Fragment Excellence n° 4 / 5  – Papier original : RO 374-3

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Excellence n° 241-242 p. 85 v° / C2 : p. 113

Éditions savantes : Faugère II, 316, IX / Havet XXV.173 / Michaut 604 / Brunschvicg 549 / Tourneur p. 233-3 / Le Guern 180 / Lafuma 191 / Sellier 224

 

 

 

Il est non seulement impossible mais inutile de connaître Dieu sans Jésus-Christ. Ils ne s’en sont pas éloignés mais approchés ; ils ne se sont pas abaissés mais quo quisque optimus eo pessimus si hoc ipsum quod sit optimus ascribat sibi.

 

 

La nécessité de passer par le Christ et la Révélation évangélique pour trouver Dieu est l’un des thèmes principaux de la liasse Excellence de cette manière de prouver Dieu. Le présent fragment envisage le cas des rares philosophes païens qui ont approché de la vérité et de l’idée d’un Dieu unique, mais qui n’ont pas pour autant connu le Christ, de sorte que cet avantage qu’ils avaient sur les autres philosophes, athées ou polythéistes, s’est retourné contre eux.

Quo quisque optimus eo pessimus si hoc ipsum quod sit optimus ascribat sibi : (trad.) Meilleur on est, pire on devient, si on s’attribue à soi-même ce par quoi on est bon.

 

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Fragments connexes

 

Philosophes 4 (Laf. 142, Sel. 175). Contre les philosophes qui ont Dieu sans J.-C. (texte barré)

Excellence 1 (Laf. 189, Sel. 221). Dieu par Jésus-Christ. Nous ne connaissons Dieu que par Jésus-Christ. Sans ce médiateur est ôtée toute communication avec Dieu. Par Jésus-Christ nous connaissons Dieu. Tous ceux qui ont prétendu connaître Dieu et le prouver sans Jésus-Christ n’avaient que des preuves impuissantes. Mais pour prouver Jésus-Christ nous avons les prophéties qui sont des preuves solides et palpables. Et ces prophéties étant accomplies et prouvées véritables par l’événement marquent la certitude de ces vérités et partant la preuve de la divinité de Jésus-Christ. En lui et par lui nous connaissons donc Dieu. Hors de là et sans l’Écriture, sans le péché originel, sans médiateur nécessaire, promis et arrivé, on ne peut prouver absolument Dieu, ni enseigner ni bonne doctrine, ni bonne morale. Mais par Jésus-Christ et en Jésus-Christ on prouve Dieu et on enseigne la morale et la doctrine. Jésus-Christ est donc le véritable Dieu des hommes.

Mais nous connaissons en même temps notre misère, car ce Dieu-là n’est autre chose que le réparateur de notre misère. Ainsi nous ne pouvons bien connaître Dieu qu’en connaissant nos iniquités. Aussi ceux qui ont connu Dieu sans connaître leur misère ne l’ont pas glorifié, mais s’en sont glorifiés. Quia non cognovit per sapientiam, placuit Deo per stultitiam prædicationis salvos facere.

Excellence 2  (Laf. 190, Sel. 222). Quod curiositate cognoverunt, superbia amiserunt.

Excellence 3 (Laf. 190, Sel. 223). C’est ce que produit la connaissance de Dieu qui se tire sans J.-C. qui est de communiquer sans médiateur avec le Dieu qu’on a connu sans médiateur. Au lieu que ceux qui ont connu Dieu par médiateur connaissent leur misère.

Excellence 5 (Laf. 192, Sel. 225). La connaissance de Dieu sans celle de sa misère fait l’orgueil.

La connaissance de sa misère sans celle de Dieu fait le désespoir.

La connaissance de J.-C. fait le milieu parce que nous y trouvons, et Dieu et notre misère.

