Fragment Ennui n° 2 / 3 – Papier original : RO 81-5

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Ennui n° 105 p. 27 / C2 : p. 45

Éditions savantes : Faugère II, 79, I / Havet XXV.81 / Brunschvicg 126 / Tourneur p. 181-7 / Le Guern 73 / Lafuma 78 / Sellier 113

 

 

 

Description de l’homme.

 

Dépendance, désir d’indépendance, besoins.

 

 

 

Comme dans plusieurs fragments-listes du même genre, on peut se demander si c’est un sommaire ou le résumé d’un processus. La seconde hypothèse se défend bien : la dépendance engendre le désir d’échapper à la soumission, mais ce désir d’indépendance fait apparaître nettement ce dont on a besoin et dont on ne peut se passer, sans toujours pouvoir l’acquérir, pour satisfaire ce besoin d’indépendance. Autrement dit, ce désir d’indépendance fait sentir à l’homme ce qui lui manque, ce qui lui donne le sentiment de sa misère.

Mais le mot description, qui désigne en logique et en rhétorique la présentation des différents attributs d’un sujet, semble mieux correspondre à une liste de caractères ou d’attributs, sans idée de processus évolutif.

On trouve une liste comparable dans Vanité 12 (Laf. 24, Sel. 58). Condition de l’homme. Inconstance, Ennui, Inquiétude.

 

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Fragments connexes

 

Vanité 12 (Laf. 24, Sel. 58). Condition de l’homme. Inconstance, Ennui, Inquiétude.

A P. R. 1 (Laf. 149, Sel. 182). Mais, vous n’êtes plus maintenant en l’état où je vous ai formés. J’ai créé l’homme saint, innocent, parfait, je l’ai rempli de lumière et d’intelligence, je lui ai communiqué ma gloire et mes merveilles. L’œil de l’homme voyait alors la majesté de Dieu. Il n’était pas alors dans les ténèbres qui l’aveuglent, ni dans la mortalité et dans les misères qui l’affligent. Mais il n’a pu soutenir tant de gloire sans tomber dans la présomption. Il a voulu se rendre centre de lui-même et indépendant de mon secours. Il s’est soustrait de ma domination et s’égalant à moi par le désir de trouver sa félicité en lui-même je l’ai abandonné à lui, et révoltant les créatures qui lui étaient soumises, je les lui ai rendues ennemies, en sorte qu’aujourd’hui l’homme est devenu semblable aux bêtes, et dans un tel éloignement de moi qu’à peine lui reste-t-il une lumière confuse de son auteur, tant toutes ses connaissances ont été éteintes ou troublées. Les sens indépendants de la raison et souvent maîtres de la raison l’ont emporté à la recherche des plaisirs. Toutes les créatures ou l’affligent ou le tentent, et dominent sur lui ou en le soumettant par leur force ou en le charmant par leur douceur, ce qui est une domination plus terrible et plus injurieuse.

Preuves de J.-C. 11 (Laf. 308, Sel. 339). Les grands génies ont leur empire, leur éclat, leur grandeur, leur victoire et leur lustre, et n’ont nul besoin des grandeurs charnelles où elles n’ont pas de rapport. Ils sont vus, non des yeux mais des esprits. C’est assez.

Les saints ont leur empire, leur éclat, leur victoire, leur lustre et n’ont nul besoin des grandeurs charnelles ou spirituelles, où elles n’ont nul rapport, car elles n’y ajoutent ni ôtent. Ils sont vus de Dieu et des anges et non des corps ni des esprits curieux. Dieu leur suffit.

Pensées diverses (Laf. 605, Sel. 502). L’homme est plein de besoins. Il n’aime que ceux qui peuvent les remplir tous. C’est un bon mathématicien dira‑t‑on, mais je n’ai que faire de mathématique ; il me prendrait pour une proposition. C’est un bon guerrier : il me prendrait pour une place assiégée. Il faut donc un honnête homme qui puisse s’accommoder à tous mes besoins généralement.

Pensées diverses (Laf. 622, Sel. 515). Rien n’est si insupportable à l’homme que d’être dans un plein repos, sans passions, sans affaires, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide.

 

Mots-clés : BesoinDépendanceDescriptionDésirHomme.