Pensées diverses VI – Fragment n° 3 / 5 – Papier original : RO 159-1

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 175 p. 411-411 v° / C2 : p. 387-387 v°

Éditions savantes : Faugère I, 193, XLVII / Havet XXV.5 / Brunschvicg 160 / Tourneur p. 128-2 / Le Guern 657 / Lafuma 795 (série XXVIII) / Sellier 648

 

 

 

 L’éternuement absorbe toutes les fonctions de l’âme aussi bien que la besogne, mais on n’en tire pas les mêmes conséquences contre la grandeur de l’homme, parce que c’est contre son gré et, quoiqu’on se le procure, néanmoins c’est contre son gré qu’on se le procure. Ce n’est pas en vue de la chose même, c’est pour une autre fin. Et ainsi ce n’est pas une marque de la faiblesse de l’homme et de sa servitude sous cette action.

-------

Il n’est pas honteux à l’homme de succomber sous la douleur, et il lui est honteux de succomber sous le plaisir. Ce qui ne vient pas de ce que la douleur nous vient d’ailleurs et que nous recherchons le plaisir. Car on peut rechercher la douleur et y succomber à dessein sans ce genre de bassesse. D’où vient donc qu’il est glorieux à la raison de succomber sous l’effort de la douleur, et qu’il lui est honteux de succomber sous l’effort du plaisir ? C’est que ce n’est pas la douleur qui nous tente et nous attire. C’est nous‑mêmes qui volontairement la choisissons et voulons la faire dominer sur nous, de sorte que nous sommes maîtres de la chose et, en cela c’est l’homme qui succombe à soi-même. Mais dans le plaisir, c’est l’homme qui succombe au plaisir. Or il n’y a que la maîtrise et l’empire qui fasse la gloire, et que la servitude qui fasse honte.

 

 

Ce fragment a suscité quelque étonnement et de fréquentes réticences chez les commentateurs des Pensées. C’est le seul cas où Pascal aborde le double sujet de l’éternuement et de la besogne dans sa défense de la religion chrétienne. Mais on y retrouve la distinction augustinienne de l’uti et du frui (voir l’analyse détaillée de Prophéties VIII - Laf. 502, Sel. 738).

 

Analyse détaillée...

 

Fragments connexes

 

Voir les liasses Misère et Grandeur.

Grandeur 12 (Laf. 116, Sel. 148). Toutes ces misères-là même prouvent sa grandeur. Ce sont misères de grand seigneur. Misères d’un roi dépossédé.

Raisons des effets 15 (Laf. 96, Sel. 130). Faiblesse.

 

Mots-clés : ÂmeBassesseBesogne – Douleur – Empire – Éternuement – FinGloireGrandeurHommePlaisirVolonté.