Fragment Raisons des effets n° 8 / 21 - Papier original :  RO 231-1

Copies manuscrites du XVIIe s. : C1 : Raisons des effets n° 119 p. 33 / C2 : p. 50

Éditions savantes : Faugère I, 221, CXXXVII / Havet V.13 / Michaut 494 / Brunschvicg 315 / Tourneur p. 190-3 / Le Guern 82 / Lafuma 89 / Sellier 123

 

 

 

Raison des effets.

 

Cela est admirable : on ne veut pas que j’honore un homme vêtu de brocatelle, et suivi de sept ou huit laquais. Et quoi, il me fera donner les étrivières, si je ne le salue. Cet habit, c’est une force. C’est bien de même qu’un cheval bien enharnaché à l’égard d’un autre. Montaigne est plaisant de ne pas voir quelle différence il y a, et d’admirer qu’on y en trouve, et d’en demander la raison. De vrai, dit‑il, d’où vient, etc.

 

 

 

À partir de la comparaison ironique que fait Montaigne entre l’homme et le cheval, pour dénoncer la duperie qui se cache dans les honneurs que l’on rend aux atours brillants des grands, Pascal entreprend de développer un paradoxe au second degré, en soutenant que ces extérieurs ne sont vains qu’en apparence, et qu’ils ont en réalité un fondement très solide : les grands portent des vêtements de brocatelle et se font entourer de nombreux laquais pour bien signifier qu’ils détiennent la force. Dénigrer les vêtements des grands, c’est le propre des demi-habiles qui n’ont pas compris la nécessité de ces extérieurs pour assurer l’ordre et la paix politique en manifestant le pouvoir qu’ils ont de punir ceux qui y contreviendraient. Ce bref fragment présente en quelque sorte en abyme les trois premiers degrés de la gradation du fragment Raisons des effets 9 (Laf. 90, Sel. 124) : le peuple qui respecte les grands, Montaigne présenté comme demi-habile qui refuse de se laisser prendre aux apparences, et l’auteur, qui trouve plaisant que Montaigne ne comprenne pas la raison des effets.

 

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Fragments connexes

 

Vanité 7 (Laf. 19, Sel. 53). Il a quatre laquais.

Raisons des effets 6 (Laf. 87, Sel. 121). Le chancelier est grave et revêtu d’ornements. Car son poste est faux et non le roi. Il a la force, il n’a que faire de l’imagination. Les juges, médecins, etc., n’ont que l’imagination.

Raisons des effets 9 (Laf. 90, Sel. 124). Raison des effets.

Gradation. Le peuple honore les personnes de grande naissance, les demi-habiles les méprisent disant que la naissance n’est pas un avantage de la personne mais du hasard. Les habiles les honorent, non par la pensée du peuple mais par la pensée de derrière. Les dévots qui ont plus de zèle que de science les méprisent malgré cette considération qui les fait honorer par les habiles, parce qu’ils en jugent par une nouvelle lumière que la piété leur donne, mais les chrétiens parfaits les honorent par un(e) autre lumière supérieure.

Ainsi se vont les opinions succédant du pour au contre selon qu’on a de lumière.

Raisons des effets 14 (Laf. 95, Sel. 129). Opinions du peuple saines.

Être brave n’est pas trop vain, car c’est montrer qu’un grand nombre de gens travaillent pour soi. C’est montrer par ses cheveux qu’on a un valet de chambre, un parfumeur, etc., par son rabat, le fil, le passement, etc. Or ce n’est pas une simple superficie, ni un simple harnais d’avoir plusieurs bras.

Plus on a de bras, plus on est fort. Être brave c’est montrer sa force.

Raisons des effets 20 (Laf. 103, Sel. 135). La force est très reconnaissable et sans dispute.

 

Mots-clés : AdmirationBrocatelleChevalÉtrivièresHarnaisHommeLaquaisMontaigne.