Et cette dernière ne consent à se soumettre que parce qu’elle a de bonnes raisons pour le faire, principalement pour résoudre les contrariétés qu’elle a aperçues dans la nature de l’homme et sortir du cercle vicieux dans lequel elle s’était trouvée enfermée tant qu’elle a cherché la vérité parmi les philosophes.

On peut dire que c’est de sa propre autorité que la raison juge et décide qu’elle doit se soumettre à l’autorité de la Révélation. De ce fait, la raison naturelle ne se soumettant que parce qu’elle-même juge qu’elle doit le faire, nul ne peut prétendre qu’elle accepte la Révélation par une sorte de tyrannie : il est juste qu’elle se soumette quand elle juge qu’il faut le faire, en ce sens qu’elle demeure seule juge et responsable de sa propre soumission.

Pascal parvient ainsi à concilier la nécessité pour la raison d’admettre une autre autorité qu’elle-même, et le fait que cette acceptation même témoigne du pouvoir qu’elle conserve de se modérer elle-même. Il prévient ainsi l’objection, fréquemment alléguée par les « libertins », que les chrétiens abdiquent servilement leur faculté de juger et se conduisent en « esprits moutoniques ».

 

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Fragment connexe

 

Soumission 7 (Laf. 173, Sel. 204). Si on soumet tout à la raison notre religion n’aura rien de mystérieux et de surnaturel. Si on choque les principes de la raison notre religion sera absurde et ridicule.

 

Mots-clés : AugustinJusteRaisonSoumission.