Pensées diverses II – Fragment n° 32 / 37 – Papier original : RO 47-9

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : n° 113 p. 359 v°  / C2 : p. 317

Éditions de Port-Royal : Chap. III - Véritable religion prouvée par les contrariétés... : 1669 et janv. 1670 p. 40 / 1678 n° 13 p. 42-43

Éditions savantes : Faugère II, 81, VI / Havet XII.8 / Brunschvicg 417 / Tourneur p. 94-1 / Le Guern 536 / Lafuma 629 (série XXIV) / Sellier 522

 

 

 

Cette duplicité de l’homme est si visible qu’il y en a qui ont pensé que nous avions deux âmes.

Un sujet simple leur paraissant incapable de telles et si soudaines variétés, d’une présomption démesurée à un horrible abattement de cœur.

 

 

Fragment dans lequel Pascal indique, de manière très allusive, à quelles imaginations les contrariétés de la nature humaine ont conduit les philosophes.

 

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Fragments connexes

 

A P. R. 1 (Laf. 149, Sel. 182). Vous n’êtes plus maintenant en l’état où je vous ai formés. J’ai créé l’homme saint, innocent, parfait ; je l’ai rempli de lumière et d’intelligence, je lui ai communiqué ma gloire et mes merveilles. L’œil de l’homme voyait alors la majesté de Dieu. Il n’était pas alors dans les ténèbres qui l’aveuglent, ni dans la mortalité et dans les misères qui l’affligent. Mais il n’a pu soutenir tant de gloire sans tomber dans la présomption. Il a voulu se rendre centre de lui-même et indépendant de mon secours. Il s’est soustrait de ma domination et s’égalant à moi par le désir de trouver sa félicité en lui-même je l’ai abandonné à lui, et révoltant les créatures qui lui étaient soumises, je les lui ai rendues ennemies, en sorte qu’aujourd’hui l’homme est devenu semblable aux bêtes, et dans un tel éloignement de moi qu’à peine lui reste-t-il une lumière confuse de son auteur tant toutes ses connaissances ont été éteintes ou troublées. Les sens indépendants de la raison et souvent maîtres de la raison l’ont emporté à la recherche des plaisirs. Toutes les créatures ou l’affligent ou le tentent, et dominent sur lui ou en le soumettant par leur force ou en le charmant par leur douceur, ce qui est une domination plus terrible et plus injurieuse.

Voilà l’état où les hommes sont aujourd’hui. Il leur reste quelque instinct impuissant du bonheur de leur première nature, et ils sont plongés dans les misères de leur aveuglement et de leur concupiscence qui est devenue leur seconde nature.

De ce principe que je vous ouvre vous pouvez reconnaître la cause de tant de contrariétés qui ont étonné tous les hommes et qui les ont partagés en de si divers sentiments. Observez maintenant tous les mouvements de grandeur et de gloire que l’épreuve de tant de misères ne peut étouffer et voyez s’il ne faut pas que la cause en soit en une autre nature.

Excellence 5 (Laf. 192, Sel. 225). La connaissance de Dieu sans celle de sa misère fait l’orgueil. La connaissance de sa misère sans celle de Dieu fait le désespoir. La connaissance de Jésus-Christ fait le milieu parce que nous y trouvons, et Dieu et notre misère.

Morale chrétienne 2 (Laf. 352, Sel. 384). La misère persuade le désespoir.

L’orgueil persuade la présomption.

L’Incarnation montre à l’homme la grandeur de sa misère par la grandeur du remède qu’il a fallu.

Morale chrétienne 4 (Laf. 354, Sel. 386)Il n’y a point de doctrine plus propre à l’homme que celle-là qui l’instruit de sa double capacité de recevoir et de perdre la grâce à cause du double péril où il est toujours exposé de désespoir ou d’orgueil.

 

Mots-clés : ÂmeCœur – Deux – HommePrésomption – Sujet – VariétéVisible.