Dossier de travail (Laf. 417, Sel. 36). Non seulement nous ne connaissons Dieu que par Jésus-Christ mais nous ne nous connaissons nous-mêmes que par J.-C. ; nous ne connaissons la vie, la mort que par Jésus-Christ. Hors de J.-C. nous ne savons ce que c’est ni que notre vie, ni que notre mort, ni que Dieu, ni que nous-mêmes. Ainsi sans l’Écriture qui n’a que J.-C. pour objet nous ne connaissons rien et ne voyons qu’obscurité et confusion dans la nature de Dieu et dans la propre nature. »

Preuves par discours IV (Laf. 449, Sel. 690). « Elle enseigne donc ensemble aux hommes ces deux vérités : et qu’il y a un Dieu, dont les hommes sont capables, et qu’il y a une corruption dans la nature, qui les en rend indignes. Il importe également aux hommes de connaître l’un et l’autre de ces points ; et il est également dangereux à l’homme de connaître Dieu sans connaître sa misère, et de connaître sa misère sans connaître le Rédempteur qui l’en peut guérir. Une seule de ces connaissances fait, ou la superbe des philosophes, qui ont connu Dieu et non leur misère, ou le désespoir des athées, qui connaissent leur misère sans Rédempteur. Et ainsi, comme il est également de la nécessité de l’homme de connaître ces deux points, il est aussi également de la miséricorde de Dieu de nous les avoir fait connaître. La religion chrétienne le fait, c’est en cela qu’elle consiste. Qu’on examine l’ordre du monde sur cela, et qu’on voie si toutes choses ne tendent pas à l’établissement des deux chefs de cette religion : Jésus-Christ est l’objet de tout, et le centre où tout tend. Qui le connaît la raison de toutes choses.

Preuves par discours II (Laf. 430, Sel. 683). Levez vos yeux vers Dieu, disent les uns ; voyez celui auquel vous ressemblez, et qui vous a faits pour l’adorer. Vous pouvez vous rendre semblable à lui ; la sagesse vous y égalera, si vous voulez le suivre. « Haussez la tête, hommes libres », dit Épictète. Et les autres lui disent : Baissez les yeux vers la terre, chétif ver que vous êtes, et regardez les bêtes dont vous êtes le compagnon.

Preuves par discours III (Laf. 449, Sel. 690). Je n’entreprendrai pas ici de prouver par des raisons naturelles, ou l’existence de Dieu, ou la Trinité, ou l’immortalité de l’âme, ni aucune des choses de cette nature ; non seulement parce que je ne me sentirais pas assez fort pour trouver dans la nature de quoi convaincre des athées endurcis, mais encore parce que cette connaissance, sans Jésus-Christ, est inutile et stérile. [...] Tous ceux qui cherchent Dieu hors de Jésus-Christ, et qui s’arrêtent dans la nature, ou ils ne trouvent aucune lumière qui les satisfasse, ou ils arrivent à se former un moyen de connaître Dieu et de le servir sans médiateur, et par là ils tombent ou dans l’athéisme ou dans le déisme, qui sont deux choses que la religion chrétienne abhorre presque également.

Pensées diverses (Laf. 781, Sel. 644). Ce n’est pas de cette sorte que l’Écriture qui connaît mieux les choses qui sont de Dieu en parle. Elle dit au contraire que Dieu est un Dieu caché et que depuis la corruption de la nature il les a laissés dans un aveuglement dont ils ne peuvent sortir que par J.-C., hors duquel toute communication avec Dieu est ôtée. Nemo novit patrem nisi filius et cui filius voluit revelare.

 

Textes connexes

 

Sur Jésus-Christ, voir la liasse Preuves de Jésus-Christ, et le fragment intitulé Le mystère de Jésus (Laf. 919, Sel. 749), ainsi que l’Abrégé de la vie de Jésus-Christ, OC III, éd. J. Mesnard, p. 178 sq.

 

Mots-clés : Abaisser – Approcher – Dieu – Éloigner – Jésus-Christ.